Le texte est donc resté pur ; seulement La Grange s’est permis d’introduire deux paragraphes dans la scène v de l’acte III, entre Harpagon et son cuisinier : l’interpolation est des plus maladroites, et n’a d’autre but que d’allonger, par des exagérations absurdes, une situation très comique. Harpagon veut donner à dîner ; il consulte maître Jacques, qui lui répond par une longue kyrielle de mets suffisants pour festiner une ville entière. […] Molière, qui, peu de temps après, donna sa comédie de l’Avare, chargea Béjart du rôle de La Flèche, de qui Harpagon dit par allusion : « Je ne me plais point à voir ce chien de boiteux-là. » Comme Béjart faisait beaucoup de plaisir, on boita aussitôt sur tous les théâtres de province, non-seulement dans le rôle de La Flèche, où cela devenait nécessaire, mais indifféremment dans tous ceux que Béjart remplissait à Paris.
Pour ses grands rôles, Arnolphe, Alceste, Harpagon, Sosie, M.
Le 9 septembre 1668, il exposa aux yeux du public le tableau des vilenies d’Harpagon. […] Qui pourrait penser à versifier la scène d’Harpagon et de La Flèche, du premier acte ; celle du diamant au troisième, et tant d’autres dont les expressions si naturelles ne le sembleraient plus autrement disposées ? […] Ce comédien étant très aimé du parterre, les acteurs qui étaient chargés de son emploi en province cherchaient à reproduire son jeu autant que cela leur était possible ; ils poussèrent l’imitation jusqu’à boiter, non seulement dans le rôle de La Flèche, où la phrase d’Harpagon le rendait nécessaire, mais indistinctement dans tous ceux que jouait Béjart.