Ce sont deux systèmes d’éducation également absurdes ; ils ont également pour résultat de tromper les vues de l’instituteur, puisqu’ils le rendent odieux à son élève, et précipitent celui-ci dans les écarts mêmes qu’on veut lui faire éviter ; ici, en excitant, par la privation, son ardeur naturelle pour le plaisir ; là, en le mettant à la merci de tous les dangers, faute de lui en faire connaître aucun. […] On a oublié depuis longtemps La Critique du Légataire, par Regnard ; La Critique du Philosophe marié, par Destouches ; Le Procès de la Femme juge et partie, par Montfleury ; on lira toujours avec plaisir La Critique de l’École des femmes, monument ingénieux d’une juste vengeance, image piquante et vraie d’une conversation où la raison et la folie, l’esprit et la sottise, l’instruction polie et le savoir pédantesque, semblent étaler à l’envie leurs grâces et leurs ridicules, et se faire mutuellement valoir par le contraste. […] La bouffonnerie entrait dans le plan de Molière, qui voulait amuser une jeune cour dans cette saison de l’année où le plaisir ressemble à la folie ; et ce n’est sûrement pas de la bouffonnerie sans agrément, que la scène où Sganarelle fait sortir, à coups de bâton, Marphurius de son scepticisme obstiné, le force à reconnaître une certitude, celle de la douleur, et, changeant avec lui de rôle, lui conseille à son tour de substituer le langage du doute à celui de l’affirmation : cette revanche si comique n’appartient pas à Rabelais, et Molière ici, comme à son ordinaire, s’approprie ce qu’il emprunte, en le perfectionnant.
Voilà comme dans les pieces mixtes de la seconde espece, l’intrigant & le caractere doivent se combattre, mais avec des armes qui ne leur soient pas étrangeres, qui les fassent briller tour-à-tour, & qui, en balançant quelque temps la victoire, augmentent la gloire de celui qui triomphe & le plaisir du spectateur.
Il fut reçu avec applaudissement quelques jours après sur le théâtre de Saint-Germain, & Paris le vit avec le plus grand plaisir sur celui du Palais Royal, où il fut représenté le 29 Novembre de la même année.
Le roi parut prendre tant de plaisir à cette entrée, que Dominique la fit durer le plus longtemps qu’il lui fut possible, et il s’y échauffa tellement, que, n’ayant pu changer de linge au sortir du théâtre (parce qu’il lui fallut exécuter son rôle tout de suite), il lui survint un gros rhume qui se tourna en fluxion de poitrine.
Quand Goethe déclare que « Klopstock n’avait aucun goût, aucune disposition pour voir, saisir le monde sensible, et dessiner les caractères », quand il trouve ridicule cette ode où le poète suppose une course entre la Muse allemande et la Muse britannique, quand il ne peut supporter « l’image qu’offrent ces deux jeunes filles courant à l’envie à toutes jambes et les pieds dans la poussière » : à ce moment-là Goethe est moins content, moins heureux, il jouit moins du plaisir de vivre, du bonheur de sentir que madame de Staël, qui traduit avec enthousiasme cette même ode, et déclare fort heureux tout ce que Goethe trouve ridicule.
Isabelle dit qu’elle va donc ordonner à sa sœur de se retirer, & elle sort elle-même avec un voile sur la tête ; de sorte que Sganarelle, la prenant pour Léonore, la voit aller avec plaisir vers la maison du galant.
La curiosité qu’on fait lors éclater, Marque un secret plaisir de s’en ouir conter : Et je trouve à propos que, toute cachetée, Cette lettre lui soit promptement reportée, Afin que d’autant mieux il connoisse aujourd’hui Le mépris éclatant que mon cœur fait de lui ; Que ses feux désormais perdent toute espérance, Et n’entreprennent plus pareille extravagance.
Goldoni l’idée de faire son Bourru bienfaisant : en tout cas c’est un prêté pour un rendu, & il y a grand plaisir à voir commercer ainsi les grands hommes.
Le contemplateur Molière, qui avait été témoin de la scène, en conçut l’idée de cette ingénieuse farce, qui eut le plus grand succès, et qu’on voit encore tous les jours avec le plaisir le plus vif. » 133.
Le grand Alcandre, pour avoir le plaisir de voir madame de Montespan, allait plus souvent chez madame de La Vallière, et madame de La Vallière, se faisant l’application de ces nouvelles assiduités, en aimais davantage encore madame de Montespan… Mais enfin… elle s’aperçut bientôt de la vérité… elle se plaignit au grand Alexandre, qui lui dit qu’il était de trop bonne foi pour l’abuser davantage ; qu’il aimait madame de Montespan ; mais que cela n’empêchait pas qu’il ne l’aimait comme il devait, et qu’elle devait se contenter de ce qu’il faisait pour elle… Nouveaux pleurs, nouvelles plaintes… Mais le grand Alcandre n’en étant pas plus attendri, lui dit une seconde fois que si elle voulait qu’il continuât de l’aimer, elle ne devait rien exiger de lui au-delà de sa volonté ; qu’il désirait qu’elle vécût avec madame de Montespan comme par le passé, et que si elle témoignait la moindre chose de désobligeant à cette dame, elle l’obligerait à prendre des mesures.
Louis XIV, accoutumé par son éducation et par la flatterie universelle à tout rapporter à sa personne, et d’autant plus avide de divertissement qu’il s’était condamné à plus d’ennui par la sévérité de son étiquette, mettait son plaisir au-dessus de beaucoup de choses, accordait de grands privilèges à ceux qui étaient chargés de le récréer, et considérait quelquefois trop peu les intérêts qui se trouvaient en opposition avec ceux de son amusement. […] Le Roi, qui voulait marquer cette saison des plaisirs et de la folie par un des plus magnifiques amusements qu’il eût encore donnés à sa cour, demanda à Molière une pièce dont le genre permît de mettre en jeu toutes les merveilles de la mécanique du temps, nouvellement rassemblées dans la salle de spectacle du palais des Tuileries.
J’ai vu, je ne sais plus où, qu’une grande coquette du théâtre de Louis XIV, Mmede Montespan, s’était montrée très souriante à Molière pendant les Fêtes de Versailles, mais je ne crois pas qu’il eut sa part des plaisirs de l’Île enchantée. […] Cependant Molière ne poivrait pas rester à Rouen pour le bon plaisir de Pierre Corneille. […] Aussi Molière trouvait-il un vif plaisir dans la compagnie de ce « diable à quatre », selon le mot de Regnard. […] Et n’est-ce pas assez de souffrir pour vos charmes, Sans me faire souffrir encor pour vos plaisirs ? […] Mlle Du Parc variait ses plaisirs.
Plus ils auront de mérite, plus ils se feront un plaisir de nous communiquer leurs lumieres.
Je dois rendre justice aux Comédiens François, & je le fais avec bien du plaisir.
Il demande ensuite quelques éventails communs, des rubans unis pour sa femme, & les plus beaux bijoux pour une Actrice de l’Opéra qu’il entretient ; ce qui fait dire au Chevalier : Du monde perverti tel est le caractere : L’intérêt & l’orgueil prodiguent les écus, Les plaisirs effrénés répandent encor plus ; Mais l’amitié ne donne guere.
Saurin a sacrifié son succès au plaisir de faire par sa modestie la critique de presque tous ses confreres.
qui pourrait croire que cela se passe ainsi dans la France policée, en plein Théâtre-Français, qui pourrait croire qu’une femme pareille, à qui nous devions tant de reconnaissance pour tant de belles heures du plus calme et du plus honnête plaisir qui soit au monde, serait exposée à des lâchetés de cette force ?
Les valets imaginent de dire que ce sont des gens sortant du théâtre qui les ont dévalisés, et ils ajoutent philosophiquement que, si les comédies apportent de la distraction et du plaisir, elles sont aussi l’occasion de nombreux scandales.
Don Juan met l’épée à la main ; Arlequin se couche à terre sur le dos, tient sa flamberge pointe en l’air, de manière que son adversaire la rencontre toujours en ferraillant ; ce jeu de théâtre bien exécuté faisait le plus grand plaisir.
Monsieur Lysidas, appelez les choses par leur nom et, sur ce terrain, je ne vous redoute guère. » Molière n’a pas obéi aux préceptes d’Aristote et d’Horace par aveugle respect de la tradition, mais il s’est trouvé en fait amené à les suivre parce que ces règles, « dont vous embarrassez les ignorants, ne sont que quelques observations aisées que le bon sens a faites sur ce qui peut ôter Je plaisir que l’on prend à ces sortes de poèmes » ; Molière ne condamne donc pas les règles, mais ne veut point qu’on les entoure de mystère et de vénération ; et là, comme en toute autre matière, il ne se paye point de mots… La nature et l’honneur féminin Les idées de Molière sur l’honneur féminin, la liberté qu’il sied de laisser aux jeunes filles et aux épouses durent sembler de son temps étrangement hardies. […] Qu’Elmire, cessant de penser, de vouloir par elle-même, d’obéir à son honnête naturel, laisse se substituer à sa propre conscience celle du directeur : elle tombera bientôt dans l’adultère, avec cette consolation, il est vrai, d’être la maîtresse d’un homme d’une dévotion extrême, qui s’est chargé de son plaisir en même temps que de son salut.
Alors, dans une heure de profonde mélancolie, en face d’une bonne action, comme s’il eût douté du bien même, il a dit avec étonnement : « Où la vertu va-t-elle se nicher » — Il a répété avec Hamlet : « Non, l’homme ne me fait pas plaisir à voir. » Bien plus : un jour il a vu avec douleur toute l’insuffisance de la morale qu’il avait jusque-là prêchée et pratiquée, de cette morale Qui prend tout doucement les hommes comme ils sont. […] Il devait nous apprendre que « Gassendi n’a jamais été matérialiste ni épicurien que pour ceux qui ne l’ont pas la sérieusement » (p. 17). — Heureusement, ce reproche de légèreté atteignait tant de critiques que le plaisir de nous trouver en si nombreuse et si bonne compagnie aurait pu suffire à lui seul pour nous consoler de notre mésaventure.
» ou le couplet supprimé de Léandre au début du troisième acte : « Le beau plaisir d’aller, tout mourant de sommeil, À la porte d’un juge attendre son réveil » ! […] Je ne crois pas que pour un Hollandais quelque peu lettré, qui vient passer quelques semaines à Paris, il y ait beaucoup de plaisirs plus grands que celui de voir jouer du Molière au Théâtre-Français. […] Et Valère, sans se déconcerter, poursuit : — Avouons que Paris nous fait part De cent plaisirs charmants qu’on n’a point autre part. […] Seulement, elle se rencontra à l’imprévu avec une de ces préoccupations publiques, avec un de ces grands actes de la religion devant lesquels se désavoue — se désavouait lui-même le plaisir du théâtre. […] Le Roi, qui ne l’avait pas quittée pendant sa maladie, se permit, le 24, le plaisir de la chasse.
Il ne se formalisoit pas de deux de ses rivaux, par deux raisons : il savoit les us & coutumes des coulisses, il ne vouloit donner ni leçon ni carrosse ; le concurrent que le plaisir & le goût avoient mis sur les rangs, mortifioit seul sa vanité.
Ce n’est point par hasard que Mercure se trouve sur le passage de Sosie, & qu’il l’empêche d’entrer chez Alcmene : ce n’est point par hasard qu’Amphitrion se querelle avec sa femme : c’est encore moins par hasard que Jupiter veut goûter le plaisir de se raccommoder avec Alcmene, & que pendant les douceurs de la réconciliation Mercure empêche l’époux de troubler la fête : enfin, ce n’est nullement par hasard que le Souverain des Dieux vient, au bruit du tonnerre, avouer sa supercherie amoureuse, & dénouer la piece.
Pour en avoir le plaisir, il ne faut être que spectateur.