Avec quel sang-froid et quel art du monde Célimène improvise une histoire pareille où, sans paraître y toucher, elle met à jour les secrètes passions et l’envie de la prude ! […] Elle a écrit à Oronte ; la lettre surprise est dans les mains d’Alceste ; il accourt furieux, éclate, puis se calme, et lui qui tout à l’heure accusait sa maîtresse, il la prie à genoux de se justifier : À vous prêter les mains ma tendresse consent28 ; Efforcez-vous ici de paraître fidèle, Et je m’efforcerai, moi, de vous croire telle. […] Ses pièces nous offrent donc l’esquisse de plusieurs femmes estimables, par lesquelles il paraît s’être essayé au portrait qu’il voulait achever plus tard. […] Ce trait, qui paraît n’accuser que l’ignorance d’Henriette, ne frappe-t-il pas aussi Philaminte, Armande et Bélise ?
« Pour vous dire le vrai, je n’ai point grand goût pour cet auteur25. » Le changement qui s’opéra dans le goût de Voiture me paraît remarquable comme témoignage de celui qui dominait à l’hôtel de Rambouillet, et me semble prouver que les principaux personnages de cette société, au lieu d’être des modèles de mauvais langage, contribuaient à corriger et à épurer les ridicules qui depuis L’Astrée s’étaient propagés parmi les beaux esprits.
Plus vous étudierez les maîtres et les disciples venus après eux, — pater et juvenes patre digni , et plus vous trouverez qu’ils obéissent au même art poétique, où il est enseigné que la poésie est une imitation des actions, des paroles et des mœurs de nos semblables ; que cette imitation, pour être exacte et fidèle doit être conforme aux mœurs et aux usages des temps dont on parle, et que c’est justement dans la juste expression des caractères que les poètes font paraître cet art de l’imitation qui est un art si charmant, lorsqu’il est fidèle et complet ; même le mensonge est agréable s’il a les apparences de la vérité. […] Le Malade imaginaire est complètement un imbécile, sans une ombre de goût et d’esprit, en dehors de sa maladie ; le Bourgeois gentilhomme, autre victime : on ne lui laisse pas même assez de bon sens pour se conduire, au-delà de sa passion d’être et de paraître. — Tout ou rien, voilà la comédie ; ou la honte absolue, ou la gloire sans tache ! […] Enfin, et ceci est une critique à faire aux pédants (meâ culpâ), armés de citations dans l’une et l’autre langue ( utriusque linguæ , disait Horace) : « Ne paraissez pas si savant, de grâce ; humanisez votre discours et parlez pour être entendu. » Qui voudrait avoir le secret de la critique appliqué à l’art du théâtre, se pourrait contenter d’étudier et de méditer La Critique de l’École des femmes ; il y trouverait les meilleurs et les plus utiles préceptes de prudence, de modération, de finesse, et comme dit un de nos vieux auteurs : En délectant profiteras.
Qui dirait, au récit charmant de cette Agnès, naïve autant que Charlotte et Mathurine, que tout à l’heure, évoqué des abîmes par la toute-puissance du drame aux mille aspects, Don Juan va paraître ? […] Il paraît qu’Armande Béjart a jeté au feu tous les papiers de son mari, ce qui représente un grand malheur ! […] Il paraît donc : à son aspect, sans se douter de ses tortures, cet affreux parterre se met à rire.
Enorgueillissons-nous, si nous le voulons absolument, d’avoir poussé plus loin que les Anciens l’art dans les pieces à caractere ; mais ne nous flattons pas d’avoir créé ce genre, comme si nous ignorions que nous devons aux Espagnols le premier caractere qui ait paru sur notre scene.
L’action dramatique ne paraît pas avoir été très naturelle à l’esprit français qui a toujours été fort enclin aux discours.
Elle parut consolée d’un discours si obligeant. . . […] Léandre paroît comme un fantôme : il dit au Capitan qu’il est l’esprit du meilleur de ses parents, qu’il est venu pour garder son honneur pendant son absence : il embrasse la femme en présence du mari qui ne le trouve pas mauvais, & disparoît.
Et cette autre Climène, qui se trouve mal pour avoir vu l’École des Femmes, et qui pousse la pudeur jusqu’à l’obscénité 289 : « cette personne qui est précieuse depuis les pieds- jusqu’à la tête, et la plus grande façonnière du monde ; il semble que tout son corps soit démonté, et que les mouvements de ses hanches, de ses épaules et de sa tête n’aillent que par ressorts ; elle affecte toujours un ton de voix languissant et niais, fait la moue pour montrer une petite bouche, et roule les yeux pour les faire paroître grands : » en somme, « la plus sotte bête qui se soit jamais.mêlée de raisonner290 ! […] « Ces comédies firent tant de honte aux dames qui se piquoient trop de bel esprit, que toute la nation des précieuses s’éteignit en moins de quinze jours, ou du moins elles se déguisèrent si bien là-dessus, qu’on n’en trouva plus ni à la cour ni à la ville ; et même depuis ce temps-là elles ont été plus en garde contre la réputation de savantes et de précieuses que contre celle de galantes et de déréglées. » Perrault, Les Hommes illustres qui ont paru en France pendant le dix-septième siècle, article Molière.
Les Mémoires de Saint-Simon viennent de commencer, et deux volumes ont paru l’année dernière ; on en fait espérer deux cette année. […] Nous n’insisterons pas beaucoup sur l’imputation d’avoir mis sur la scène une religieuse qui a violé ses vœux ; car il ne faut pas oublier que sur le théâtre italien et espagnol, dont la pièce est tirée, les auteurs ne se faisaient pas faute de faire paraître des religieuses et des moines ; et si notre théâtre est devenu plus scrupuleux, c’est en grande partie à Molière qu’il le doit. En outre, lorsqu’Elvire paraît dans la pièce, le mal a été fait ; la faute est passée, et elle ne demande qu’à la réparer ; enfin, désabusée sur son amant, elle s’est jetée de nouveau entre les bras de Dieu pour expier son péché ; et elle ne reparaît devant don Juan que pour essayer de le ramener au bien et à la vertu : elle ne pense plus qu’au salut pour elle-même et pour lui. […] Quant à aller plus loin et à conclure quoi que ce soit sur le fond des doctrines, c’est ce qui paraît difficile. […] Nous touchons ici à ce qui nous paraît être le vrai sujet du Misanthrope, à savoir le conflit de la vertu et du monde.
Le suicide, qui tient tant de place dans nos romans et nos drames, paraissait à Molière une folie et un crime tel, qu’il ne le jugeait pas digne de faire un ressort de la comédie : il n’en parlait que pour rire. […] 1653. — Celte pièce, relativement saine au point de vue du bon sens, paraissait à l’époque de la grande mode des suicides d’amour, nécessaires dans tous les romans, et multipliés dans Mélite de P.
Au moment où ce grand homme parut, trois genres d’ouvrages dramatiques défrayaient le théâtre : la tragédie, imitée des anciens ; la tragi-comédie, imitée des Espagnols ; la farce, imitée de l’italien. […] Quand la toile se lève, il est sur le point de l’épouser : son plan a réussi ; la fille lui paraît mûre pour lui ; il triomphe ; et comme il ne serait pas content d’avoir raison si quelqu’un n’avait tort, Molière le montre, dans la première scène, accablant Ariste son frère, qui a élevé Léonor avec indulgence, de la supériorité de son système d’éducation. […] Il n’y a rien de plus finement observé que ses colères contre sa fille Armande, le bel esprit, sur le dos de laquelle il battrait volontiers sa femme, s’il n’était si bon homme ; sa résolution de résister à Philaminte, quand elle est loin ; son attitude décidée, en la voyant paraître ; sa première charge, pleine de vigueur ; le secours qu’il tire d’abord de son bon sens, et cette révolte involontaire d’un esprit droit contre un esprit faux ; puis, à mesure que Philaminte élève la voix, sa fermeté tombant, son caractère retirant peu à peu ce que son bon sens a avancé, et le mari cédant avec la persuasion qu’il ne fait que transiger. […] Nul doute que Molière n’ait été sifflé26, quoique les mémoires n’en disent rien, soit par respect pour leur temps, soit que la chose n’ait pas paru digne de mention.
Il ne suffit pas de n’avoir point l’esprit stérile pour prendre l’action à son dernier point, & remplir cinq actes avec une matiere qui paroît à peine suffisante pour un, il faut avoir les plus grandes ressources dans l’imagination.
Argentine, sœur du geolier, paroît ; il lui persuade qu’il est l’intendant du Monsieur qu’on a arrêté dans la matinée.
La France ne paraît pas avoir rien inspiré, rien suggéré alors à l’Italie.
Odry ; mais s’il paraît en cette solennelle compagnie, il faut que M. […] et plus le parterre répond : — Qu’il paraisse ! […] Aussitôt paraissent les nuées qui forment le chœur de la comédie. […] En ceci, la malade imaginaire nous paraît plus logique et plus sincère que le malade imaginaire. — Ce digne M. […] Il paraît qu’Araminte a remplacé, par un laquais ad hoc, sa femme de chambre, son messager naturel.
Il ne borne pas là sa vengeance ; il déchire la donation qu’il a faite à son neveu en faveur de son mariage avec la fille du Malade imaginaire, & ne veut plus avoir aucune liaison avec lui : de sorte que le lavement, qui paroît d’abord n’être amené que pour faire rire, amene le dénouement ; puisque Cléante n’auroit certainement pas obtenu Angélique, si Purgon, en déchirant la donation, & en rompant avec Argan, n’eût en même temps rompu le mariage projetté entre Angélique & Thomas Diafoirus.
Cette maniere honnête de mettre le public à contribution, & de le forcer à applaudir, me paroît bien dangereuse ; il fait rarement de bonne grace ce qu’on lui demande : d’ailleurs comment ne pas trembler aux premieres représentations ?
Je dois faire remarquer qu’il y a un grand défaut dans la piece que je viens de citer, & que ce défaut est très ordinaire aux pieces dans lesquelles un seul intrigant paroît sous plusieurs travestissements.
Au bout de quelques années Puccio mourut ; mais alors les comédiens le remplacèrent par un compagnon qui parut avec le même costume et le même masque.
Un acteur qui eut un grand succès dans les rôles naïfs, sous le nom de Bertolino, et qui jouit de la faveur particulière de Victor-Amédée Ier, duc de Savoie, il signor Nicolo Zeccha, fit partie de la troupe des Fedeli ; il paraît y avoir remplacé le Pedrolino de la troupe des Gelosi, avec une nuance un peu différente du caractère.
Soit qu’elle voulut éveiller les passions du jeune roi, soit qu’elle voulût satisfaire son propre penchant, et peut-être faciliter son commerce avec Mazarin, qui, dans les règles d’une bienséance sévère, aurait pu paraître trop intime, elle autorisa dans les bals de la cour une liberté dont s’étonnaient les personnes habituées au sérieux et au cérémonial rigide qui avaient régné à la cour de Louis XIII.
Il y a des points plus délicats, où la morale paraît moins intéressée, et où elle l’est pourtant. […] C’est là que Molière me paraît vraiment un moraliste j c’est là qu’il enseigne avec une délicatesse supérieure en quoi consiste le parfait honnête homme, et qu’il distingue avec une finesse sans égale ce qui est bon et ce qui est inférieur dans une âme aussi élevée et aussi peu accessible au mal que celle du Misanthrope.
Mais ce qui paraît aujourd’hui le plus étonnant dans la pièce, c’est la scène vi du 2e acte, où Arnolphe, informé des visites que le jeune amant a faites à Agnès pendant son absence, veut savoir les particularités de leurs entretiens.
Une Reine illustre par toutes les graces de son sexe, & toutes les qualités qui caractérisent les plus grands Rois, fit former il y a quelques années à Paris une troupe de comédiens dignes de paroître à sa cour ; mais elle y attira en même temps une personne capable d’élaguer toutes les indécences dont nos comiques fourmillent, & de les mettre en état de paroître devant de jeunes Princesses encore plus respectables par leurs vertus que par leur rang.
Parmi les historiens des choses du théâtre, il y en a qui sont des fanatiques, ceux-là veulent tout voir et tout savoir ; ils courent après l’anecdote, et même ils recherchent la plus intime ; ils s’inquiètent de la couleur d’un manteau, de la façon d’un pourpoint ; ils fréquentent le carrefour, la coulisse et le foyer du théâtre ; ils en savent les passions et les vices, ils en savent l’argot… Nous ne sommes pas de ces fanatiques, et cela nous paraîtrait malséant de descendre à ces détails de nouvelles à la main. […] Telle chose était grande alors, qui vous paraît si petite aujourd’hui ! […] C’est cette même voix qui aujourd’hui encore, en songeant à cet accent plein, sonore et d’un si beau timbre, vous fait paraître plus charmants les plus beaux vers de Molière. […] Passions d’une heure, elles ont besoin, pour paraître dans tout leur éclat, d’un demi-jour ; elles ne peuvent pas être trop parées, elles n’usent jamais assez de velours, assez de dentelles ; elles ne mettront jamais trop de mouches à leur joli visage, trop de poudre parfumée à leurs beaux cheveux, elles ne sont jamais mieux assises et plus à l’aise, que sur ces riches sofas qui parlent, comme on en voit dans les petits livres du petit Crébillon.
Les études comme celle que nous terminons ont l’avantage de nous apprendre à n’être point trop injustes pour les temps qui, au premier coup d’œil, paraissent stériles ; on découvre, grâce à elles, qu’ils ont eu aussi leur travail et leur fécondité.
Dans le Baron d’Albicrac, le personnage annoncé ne se montre jamais : on charge seulement, vers la fin de la comédie, un valet de paroître sous son nom, pour dénouer la piece ; aussi est-elle aussi mal dénouée que mal intitulée.
Vers 1615, Armand Duplessis, âgé de vingt ans, qui avait déjà paru aux états-généraux de 1614 avec distinction, fut aussi introduit à l’hôtel de Rambouillet : il y soutint, dit-on, une thèse d’amour, c’est-à-dire, sans doute, qu’il y exprima une opinion contestée et la défendit en homme du monde.
« Quand la débauche et le dévergondage sont poussés à un certain point de scandale, je suis persuadée, dit madame de Sévigné, que cet excès fait plus de tort aux hommes qu’aux femmes. » Elle s’exprime ainsi à l’occasion d’un marquis de Thermes qui l’avait fort assidûment visitée aux eaux de Vichy et qui n’osa la revoir à Paris, étant là sous le joug de la maréchale de Castelnau, sa jalouse maitresse, qui avait si bien renoncé aux bienséances, que, malgré son veuvage, elle ne prenait pas la peine de cacher ses grossesses… Mais laissons Thermes sous sa férule, » dit-elle en finissant ; « il y aurait encore bien des choses à dire d’une autre vieille férule qui ne fait que trop paraître sa furie ».