Larroumet lui-même n’est pas éloigné de croire que les dix mille livres, montant de la dot, furent fournies par Madeleine ; mais il se hâte d’ajouter : « Il est encore plus simple d’admettre que la dot fut constituée par Molière lui-même, compensant de cette manière assez usitée la différence d’âge qui existait entre sa jeune femme et lui. » Non ; car, en pareil cas, le contrat est quittancé ; on n’attend pas quatre mois pour constater le payement d’une dot fictive, comme cela arriva pour celle d’Armande, dont le chiffre concorde exactement avec l’importance d’un prêt fait par Madeleine à la province du Languedoc, prêt qu’elle ne put faire rentrer à temps, comme elle l’avait espéré d’abord, et que sans doute elle transféra à son gendre par acte privé, car la quittance de la dot ne porte point la mention ordinaire que les deniers ont été versés en présence des notaires. […] Les factums de Guichard sont les écrits d’un homme qui se défend en attaquant ceux qui lui nuisent ; on ne pouvait pas, apparemment, attendre de lui un panégyrique, et de la vivacité de ces attaques il ne suit pas nécessairement qu’elles soient toutes des calomnies.
« [*]La nature, qui semblait avoir épuisé ses dons en faveur de Molière, parut en être avare pour les poètes qui vinrent après lui : on négligea la perfection des plans et de l’intrigue ; on dédaigna les caractères, on abandonna la noble simplicité de sa diction ; et soit incapacité, soit indolence dans les auteurs qui suivirent ce grand homme, ses ouvrages occupèrent longtemps seuls le théâtre français, avec la supériorité et la justice qui leur étaient dues ; enfin les spectateurs, lassés d’attendre un génie capable d’imaginer avec l’art de Molière des fables nouvelles, et d’imiter aussi heureusement celles des anciens, refusèrent leurs applaudissements à des comédies qu’on leur présenta, parce qu’elles étaient dénuées d’intrigue, ou qu’elles en étaient trop chargées.
Ce ne sont que rencontres impossibles, confusions de noms, générosités tombées du ciel ; pardons où l’on attendait des vengeances ; cachettes dans les murailles, derrière les tapisseries ; aparté pour unique moyen des effets de scène ; un mélange grossier de traditions grecques et latines, espagnoles et italiennes ; et, pour la part de la France, de gros sel gaulois, la seule chose qui ait quelque saveur dans cet amalgame.