À quoi servirait-il de remarquer que Molière a plus ou moins souvent enfreint les règles du langage, si par là on ne voulait empêcher le lecteur de les enfreindre à son tour ? […] Horace, un des plus fins railleurs de l’antiquité, n’en fait aucun cas ; mais, en revanche, s’il ne loue pas la gaieté de Térence, il vante infiniment la vérité frappante de ses caractères et le naturel exquis de son langage. […] Sous des noms différents, quelquefois sous le même nom, le même personnage, ayant la même humeur et le même langage, participait à des intrigues différentes. […] Il étudiait l’humeur, l’esprit, le langage, le geste des hommes de tonte condition, qui venaient, pour ainsi dire, passer en revue devant lui. […] Je me garderai bien de figurer l’orthographe surannée et vicieuse de cette pièce : on ne prend un tel soin que pour les écrits qui sont des monuments du langage.
Trois des plus grands auteurs du siècle de Louis XIV, Molière, La Fontaine, et Corneille, ne doivent être lus qu’avec précaution par rapport au langage. […] Il y a très peu de défauts contre la langue, parce que lorsqu’on écrit en prose, on est bien plus maître de son style ; et parce que Molière ayant à critiquer le langage des beaux esprits du temps, châtia le sien davantage. […] Le style du Cocu imaginaire l’emporte beaucoup sur celui de ses premières pièces en vers ; on y trouve bien moins de fautes de langage. […] Mais la folie du bourgeois est la seule qui soit comique, et qui puisse faire rire au théâtre : ce sont les extrêmes disproportions des manières et du langage d’un homme, avec les airs et les discours qu’il veut affecter, qui font un ridicule plaisant ; cette espèce de ridicule ne se trouve point dans des princes ou dans des hommes élevés à la cour, qui couvrent toutes leurs sottises du même air et du même langage ; mais ce ridicule se montre tout entier dans un bourgeois élevé grossièrement, et dont le naturel fait à tout moment un contraste avec l’art dont il veut se parer. […] L’oreille est aussi plus flattée de l’harmonie des beaux vers tragiques, et de la magie étonnante du style de Racine, qu’elle ne peut l’être du langage propre à la comédie ; ce langage peut plaire, mais il ne peut jamais émouvoir, et l’on ne vient au spectacle que pour être ému.
Et d’abord, quand on a lu Le Misanthrope, Tartuffe et Les Femmes savantes, on a peine à comprendre les critiques que Fénelon et La Bruyère ont faites du style de Molière, et on ne se les explique qu’en les rapportant à ses premiers essais ou, dans les œuvres de son âge mûr, au langage populaire qu’il a dû mettre, pour être vrai, dans la bouche de quelques vauriens de bas étage. […] Si l’on y regarde de près, ou verra que l’invention dans le langage n’a jamais été portée plus loin ; le mot abstrait ne parait pas, la métaphore y supplée de manière à parler aux sens. […] Outre le naturel du langage et de la pensée, qui ne l’abandonne jamais, il a comme moyen de souplesse les ressources d’une versification qui, par les variétés de la mesure et du rythme, suit sans effort tous les mouvements de l’âme. […] Il vaut mieux montrer ici, par quelques traits choisis, à quelle noblesse s’élèvent, par intervalle, la pensée et le langage de La Fontaine.
R. madame la Dauphine ; en vivant on s’appelle M. de Lacretelle, et dans la guerre civile on parle aux habitants des campagnes, le sincère et tout-puissant langage de la raison. […] Cet art tout féminin de cacher sa pensée sous la perfection du langage, Marivaux l’a possédé, à ce point qu’il pourrait en remontrer aux femmes les plus habiles. […] La langue qu’il parle est si retenue en ses plus vifs emportements, elle a quelque chose de si réservé, même quand elle ose le plus, elle est si bien le langage de la meilleure compagnie, même quand elle passe par la bouche de Frontin ou de Lisette, qu’il est impossible, aux femmes les plus sévères, de ne pas écouter, malgré elles, et même assez volontiers, ces beaux discours fleuris, à rencontre des choses du cœur, ces folles dissertations d’amour, cette éloquence enivrante qui appartient beaucoup plus aux sens et à l’esprit qu’elle ne vient de l’âme. […] Cependant vous demandez pourquoi donc ce langage à part, cette langue de Marivaux qui est si loin d’être le langage de la nature, et pourquoi donc cette comédie exceptionnelle, qui est si loin d’être la comédie de tout le monde, comme l’entendait, comme la faisait Molière, ont-ils trouvé grâce et faveur parmi les partisans les plus dévoués de Molière lui-même ? […] C’en était fait des plus vifs plaisirs du théâtre pour les hommes qui aimaient, d’une foi sincère, le beau langage, les nobles traditions, les vivants souvenirs.
Or l’exactitude et la justesse sont la passion, l’instinct, le besoin de Molière : il est juste et exact avant tout, surtout dans le langage qu’il prête aux personnages qu’il crée. […] Il attrape de même dans Le Misanthrope le langage de la société la plus polie, comme, dans les scènes de paysans, le langage des paysans les plus mal façonnés. […] Ainsi, la justesse du langage est complète ; et Molière y a d’autant plus de mérite, c’est d’autant plus un fait de génie, que le langage que lui a donné la nature, et que son temps lui donne aussi, n’est pas encore bien débrouillé ni assoupli. […] Il n’a jamais écrit de morceau plus joli, c’est le plus achevé de tous, le plus digne d’être mis, comme facilité de langage poétique, à côté des plus jolis morceaux de Regnard. […] N’accusons pas le langage léger qu’affecte l’esprit.
Qu’est-ce donc en langage vulgaire ? […] Il est toujours bien temps d’embrasser ce parti, Lorsque de la beauté l’éclat est amorti ; Vous n’en êtes point-là ; non, croyez-en Molière, Reprenez votre humeur, vous pourrez longtemps plaire Et par le naturel et par la vérité ; Laissez là ce maintien, ce langage affecté ; Laissez ce style faux dont le bon sens murmure, Car ce n’est pas ainsi que parle la nature.
Malgré tant de changements de langage, de mœurs et d’idées, il semble destiné à vivre toujours jeune parmi les Français, ainsi qu’Homère parmi les Grecs. […] Il ne nous suffit plus, comme aux premiers spectateurs de Molière, qu une comédie nous charme par la vérité des caractères, l’habileté de l’intrigue et l’agrément du langage : nous voulons savoir quel esprit secret l’anime, quel but invisible aux yeux vulgaires s’est proposé l’auteur, au nom de quels principes latents il a fait parler et agir les personnages qui s’agitent devant nous. […] Mais supposé, comme il est vrai, que les exercices de la piété souffrent des intervalles, et que les hommes aient besoin de divertissement, je soutiens qu’on ne leur en peut trouver un qui soit plus innocent que la comédie11. » Innocent, c’est trop dire : mais est-ce là le langage d’un homme qui veut enseigner la morale ?
Mais il est peu probable qu’il ait employé ce moyen pour insulter à la personne même de quatre médecins en crédit, dont il tournait en ridicule la doctrine et le langage. […] L’ouvrage serait achevé peut-être, si l’auteur, n’empruntant pas les noms des personnages du Misanthrope, avait emprunté les formes nobles et régulières de leur langage. […] L’action ne reçoit de leur manière de juger ou de sentir, aucune impulsion ; et leur langage est simplement déterminé par l’action même. […] Des bergers, ayant les inclinations, les mœurs et le langage des gens du grand monde, sont des personnages qui n’ont ni réalité ni vraisemblance, des personnages que la nature n’offre pas et que l’art doit s’abstenir de créer.
[54232, p. 88] 1742, Bolaeana, p. 150 Despréaux* n’approuvait pas le jargon que Molière mettait dans la bouche de ses paysans et de quelques autres de ses personnages. « Vous ne voyez pas, disait-il, que Plaute*, ni ses confrères, aient estropié la langue en faisant parler des villageois ; ils leur font tenir des discours proportionnés à leur état, sans qu’il en coûte rien à la pureté du langage.
La pièce des Femmes savantes, jouée pour la première fois, en 1672, est une dernière malice de Molière, à double fin : d’abord pour se défendre de la réprobation de quelques mots de son langage et de quelques erreurs de sa morale ; ensuite pour servir les amours du roi et de madame de Montespan, qui blessaient tous les gens de bien et dont la mort récente de madame de Montausier était une éclatante condamnation. […] Il les rétablit aussi dans l’horreur convulsive du mauvais langage, et surtout des expressions qui se rapportent à l’amour vulgaire et grossier ; il leur fait un supplice du barbare amas De mots estropiés cousus par intervalle De proverbes traînés dans tes ruisseaux des halles.
Chez certains peuples d’un caractère sombre et réservé, l’action proprement dite est le langage par excellence de la passion. […] Cette forme même, que le langage de la passion se plaît à affecter dans sa bouche, n’est qu’un nouveau trait de caractère d’un effet heureux et d’une grande justesse. […] La correction du style résulte de la fidélité aux lois du langage; la justesse de l’accord du style avec la pensée. […] Dans Racine, tous les héros ont le même langage, le langage idéalisé d’une société d’élite; dans Molière, l’homme du monde parle en homme du monde, et le paysan s’exprime en patois. […] Elle a dans le langage je ne sais quelle teinte de bel esprit qui double les périls de sa situation.
et quelle naïveté de langage unie à la plus grande force de raison! […] Il est vrai que Rousseau n’en donne pas la moindre preuve, et qu’il ne cite rien à l’appui de son accusation : c’est que le langage de Philinte est effectivement celui d’un honnête homme qui hait le vice, mais qui se croit obligé de supporter les vicieux, parce que, ne pouvant les corriger, il serait insensé de s’en rendre très inutilement la victime. […] Je vis de bonne soupe, et non de beau langage. […] Un honnête homme faussement accusé ne tiendrait jamais ce langage; mais aussi Orgon n’est pas un homme qui connaisse le langage de la vertu et de la probité. […] Ce langage à comprendre est assez difficile, Madame, et vous parliez tantôt d’un autre style.
Le rire est leur domaine ; ils s’emparent triomphalement de la correction des mœurs ; ils sont, tout à la fois, des sages et des écrivains ; ils inventent leur comédie, ils inventent leur langage, et ce fut la plus juste admiration du dix-septième siècle, de trouver que Molière était un poète à côté de Racine, e non loin de Despréaux, un prosateur comparable à Pascal. […] S’il n’avait pas trouvé toute sa comédie, il en possédait le langage. […] Quand Molière traduisit à sa barre ce fameux hôtel de Rambouillet qui avait exercé, dans le langage et dans les mœurs de cette nation, son autorité souveraine, l’hôtel de Rambouillet était encore en sa toute-puissance, et les délicats des deux sexes, honorés à la ville, écoutés à la cour, étaient restés les rois de la mode. […] On n’a jamais vu, que je sache, en un même esprit, tant de variété féconde ; un langage digne de Versailles, un patois digne des halles.
Les Romains cependant reconnurent mal ses soins, & blâmerent son affectation à ne parler que le langage des Grands. […] Toutes les nations se sont imposé la loi des Anciens : les Anglois, les Allemands sont simples dans leur diction : les Italiens, les Espagnols même ne se sont pas oubliés, & n’ont parlé le langage des romans dans la comédie, que dans les descriptions d’un bois, d’un palais, d’un jardin. […] Nos premiers peres ont fait parler le langage le plus populaire à Dieu, aux Saints, & ont été applaudis.
On ne voulut pas sentir que, dans un-genre de drame destiné à peindre la vie commune, le langage mesuré ne pouvant être une condition essentielle et rigoureuse, puisqu’il établit nécessairement une différence entre l’image et le modèle, il est seulement l’objet d’une espèce de convention ou, si l’on veut, de concession aux avantages de laquelle l’artiste peut renoncer, s’il les remplace par des avantages équivalents ; que, d’ailleurs, le vers, dans nos comédies, n’est autre chose qu’une imitation de l’usage antique, et que toutefois notre vers alexandrin, le même qui sert pour l’épopée et pour la tragédie, est beaucoup moins propre à exprimer la liberté des entretiens familiers, que le système métrique des comiques grecs et latins, système large et presque irrégulier qui leur permettait d’employer des vers de toute espèce et de toute mesure, dont la structure est encore aujourd’hui un sujet de dissentiment parmi les érudits. […] Les nobles d’illustrations les grands seigneurs de la cour ne pouvant briller que d’une lumière réfléchie dans cette atmosphère éblouissante qui environnait le monarque, et pouvant encore moins exercer le despotisme du privilège sous les regards d’un prince, aux yeux de qui tous ses sujets étaient égaux, comme tous les hommes le sont aux yeux de Dieu, avaient cherché à se créer dans la société un autre genre de prérogative, celle de l’élégance des mœurs et des manières, du ton et du langage : noblement familiers avec leurs supérieurs, ils n’étaient fiers qu’avec leurs égaux, et ils étaient envers leurs inférieurs d’une politesse qui, par son excès même, avait presque les effets de la hauteur. […] Il y a encore, au fond de quelques provinces, des Sotenville et des bons, des Sotenville en ligne directe : ils ne sont pas vêtus tout à fait comme leurs ancêtres, ils ont un langage et des manières un peu différentes ; mais les qualités héréditaires subsistent en eux, et l’air de famille est profondément empreint sur leur figure. […] Mais, cette fois, il change son plan d’attaque ; il ne va pas chercher dans leur doctrine ce qu’il y a de plus absurde, dans leur langage ce qu’il y a de plus ridicule, pour le rendre plus ridicule et plus absurde encore. […] « Molière, dit encore Voltaire, avait écrit son Avare en prose, pour le mettre ensuite en vers ; mais il parut si bon que les comédiens voulurent le jouer tel qu’il était ; et que personne n’osa depuis y toucher. » J’ignore où Voltaire a pris ce fait qu’il rapporte avec tant d’assurance ; et je ne vois rien dans L’Avare qui le confirme, si ce n’est un certain nombre de phrases plus ou moins éloignées de la simplicité du langage ordinaire, et où l’on pourrait croire que Molière cherchait d’avance à introduire quelques-unes des formes propres à la versification.
Mes yeux ont fort parlé : mais qui me peut apprendre Si leur langage enfin a pu se faire entendre ? […] Ce langage, il est vrai, peut être obscur par fois, S’il n’a pour truchement l’écriture ou la voix.
Églé et l’Amoureux de quinze ans sont deux tableaux d’un dessin pur et gracieux ; et cependant, lorsque l’auteur se livre à des compositions dramatiques, on voit que c’est encore la muse de la chanson qui l’inspire ; elle veut essayer un ton plus grave, des manières plus imposantes, mais elle se trahit à la naïveté de son langage, à la délicatesse de ses formes, et l’œil le moins clairvoyant reconnaît Érato sous le masque de Thalie. […] Le temps où parut Le Misanthrope était, à coup sûr, celui de la politesse et de l’élégance ; la cour où l’on s’exprimait avec cette pureté de langage était l’asile de l’esprit et des grâces ; le pays qui produisait de pareils chefs-d’œuvre était parvenu à un haut degré de gloire et de civilisation.
Bien plus, il la voulait jusque dans le langage parlé par l’amour, et il repoussait, autant par cœur que par goût, le style faux que l’on croyait alors le style obligé de la passion. […] Après avoir rappelé les amants à un langage naturel comme l’amour, il donna, mieux que tous les autres auteurs du siècle, l’exemple de cette langue douce et touchante qui va droit au cœur parce qu’elle en exprime les vrais sentiments. […] Le spectateur, fatigué de rire, s’y repose avec une émotion délicieuse ; et l’auteur sait quelquefois, par la simplicité du style et la vérité de la passion, faire parler à l’amour un langage digne de Corneille : CLITANDRE.
Tout y contribue, plan ridiculement construit, vers sans cadence et sans règles, langage devenu, presque inintelligible, ignorances et grossièretés sans nombre ; en un mot, tout ce qui peut rendre une lecture rebutante se trouve rassemblé dans ces pièces. »Vous avez là, Messieurs, une définition exacte de notre vieux théâtre et de toutes les soi-disant pièces dramatiques qui l’ont précédé. […] Pendant que Marie faisait ses oraisons et s’occupait dévotement à lire la prophétie d’Isaïe, plusieurs démons, envoyés par Lucifer, « issirent » de la gueule infernale, pour venir observer celle qui menaçait leur empire ; et d’un autre côté, l’ange Gabriel redescendit de son empyrée, pour admirer la jeune Vierge en prière, à laquelle les démons eux-mêmes rendirent hommage : « Elle est, dirent-ils, plus belle que Lucrèce, plus [p.17] que Sara dévote et sage ; c’est une Judith en courage, une Esther en humilité, et Rachel en honnêteté; en langage est aussi bénine que la Sibylle Tiburtine. » Après diverses autres scènes, qu’il serait trop long de rapporter, on assista aux « épousailles » de Marie et de Joseph : Suave et odorante rose (dit celui-ci) Je sais bien que je suis indigne D’épouser vierge tant bénigne. […] Sans doute, le langage littéraire est alors fort imparfait; car notre idiome, au sortir des dialectes provinciaux, se dégage avec peine de ses langes; mais si, par ce côté, notre ancien théâtre s’est rendu à jamais illisible, que de beautés éparses pourtant dans ce fatras obscur et que d’éclairs dans cette nuit! […] Je suis créature et pauvre facture, De simple stature, humble viateur ; Ce serait laidure et chose trop dure Laver en eau pure mon haut créateur. » Vous voyez, Messieurs, même en ces passages choisis, percer cette infirmité de langage, que des retouches successives n’ont pu faire disparaître, et qui est le côté faible de ces anciennes oeuvres dramatiques.
Toute profession très absorbante, — et aucune plus que celle-là ne prend son homme tout entier, — imprime une marque spéciale aux idées et au langage ; quelle que soit l’originalité de caractère que la nature ait donnée à un comédien, il sent et pense, voit et parle d’une manière qui lui est plus ou moins commune avec tous ceux qui montent sur les planches. […] Mais si un comédien pense et écrit de façon spéciale, encore plus une comédienne, qui joint au tour d’esprit et de langage particuliers à sa profession celui qu’elle doit à son sexe. […] Courier que « la moindre femmelette de ce temps-là vaut mieux pour le langage que les Jean-Jacques et les Diderot. » Quant au fond, les inventions haineuses dominent, mais tout n’est pas à rejeter. […] Or, le langage qu’il tient dans la scène d’Auteuil est celui d’un fort vilain égoïste ; .jamais confident ne joua son rôle de façon plus piteuse. […] Devenu l’ami de Molière, il offrit à sa jeune femme une admiration platonique, et il paraît bien qu’il exprimait ses propres sentimens pour Mlle Molière lorsque, dans Psyché, il faisait parler à l’Amour le langage délicieusement précieux qui est dans toutes les mémoires.
Est-ce l’Olympe vertueuse ou l’Olympe débauchée qui tient un pareil langage ? […] Je suis Français et chrétien. » Son attitude en présence de Louis XIV ne démentit point ce noble langage. […] Très bien ; c’est juste le langage de Bourdaloue. […] Cléante, qui les rassemble et qui parle comme l’un et l’autre, n’aboutit qu’à discourir ; Molière, le Molière historique qui se taillait complaisamment cette casaque de vertu sans pouvoir parvenir à se l’ajuster, tient le langage d’Alceste, tient le langage de Philinte, tient le langage de Cléante, mais il mène la vie de Sganarelle et de Tartuffe. […] Non, pas encore ; ce langage allait devenir le tonde la cour, et Molière ne servait pas médiocrement à l’accréditer.
Il n’a jamais cessé, même lorsqu’il a parlé le plus haut langage, de réjouir la foule qu’il convoque et qui grossit sans cesse.
Le scrupule grammatical, qui gêne le développement des autres branches de la poésie française, convient parfaitement à la comédie ; là du moins la versification n’a pas besoin de s’écarter du langage habituel ; ce qu’on lui demande n’est pas de donner au dialogue plus d’élan et de dignité, de l’élever au-dessus de la vie réelle, c’est seulement de le rendre plus vif et plus élégant. […] Né et élevé dans une classe inférieure, Molière eut l’avantage de connaître la vie bourgeoise par sa propre expérience, et il sut très habilement imiter le langage et les habitudes des gens du peuple. […] Quand une fois on s’est représenté, au lieu de personnages réels, des créatures sans autre langage que le chant, on est bien près de se figurer des êtres sans autre but que l’amour, sentiment qui plane sur les confins de la région des sens et de celle de l’âme. […] Ce passage immédiat du chant à la parole, que Rousseau blâme, comme un mélange hétérogène de deux langages trop divers, peut déplaire à l’oreille, mais on ne saurait nier qu’il ne soit avantageux à la structure de la pièce. […] C’est une comédie historique où le mendiant et le roi parlent chacun le langage de son état.
Despreaux changea de langage après la mort de ce grand Comique ; il l’avoit loué vivant, il le blâma mort si l’on en veut croire certains Censeurs ignorans. […] Au reste, il n’y a point de meilleure forge de nouveaux mots que la Comédie ; car si elle produit quelque nouveauté de langage qui soit bien reçue, une infinité de gens s’en emparent tout à la fois, & la répandent bientôt au long & au large par de fréquentes répétitions. […] C’est le langage perpétuel de ceux qui critiquent ce Dictionaire : mais ils me permettront de leur dire, qu’ils ont négligé de se pourvoir de la chose qui leur étoit la plus nécessaire pour bien juger de cet Ouvrage.
La franchise de son langage, la simplicité de ses manières dans la première moitié de la pièce la mettent à l’abri de tout reproche. […] Il faut pourtant parler : ou le mari de Philaminte ne signifie rien, ou il signifie qu’un père de famille ne peut voir sans dépit sa femme oublier l’éducation de ses enfants pour traiter les questions du beau langage et suivre le cours des planètes. […] Il y a dans leur langage un terme qui explique très bien leurs prétentions, et qu’il serait bon de définir.
Il veut avoir les manières d’un gentilhomme, le langage d’un gentilhomme, le faste d’un gentilhomme, les galanteries d’un gentilhomme et tous les ridicules d’un gentilhomme. […] Il n’y a rien contre le mariage même dans le langage d’Angélique, il y a la revendication d’indépendance d’une femme qui a été épousée contre sa volonté et qui, par conséquent, ne s’est engagée à rien. […] Je tiens pour absolument impossible à un homme de ne pas parler un peu, dans toutes les circonstances de sa vie, le langage de sa profession. […] L’Henriette des Femmes savantes est toute semblable avec un peu plus de causticité et un peu plus de liberté de pensée et de langage. […] Elle sera une Madame Jourdain parlant un langage correct et dont les mots d’esprit courront dans Paris, et c’est-à-dire qu’elle sera une Madame Cornuel.