Le grand Condé exigeait de lui qu’il le vînt voir souvent, et disait qu’il trouvait toujours à apprendre dans sa conversation. […] Molière est le premier qui ait su tourner en scènes ces conversations du monde, et y mêler des portraits. […] Il est inutile d’examiner ici en détail les beautés de ce chef-d’œuvre de l’esprit, et de montrer avec quel art Molière a peint un homme qui pousse la vertu jusqu’au ridicule, rempli de faiblesse pour une coquette, de remarquer la conversation et le contraste charmant d’une prude avec cette coquette outrée. […] Si on osait encore chercher dans le cœur humain la raison de cette tiédeur du public aux représentations du Misanthrope, peut-être les trouverait-on dans l’intrigue de la pièce, dont les beautés ingénieuses et fines ne sont pas également vives et intéressantes ; dans ces conversations même, qui sont des morceaux inimitables, mais qui n’étant pas toujours nécessaires à la pièce, peut-être refroidissent un peu l’action, pendant qu’elles font admirer l’auteur ; enfin dans le dénouement, qui, tout bien amené et tout sage qu’il est, semble être attendu du public sans inquiétude, et qui venant après une intrigue peu attachante, ne peut avoir rien de piquant.
La publication de L’Astrée fut, selon Boileau, l’époque où l’afféterie précieuse de langage, les conversations vagues et frivoles , les longs verbiages d’amour commencèrent à être en vogue.
La Sylvie de Mairet, écrite dans ce genre, et qui n’est qu’un froid tissu de madrigaux subtils, de conversations en pointes et de dissertations en jeux de mots, excita dans Paris une sorte d’ivresse qui prouvait le mauvais goût dominant et servait à l’entretenir. […] On appelait ainsi un mélange de conversation et d’aventures de roman que la galanterie espagnole avait mis en vogue, comme on donnait le nom de comédies à des farces extravagantes. […] Quand on lit ce passage de Molière , « La belle chose de faire entrer aux conversations du Louvre de vieilles équivoques ramassées parmi les boues des Halles et de la place Maubert ! […] Mais ne dit-on pas tous les jours en conversation ce qu’on ne voudrait pas écrire? […] Est-il possible, par exemple, de peindre mieux l’effet que produit le phébus et le galimatias dans la conversation comme dans les livres, que par ce vers si heureux ?