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Il se servit, même dans ses chefs-d’œuvre les plus personnels, des noms popularisés par ses rivaux du Petit-Bourbon et du Palais-Royal ; Marinette, Horace, Valère, sont les noms caractéristiques de la soubrette et des amoureux de la troupe italienne. […] Quoique Molière eût en lui un redoutable rival, il était trop au-dessus de la basse jalousie pour n’entendre pas volontiers les louanges qu’on lui donnait ; et il me semble fort (sans oser pourtant rassurer après quarante ans) d’avoir ouï dire à Molière, en parlant avec Domenico de Poisson, qu’il aurait donné toutes choses au monde pour avoir le naturel de ce grand comédien. […] Ce n’est pas sans quelque apparence de probabilité, qu’on a pu supposer que ces relations remontaient à l’époque de l’Illustre Théâtre, et que Le Boulanger de Chalussay avait été comédien dans une des troupes de province rivales de celle des Béjart.

132. (1848) De l’influence des mœurs sur la comédie pp. 1-221

Croyant que le fils du comte de Surgy, son ancien ami, a des créanciers et de plus un rival plébéien qui le contrarie dans ses amours, il conseille au jeune homme de faire mettre les uns au For-l’Évêque et d’envoyer l’autre à la Bastille. […] Éric, c’est le nom du jeune plébéien, provoque son rival en duel. […] Si Molière eût exploité le penchant du public de son temps pour le bel esprit, il n’eût pas manqué de composer des pièces dans le goût du sonnet du Misanthrope, dont la lecture, à la première représentation de cet ouvrage, excita, comme on sait, des bravos universels, et dès lors, au lieu d’être ce génie incomparable, sans rival même dans l’antiquité, Molière n’eût pu guère aspirer qu’au mince honneur de devancer Marivaux de près d’un siècle.

133. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Par l’étude de l’antiquité, nos enfants ne deviendront pas des Sophocles ; mais ils pourront relever noire poésie qui se meurt de sottise, d’exaltation mystique, d’amour vide, de dévergondage et d’ignorance, épurer, élargir la source d’où coule le fleuve poétique de notre époque, et donner à Lamartine et à lord Byron des rivaux. […] ne put se retenir d’écrire à la reine Élisabeth une lettre où elle tournait en ridicule, au risque de précipiter l’instant de sa mort, la comtesse de Shrewsbury et sa triomphante rivale elle-même par la plus sanglante ironie ; et Molière, né à Paris, Molière protégé, encouragé par le roi qui lui désignait ses victimes, aurait épargné Trissotin pour ne pas déplaire au futur auteur du Cours de littérature dramatique !

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