Louis se permettra de fréquentes distractions dans la vie conjugale, mais il repoussera les mœurs équivoques, les mœurs de rigidité affectée. […] Si quelque biographe imprimait aujourd’hui cette phrase dans une vie de Louis XIV : « Le 1er novembre 1661, le roi nomme pour gouvernante de M. le Dauphin, une des personnes de la société représentée par Molière, dans ses Précieuses ridicules, et bafouée par le public depuis deux ans », ne croirait-on pas que cet écrivain est tombé en imbécillité ou en démence ?
Doué d’une force prodigieuse de recueillement et de méditation, au milieu des agitations d’une vie nomade et de la direction d’une troupe d’acteurs plus difficile à régir qu’un empire, il sut unir l’activité et la contemplation ; il fit plus encore : il s’oublia lui-même, il se désintéressa de ce qu’il voyait si nettement, de ce qu’il comprenait si bien ; son âme sincère et compréhensive reçut fidèlement l’empreinte de l’humanité, et son puissant génie exprima ce que contenait son âme. […] Le vrai génie comique que Molière seul peut-être a possédé dans la perfection, c’est-à-dire le don de réaliser dans des types individuels les traits généraux de la nature humaine, est essentiellement impersonnel : il se détache de ce moi tyrannique, si difficile à soumettre, pour vivre de la vie d’autrui et pour la reproduire. […] Lié dès lors et comme enlacé à la vie de théâtre par ses goûts d’acteur, par ses succès d’auteur, et aussi, il faut bien l’avouer, par ses faiblesses d’homme, il comprit enfin que la tâche unique d’amuser ses contemporains était un rôle vulgaire, que la scène où il était monté devait être élevée et épurée, et qu’elle pouvait devenir une école pour réformer les travers de l’esprit et les vices du cœur, ou, tout au moins, pour les déconcerter par le ridicule. […] N’allons pas croire La Fontaine sur parole, lorsqu’il nous dit qu’il fit de sa vie deux parts, Dont il soûlait passer L’une à dormir et l’autre à ne rien faire. […] Le charme suprême de ces compositions, c’est la vie.
Il doit se dire : « Leur vie n’est pas ma règle. […] C’est comme œuvre de vie qu’elle est ; sortie de sa pensée, et non comme plaidoyer abstrait. […] … Apprenez de moi qui suis votre valet que le ciel punit tôt ou tard les impies, qu’une méchante vie amène une méchante mort et que… — Don Juan. […] Cela ne peut être accordé que si l’on entend par cour le modèle et la perfection de la vie mondaine. […] Nulle part l’art de vivre en société, l’art de causer, l’art de plaire, l’art de peindre, l’art d’analyser, l’art de penser en commun, l’art de raisonner sur la vie, sur les mœurs, sur le cœur humain, en un mot l’art de la vie mondaine n’a été poussé si loin.
Mais ce qui cause une véritable surprise, c’est d’apercevoir, dans un simple croquis, dans une esquisse légère, jusqu’à sept personnages divers, dont les figures ont entre elles autant de variété, que chacune d’elles, prise à part, a d’originalité et de vie. […] Ce qu’il y a de vrai, c’est que, pendant tout cet intervalle, sa vie fut une mort anticipée, qui put être prise pour une mort véritable. […] La mort de ce grand homme se lie à l’histoire de cette excellente comédie : elle est comme un triste épisode de ce dernier acte de sa vie dramatique et théâtrale ; et l’on est forcé d’en mêler le récit douloureux au compte qu’il faut rendre d’un chef-d’œuvre de gaieté comique. […] Généralement les personnes en qui cette affection subsiste imaginent que leur vie est menacée par quelque mal : affranchies de la peur de celui-ci, elles tombent dans la crainte de celui-là. […] Arrivé au comble de la souffrance, et touchant au terme de sa vie, son ressentiment contre la médecine était parvenu lui-même au plus haut degré d’exaspération ; et sa dernière comédie fut comme un testament ab irato contre une science qui ne pouvait ni soulager ses maux, ni prolonger ses jours.
La Serre, qui est en ceci la grande et, je crois, la seule autorité, dit simplement, dans son Mémoire sur la vie et les ouvrages de Molière, « qu’on, fut blessé de quelques traits hasardés, que l’auteur supprima à la représentation. » De plus, la scène dont il s’agit a-t-elle été retranchée tout entière, ou seulement raccourcie ? […] En effet, en empruntant à Tirso de Molina sa terrible légende et en exposant, dans ce cadre fantastique, les joyeuses et bientôt abominables distractions d’une vie toute de libertinage et de crimes, que s’est proposé Molière ? […] Et, comme si c’était de sa part un parti pris d’amoindrir la portée de la catastrophe, il fait intervenir la statue vengeresse à point nommé pour empêcher la conclusion d’une des mille et une amourettes du héros, vraie peccadille assurément dans une vie aussi abominable. […] Mémoire sur la vie et les ouvrages de Molière.
... jeune Mousquetaire que la mort a trop tôt enlevé à ses amis, étoit extrêmement blond ; il lui est arrivé trente fois dans sa vie d’aller au bal, à visage découvert, de parler à ses parents, à son frere, à sa maîtresse même, sans en être reconnu : il ne mettoit, pour tout déguisement, que de la poudre brune dans ses cheveux, & du papier brûlé sur ses sourcils. […] La vraisemblance ordinaire caractérise les choses qui arrivent ordinairement dans le cours de la vie commune des hommes ; l’extraordinaire est celle qui doit son ombre de vérité à la puissance des Dieux, ou de la féerie. […] C’est un transport si grand, qu’il n’en est point de même ; Et vous pouvez juger de sa puissance extrême, Puisque, seule, à cette heure, elle est venue ici Me découvrir, à moi, son amoureux souci, Me dire absolument qu’elle perdra la vie, Si son ame n’obtient l’effet de son envie ; Que depuis plus d’un an d’assez vives ardeurs Dans un secret commerce entretenoient leurs cœurs, Et que même ils s’étoient, leur flamme étant nouvelle, Donné de s’épouser une foi mutuelle.
« Elle aime toujours son cher Philadelphe ; il est vrai qu’afin de faire vie qui dure, ils ne se voient pas si souvent : au lieu de douze heures, par exemple, il n’en passe plus chez elle que sept ou huit. […] Mais enfin, sans querelle, sans reproche, sans éclat, sans le chasser, sans éclaircissement, sans vouloir le confondre, elle s’est éclipsée elle-même ; et, sans quitter sa maison, où elle retourne encore quelquefois, sans avoir dit qu’elle renonçait à tout, elle se trouve si bien aux Incurables, qu’elle y passe quasi toute sa vie, sentant avec plaisir que son mal n’était pas comme celui des malades qu’elle sert. […] Les murs auraient amplement contenu Toute sa vie…………………………… Au fond du temple on eût vu son image, Avec ses traits, son souris, ses appas, Son art de plaire et de n’y penser pas… J’aurais fait voir à ses pieds, des mortels, Et des héros, des demi-dieux encore, Même des dieux : ce que le monde adore Vient quelquefois parfumer ses autels.
Don Juan le bat, & le récompense ainsi de lui avoir sauvé la vie. […] Le maître voit de loin un homme attaqué par trois personnes ; il vole à son secours, & sauve la vie à Don Carlos, frere d’Elvire, dont il n’est pas connu. […] Don Carlos l’arrête, en lui disant qu’il doit la vie à Don Juan ; qu’il veut s’acquitter de cette obligation, en lui donnant le temps de réparer l’affront dont il a couvert leur famille, se réservant le droit de ne pas lui faire quartier s’il n’épouse pas bientôt Elvire. […] Il retranche une partie des événements de la vie de Don Juan, & les jette dans l’avant-scene ou dans les entr’actes, comme Moliere. […] Ils périssent à table en sa présence, & viennent après leur mort l’avertir de changer de vie.
Dupuis, homme d’épée, plein d’esprit, franc, sincere, reçoit, au siege de Charenton, trois coups dans le corps : tous les Sacrements lui sont administrés, après une confession générale de ses péchés, dont il n’obtient l’absolution qu’en promettant de changer de vie, & d’épouser une femme avec laquelle il vit, & qui est enceinte. […] En effet, est-il un seul jour de notre vie, où nous ne soyons perdus dans l’obscurité ? […] Les compliments dans le commerce de la vie ressemblent aux cérémonies dans la Religion. […] Il n’attend le soutien de sa vie que de ses bras & de son moulin. […] Ils rencontrent un Bûcheron qui les prend pour des voleurs, se jette à genoux, leur demande la vie, & leur sert ensuite de guide pour les conduire à Lieursain.
Au spectacle de cette période de terreur, c’est, je pense, une consolation de voir s’élever une autre grandeur que la grandeur de la cour, une autre autorité d’exemple et d’opinion, un autre modèle de société, une autre source de mœurs, d’idées, de principes ; c’est surtout un besoin pour les âmes douces et nobles, au milieu des tourments politiques qui les épuisent, d’entrevoir dans une société nouvelle un asile fermé à l’esprit de faction, et où se retrouvent les principales aménités de la vie civilisée. […] Mais à peu près dans le même temps elle reçut Pierre Corneille, dont la vie poétique commença en 1625 par la comédie de Mélite dont nous avons parlé.
Apprenez, pour vous confondre, qu’il y a seize ans, pour le moins, que l’homme dont vous nous parlez, périt sur mer avec ses enfants & sa femme, en voulant dérober leur vie aux cruelles persécutions qui ont accompagné les désordres de Naples, & qui en firent exiler plusieurs nobles familles. […] Le ciel ne nous fit point aussi périr dans ce triste naufrage : mais il ne nous sauva la vie que par la perte de notre liberté ; & ce fut des corsaires qui nous recueillirent ma mere & moi sur un débris de notre vaisseau. […] Nous passâmes à Genes, où ma mere alla ramasser quelque malheureux restes d’une succession qu’on avoit déchirée ; & de là, fuyant la barbare injustice de ses parents, elle vint en ces lieux, où elle n’a presque vécu que d’une vie languissante. […] Le peu de sureté que j’ai vue pour ma vie à Naples, m’a fait y renoncer pour toujours ; & ayant su trouver moyen d’y faire vendre ce que j’avois, je me suis habitué ici, où, sous le nom d’Anselme, j’ai voulu m’éloigner les chagrins de cet autre nom qui m’a causé tant de traverses.
Elle avoit remarqué que son amant voyoit souvent un Religieux, qui, passant pour un homme de sainte vie, pourroit, sans le savoir, être utile à ses amours. […] Après sa confession, elle dit au Pere qu’elle avoit une confidence à lui faire, & une grace à lui demander. « Vous savez qui je suis, mon Révérend Pere, & vous connoissez mon mari, qui m’aime plus que sa vie, & qui ne me refuse rien. […] Il faut faire une folie une fois en sa vie, mon Révérend Pere, répondit le Cavalier avec une feinte honnêteté. […] quelle vie !
Celio arrive vêtu en pélerin : il a été obligé de prendre ce déguisement parcequ’il a tué un homme qui en vouloit à la vie du Docteur. […] Célio arrive : ou découvre l’équivoque du portrait ; & le Docteur, pour qui Célio a jadis risqué sa vie, lui cede Eléonora. […] Cette contradiction entre le pere & la fille donne à la Scene Françoise une action, une vie que l’Italienne n’a pas.
Pour faire son éloge, il suffit de raconter sa vie : la vérité n’a pas besoin cette fois ni de voiles, ni d’ornements ; et le panégyriste le plus éloquent sera le narrateur le plus fidèle. […] Ses goûts s’annoncèrent dès son enfance ; il parlait à peine, qu’il chantait déjà : sa vie ne fut, pour ainsi dire, qu’une longue fête ; parvenu à son dix-septième lustre, il tirait encore des sons mélodieux de sa lyre octogénaire ; enfin, les Muses avaient présidé à sa naissance, et les Muses ont reçu son dernier soupir. […] Enfants, on nous berce avec elle ; vieillards, nous lui devons encore quelques illusions, et elle nous conduit gaiement au terme de la vie.
« Je ne sais pas combien de temps je serai ici (à la cour) ; j’y suis venue avec des dispositions soumises qui durent encore ; et je suis résolue, puisque vous l’avez voulu, de me laisser conduire comme un enfant, de tâcher d’acquérir une profonde indifférence pour les lieux et pour les genres de vie auxquels on me destinera, de me détacher de tout ce qui trouble mon repos et de chercher Dieu dans tout ce que je ferai. […] Ai-je besoin de faire remarquer cette promesse d’acquérir une profonde indifférence pour ces lieux de danger, et de se détacher de tout ce qui trouble son repos ; promesse que suit la déclaration de son peu d’aptitude à une vie contemplative ? […] Elle s’en exprime ainsi dans une lettre du 15 juin, à son frère : « La vie que l’on mène ici est fort dissipée, comme vous savez, et les jours y passent fort vite.
Toute la suite de sa vie a montré qu’en cette occasion sa peine la plus sensible fut la perte des espérances qu’elle avait déjà conçues de ramener le roi à une conduite plus conforme aux sentiments de religion et de piété dont elle était pénétrée. » M. de Beausset se fonde sur les Mémoires de Saint-Simon, et il en cite l’extrait suivant : « Bossuet était un homme dont les vertus, la droiture et l’honneur étaient aussi inséparables que la science et la vaste érudition. La place de précepteur de M. le dauphin l’avait familiarisé avec le roi, qui s’était plusieurs fois adressé à lui dans les scrupules de sa vie. […] Je meurs d’envie, il y a sept mois, de me retirer, et la même crainte m’en empêche : c’est une prudence bien timide et qui me fait consumer ma vie dans d’étranges agitations… Je sais bien que je puis faire ici mon salut ; mais je crois que je le ferais mieux ailleurs.
Francisque Michel lui-même, aucun monument; » là 2e, du VIe au XIIe siècle, qui n’a d’autre fondement qu’une insigne complaisance pour un dialogue en latin d’église entremêlé de quelque patois languedocien ; la 3e enfin, allant du XIIe au XVe siècle, mais, selon les déclarations de M. […] Du VIe au Xe siècle, nous rencontrons, en 587, deux cents religieuses qui, aux funérailles de Sainte-Radegonde, chantent, avec une sorte d’intervention des assistants, une amœbée plaintive autour du tombeau. […] Une des singularités, ou plutôt des nécessités de ce système théâtral était aussi de représenter le môme personnage aux diverses époques de sa vie, « enfant au premier acte, et barbon au dernier. » Il est vrai qu’ici les actes étaient des journées et qu’une seule pièce durait quelquefois huit ou dix jours. […] Un autre prêtre, le chapelain de Mégange, qui faisait Judas, se pendit si consciencieusement que l’on eut tout juste le temps de le dépendre pour le ramener à la vie. […] Testament, le petit Isaac, revenant de jouer avec les jeunes garçons du voisinage « à la fossette et à pique-rome, » apprend de son père que Dieu commande qu’il soit sacrifié : l’enfant se soumet, non sans regret de la vie, aux ordres du Seigneur : Mais veuillez moi les yeux cacher Afin que le glaive ne voie, Quand de moi vaudrez approcher : Peut-être que je fouiroie.
C’est que ce mot est comme le pivot autour duquel tourne la vie d’Arnolphe. […] Il est certain que, dans la vie réelle, elle ne se serait jamais passée ainsi. […] Supposez la situation de don Juan dans la vie réelle. […] Molière ne l’a mis aux prises qu’avec les détails un peu mesquins de la vie des cours. […] Est-ce que ce n’est pas ainsi que les choses se passent dans la vie ?
Mais on a beau savoir les choses et la vie, on rêve toujours des exceptions pour soi-même. […] Avide de plaisirs et de vie bruyante, Armande aurait voulu imposer ses goûts à son mari ; revenu de bien des choses, souffrant, écrasé de travail et de soucis, Molière aspirait à la vie de famille, intime et cachée. […] Une tirade heureuse, une scène bien venue, sont peu de chose au théâtre ; un caractère vrai, une action qui donne l’illusion de la vie, sont tout, et, de quelques élémens empruntés ou repris que soit formée cette création, il n’importe guère. […] De là des froissemens continuels, une irritation croissante, et bientôt la vie commune insupportable, Peut-on dire, cependant, que Molière ne rencontra près d’elle qu’indifférence ? […] Elle était jeune encore, plus belle que jamais ; elle n’avait pas été heureuse dans son premier mariage ; la vie lui devait un dédommagement.
Depuis nos éditions précédentes, beaucoup de travaux ont été continués ou entrepris sur la vie de Molière. […] Nous mentionnerons d’abord les Notes historiques sur la vie de Molière, par M. […] Le caractère naturellement ardent du jeune Poquelin ne pouvait se plier longtemps à une semblable vie. […] Ce fut, comme l’a dit Chamfort, la seule action blâmable de sa vie. […] Il est triste de penser qu’on rencontre plus d’une page semblable dans la vie de l’auteur d’Athalie.
Sa conduite dans la vie était conforme en ce point à ses discours sur le théâtre. […] C’est là probablement un de ces contes dont Grimarest a rempli sa Vie de Molière. […] On sait que, Racine ayant enlevé au théâtre de Molière sa tragédie d’Alexandre, et du même coup l’actrice qui y jouait le rôle d’Axiane, pour faire présent de l’une et de l’autre à l’hôtel de Bourgogne, ces deux grands hommes en demeurèrent brouillés toute leur vie. […] Ici, nulle intention morale, nulle leçon applicable à la conduite ordinaire de la vie, si ce n’est celle que M. […] La vie pastorale n’a rien de commun avec l’existence héroïque.