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92. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XII. Réflexions Générales. » pp. 241-265

Maintenant, on voudrait tâcher de se dérober à la passion du beau et au joug du génie pour conserver toute l’impartialité du sens et du jugement moral. […] Immoler sous le rire tous leurs ridicules, toutes leurs passions honteuses, et leur montrer en riant ce que sont la vraie distinction et la vraie noblesse, c’est travailler sans aucun doute à les rendre meilleurs. […] On se dit que ses grandes comédies sont décidément un divertissement moral ; qu’il serait à souhaiter que nos spectacles n’offrissent jamais aux passions populaires que des œuvres de cette nature, sinon de ce mérite ; et qu’après tout il y aurait avantage à ce que notre peuple allât souvent au théâtre de Molière.

93. (1823) Notices des œuvres de Molière (VII) : L’Avare ; George Dandin ; Monsieur de Pourceaugnac ; Les Amants magnifiques pp. 171-571

Quoi de plus contraire à l’avarice, et en même temps de plus propre à la balancer, à l’emporter sur elle, que l’amour, la plus prodigue et la plus impérieuse de toutes les passions ? […] Le poète veut-il préserver les hommes de l’avarice, il leur dit : Si vous êtes avares, vous aurez des enfants dissipateurs qui, privés par vous du nécessaire, se procureront le superflu par des moyens ruineux ; des enfants qui, victimes de votre odieuse passion et témoins du mépris qu’elle inspire, n’auront pour vous ni affection ni respect. […] Ce n’est pas parce que la plaisanterie y est moins fine, la moquerie moins délicate et la gaîté plus facétieuse ; c’est parce qu’elle ne peint ni vice, ni travers, ni passion ; qu’elle n’est une censure ni de l’homme ou de la société, ni des caractères ou des mœurs. […] L’un a la crédulité de la sottise ; l’autre a celle de la passion. […] Le principal rapport des deux pièces consiste dans l’intervention d’un personnage subalterne, mais assez bien venu à la cour, ici à titre de fou, là en qualité de bouffon, et qui, prenant en main les intérêts d’un amant timide, emploie tout ce que les prérogatives de son office lui donnent d’accès et de privauté auprès d’une princesse, pour sonder son cœur, s’assurer s’il ne renferme pas le germe d’une passion réciproque ; l’y déposer, s’il est nécessaire ; le développer par ses soins, et forcer enfin le double orgueil du rang et du sexe à confesser sa défaite.

94. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

sans haine, sans envie, et sans colère, et sans menace, au contraire, toute remplie d’enthousiasme et d’honnête passion ! […] Lui, cependant, Baron, fidèle à ses rôles, et sachant très bien qu’en fin de compte le parterre ne s’intéresse qu’à la passion dans la comédie et dans le drame, il jouait, jusqu’à la fin, le rôle des beaux jeunes gens amoureux que Molière avait écrit tout exprès, il y avait soixante ans, pour ce jeune Baron.

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