Auprès de vous se tient, souriante et charmée de vous voir, la belle et consolante déesse de la jeunesse ; elle est votre consolation, elle est votre force, et si parfois quelque découragement pénètre au fond de votre âme enivrée et chancelante sous les parfums du laurier poétique, eh bien ! […] disait-elle, homme heureux, qui reste absolument le maître des esprits et des âmes ! […] … Mais enfin l’arrêt était porté ; il a fallu descendre dans l’oubli, cette tombe anticipée des plus grands artistes. — Âme, je te dégage de ton corps ! […] Maintenant, disent les messieurs et les dames, qu’elle vive ou qu’elle meure, ou bien que cette âme en peine remplisse son silence et sa solitude de ses regrets et de ses douleurs, que nous importe ? […] Il y a bien de l’héroïsme caché dans ces âmes-là.
Vous voyez bien cet histrion qui joue la femme, il copie à ravir les passions impudiques, et ce mensonge aussitôt devient un feu terrible dans l’âme de l’auditoire. » Ainsi parlait un païen converti, un avocat de Rome devenu chrétien, Minutius Félix ! […] Oui, mais plus grand et plus rare est le danger, plus rare aussi et plus charmante est la poésie habile à produire ce danger des esprits éclairés, des âmes impatientes, des imaginations avides de tout savoir. […] mais cette opération que tu fais là t’a donc tué l’âme et le cœur ! […] Certes, voilà ce qui ne vous serait pas arrivé il y a dix ans, quand vous étiez quelque peu un poète, quand votre âme honnête et jeune s’ouvrait facilement aux nobles impressions du beau et du bon. […] À l’aspect de ce bel instrument au repos, ne vous êtes-vous pas pris de tristesse en songeant à toutes les misères musicales que contenait cette âme en peine : les sonates de la petite demoiselle au retour de sa pension, les romances du faiseur de romances, les opéras-comiques des grands prix de Rome, les roulades des chanteurs et des chanteuses, tout ce menu fretin des mélodies de pensionnat et de salon ?
Molière a-t-il seulement l’idée de la vertu banale et de la morale élastique à l’usage des gens du monde, ou son âme élevée conçoit-elle cette honnêteté supérieure, cette perfection scrupuleuse qui sait joindre la politesse exquise à la vertu rigide, et qui constituait de son temps l’honnête homme ? […] C’est là que Molière me paraît vraiment un moraliste j c’est là qu’il enseigne avec une délicatesse supérieure en quoi consiste le parfait honnête homme, et qu’il distingue avec une finesse sans égale ce qui est bon et ce qui est inférieur dans une âme aussi élevée et aussi peu accessible au mal que celle du Misanthrope. […] Il est admirable dans sa loyauté en amour139, dans son indignation contre les mensonges du cœur140, dans sa bonté à pardonner une tromperie d’autant plus indigne qu’elle s’adresse à un homme comme lui141 ; mais il exprime ridiculement un amour mal fait pour une âme comme la sienne, et mal placé sur une femme incapable de le comprendre142. […] Non : elle est générale, et je hais tous les hommes, Les uns, parce qu’ils sont méchants et malfaisants, Et les autres, pour être aux méchants complaisants, Et n’avoir pas pour eux ces haines vigoureuses Que doit donner le vice aux âmes vertueuses144. […] XXVI, v. 75. — « Mais le coup de maître est d’avoir fait-Alceste amoureux, d’avoir courbé cette âme indomptée sous le joug de la passion, et montré par là surtout que le plus sage ne peut être complètement sage, Et que dans tons les cœurs il est toujours de l’homme.