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16. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Heureusement il ne pouvait faire, en dépit de sa volonté, que des œuvres sérieuses. […] Oui, mais sa parole n’avait rien de sérieux, rien de solennel, rien qui partît de l’âme, de l’esprit et du cœur. […] Il sera, si vous le voulez, le second avertissement sérieux donné à Don Juan. […] Quand tout sera fait et conclu, aussitôt la France redeviendra sérieuse et calme ; elle ne parlera que des grandes choses, et non plus des futiles ! […] Orgon, à la profonde misère de George Dandin… le parterre reste sérieux et pensif à la verve étincelante et railleuse de Don Juan.

17. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE VIII. Le Mariage. » pp. 145-165

Cet enseignement, qui devient sérieux presque jusqu’au tragique, se retrouve tout comique, mais non moins formel, dans le dévouement de Mme Jourdain pour son fou de mari515 ; et certes c’est elle, si peu gracieuse qu’elle soit, qui a le beau rôle, quand elle dit à la belle marquise Dorimène, qu’elle trouve en partie fine chez son mari : « Pour une grande dame, cela n’est ni beau ni honnête à vous, de mettre de la dissension dans un ménage, et de souffrir que mon mari soit amoureux de vous516. »   Il n’y a pas à hésiter sur l’opinion ni sur l’influence de Molière en fait de mariage : le mariage est une chose sainte à laquelle sont obligés les honnêtes gens qui s’aiment ; c’est un lien honnête : — Mais doux ?  […] VI, Ce que c’est que les mariages du théâtre : « On commence par se livrer aux impressions de l’amour sensuel ; le remède des réflexions ou du mariage vient trop tard ; déjà le faible du cœur est attaqué, s’il n’est vaincu ; et l’union conjugale, trop grave et trop sérieuse pour passionner un spectateur qui ne cherche que le plaisir, n’est que par façon et pour la forme dans la comédie… Toute comédie, selon l’idée de nos jours, veut inspirer le plaisir d’aimer ; on en regarde les personnages, non pas comme gens qui épousent, mais comme amants ; et c’est amant qu’on veut être, sans songer à ce qu’on pourra devenir après (chap. […]   Et ces sérieuses réflexions sont de la même personne qui dit si franchement son fait à Trissotin (act.

18. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIX » pp. 319-329

Elle est le fruit de réflexions sérieuses. […] Quand elle charge l’abbé Testu de dire à l’hôtel de Richelieu : qu’on n’oublie pas dans la solitude des amis à qui l’on en doit tous les agréments, elle disait une chose sérieuse, qui se rapportait à la grande et belle habitation de Vaugirard, et à l’influence que madame de Richelieu exerçait sur la bienveillance de madame de Montespan et sur celle du roi.

19. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Un âne traversant un champ ne le rendait pas sérieux comme Boileau ; il ne se préoccupait pas pour Homère de la nécessité que ce mot fût très noble en grec. […] Il est vrai que, pour le Chevalier, la critique n’est pas une chose fort sérieuse. […] Est-ce une maison solide que je vais définitivement établir sur les ruines du vieux palais détruit par la main du Chevalier, sur les ruines de cet élégant pavillon qu’il a élevé ensuite comme une tente provisoire, en attendant une construction plus sérieuse ? […] Il a mis dans la bouche de Sosie un récit très suivi, très détaillé et très sérieux de la victoire des Thébains, tel qu’il pourrait être dans une histoire ou dans un poème. […] S’il pense, il ne veut pas en avoir l’air ; s’il dit des choses sérieuses, parfois tristes, il en demande pardon par un sourire.

20. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XV » pp. 175-187

Molière même, à qui Boileau reprochait d’avoir partagé son talent entre Térence et Tabarin, entre Scapin et le Misanthrope, Molière n’a rien laissé percer de Sganarelle ni de Scapin dans Le Tartuffe et Le Misanthrope, ni des beautés sérieuses de ces deux chefs-d’œuvre dans les badinages de son théâtre. […] On remarquait comme précieux dans un autre ouvrage : que Daphné avait toute son âme dans ses jeux ; Dans un autre : qu’un malheureux avait le front chargé d’un sombre nuage ; Dans un autre : qu’un grand homme voit les troubles des petites âmes du haut de sa vertu… qu’il échappe un sourire de son sérieux… que la frayeur court dans une assemblée.

21. (1739) Vie de Molière

Hugues Guéret était connu, dans les pièces sérieuses sous le nom de Fléchelles ; dans la farce, il jouait toujours un certain rôle qu’on appelait Gautier-Garguille. […] Il voulut jouer dans le tragique, mais il n’y réussit pas ; il avait une volubilité dans la voix, et une espèce de hoquet, qui ne pouvait convenir au genre sérieux, mais qui rendait son jeu comique plus plaisant. […] Molière joua le rôle de Don Garcie, et ce fut par cette pièce qu’il apprit qu’il n’avait point de talent pour le sérieux, comme acteur. […] Le genre sérieux et galant n’était pas le génie de Molière ; et cette espèce de poëme n’ayant ni le plaisant de la comédie, ni les grandes passions de la tragédie, tombe presque toujours dans l’insipidité. […] Ces gentillesses frivoles servent à faire goûter les beautés sérieuses.

22. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [96, p. 140-141] »

1775, Anecdotes dramatiques, tome III, p. 346 Parmi les épitaphes qu’on fit pour Molière, il y en a de plaisantes, et quelques-unes de sérieuses.

23. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [94, p. 138-139] »

[94, p. 138-139] L’abbé Dubos287 admire dans la scène 7 du troisième acte288 du Misanthrope, la saillie de ce même personnage, qui rendant un compte sérieux des raisons qui l’empêchent de s’établir à la cour, ajoute, après une déduction des contraintes réelles et gênantes qu’on s’épargne en n’y vivait point : « On n’a point à louer les vers de messieurs tels. »289 Cette pensée devient sublime, dit-il, par le caractère connu du personnage qui parle, et par la procédure qu’il vient d’essuyer, pour avoir dit que des vers mauvais ne valaient rien.

24. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Le succès fut donc complet, unanime, sérieux. […] Ainsi, Molière a commencé, dans cette France croyante et sérieuse qui avait à peine entendu parler du Menteur de Corneille. […] Au contraire, à comprendre, à deviner les maîtres, vous aurez cette récompense et vous l’aurez tout de suite, que ces mêmes pages sérieuses qui ont impatienté le lecteur frivole habitué aux bulletins du théâtre des Variétés ou du Palais-Royal, quand vous revenez sur votre passé, avec quelle joie et quelle fête vous les retrouverez ces pages sérieuses, cent fois plus vivantes que les colifichets de vos meilleures matinées. […] Ainsi, la critique bien faite, sérieuse, utile, appliquée aux grandes œuvres, a de grandes chances de survivre à l’homme qui l’écrivait. […] Géronimo prenant au sérieux les paroles de Sganarelle, se met en devoir de lui donner un bon conseil.

25. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [34, p. 62-63 ] »

Ces réflexions trop sérieuses ayant mis le poète de mauvaise humeur : « Ho !

26. (1886) Molière : nouvelles controverses sur sa vie et sa famille pp. -131

sérieux les rares autographes attribués au grand comique, et comparer en même temps les signatures souvent dissemblables par lui apposées au bas de plusieurs actes dressés par des notaires ou des officiers de l’état civil. […] Je me permets de ne pas prendre cette accusation au sérieux. […] Il ne serait pas mal de contrôler aujourd’hui son jugement et de soumettre la fameuse liste à une expertise sérieuse. […] Je reconnais aisément que la teneur de la quittance de 1650, mentionnant une somme accordée aux comédiens par les États de Languedoc, est un argument sérieux pour attribuer cette pièce et sa congénère à notre grand écrivain. […] Dans la magistrature, dans la noblesse, dans le clergé même, les hommes a principes sévères, les esprits sérieux, les âmes inflexibles cherchèrent une sorte de régénération sociale dans la pratique des vertus vraiment chrétiennes.

27. (1871) Molière

et, comme à vingt-deux ans qu’elle pouvait avoir, s’amusait la jeune reine, un peu sérieuse, et se tenant à l’écart des tumultes dont le roi était entouré. […] Il a quarante ans ; il épouse une petite comédienne égrillarde qui en a dix-huit à peine ; il est sérieux, elle est gaie et folâtre ; il se fâche, elle veut plaire. […] Lui, cependant, il se complaisait également dans la farce et dans la comédie sérieuse. […] Mais, le poète en proie à tous les chagrins domestiques ; le malheureux dont les jours sont comptés, et qui sent, à chaque effort, se déchirer sa poitrine en feu, voilà de quoi tomber dans le sérieux.

28. (1865) Les femmes dans la comédie de Molière : deux conférences pp. 5-58

Les plus hardis se jettent, tête baissée, dans le mariage ; grave imprudence qui livre au hasard l’acte le plus sérieux de la vie. […] Les arts d’agrément, surtout la musique, y ont pris une telle place que peu de femmes sont capables aujourd’hui de soutenir un entretien sérieux. […] Cette promesse qui serait une vaine parole pour une autre, est sérieuse dans la bouche d’Henriette. […] Elle s’associera à ses projets, le ranimera, s’il le faut, par des conversations sérieuses, lui ouvrira des chemins pour sortir d’embarras. […] C’est un état où le sérieux des devoirs à remplir est tempéré par de douces jouissances ; mais le plaisir ni même le bonheur ne sont ici le principal, ce n’est que l’assaisonnement.

29. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Ils étaient nés pour être des vagabonds, des bohémiens, on n’en put jamais faire des comédiens sérieux. […] Voilà comment ce vieux comédien a échappé à ce théâtre dont il était le rire le plus sérieux ! À propos d’artistes sérieux, le lecteur sera quelque peu étonné de rencontrer M.  […] Hommes et femmes ce sont les mêmes créatures souffrantes, patientes, et dont le rire même porte avec lui son enseignement sérieux. […] Éloge très sérieux, et c’est pourquoi il est déplacé dans cette leçon que prend le jeune Phidippide.

30. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

« C’en est fait, disions-nous, elle a parlé de sa retraite, et comme elle est une femme sérieuse, à tout jamais (elle le veut) elle abandonne ce Théâtre-Français dont elle était la gloire et l’orgueil, cette femme de tant de grâce, d’élégance et d’esprit, qui était restée parmi nous comme le dernier et charmant représentant d’une société qui n’est plus ! […] À cette épreuve suprême de l’heure sérieuse, combien de grands artistes ont succombé ! […] Ce fut le 18 avril 1844 que mademoiselle Mars se montra, pour la dernière fois, à ce public, dont elle était encore (après tant d’années) la fête la plus sérieuse et la plus charmante. […] Elle a salué toute cette foule enthousiaste avec une dignité bien sentie ; ses adieux ont été simples, touchants, sérieux ; elle tenait son cœur à deux mains, et elle aussi elle aurait pu dire comme cette héroïne de Corneille : — Tout beau, mon cœur ! […] Comédienne dans son moindre geste, dans son sourire, dans le pli de sa robe, dans la forme et dans la couleur de ses habits, dans le son de sa voix, cette voix touchante et ingénue, douce musique qui allait à l’âme, raillerie, innocence, bel esprit, moquerie pleine de verve, causerie sans fin, gracieuse façon de tout dire, profond sentiment, non seulement des ridicules humains, mais encore des misères humaines ; sa comédie avait quelque chose de grave et d’ingénu tout à la fois, quelque chose de sérieux et de jeune en même temps auquel il eût été bien difficile de résister.

31. (1885) La femme de Molière : Armande Béjart (Revue des deux mondes) pp. 873-908

Les encourageantes répliques de Léonor sonnaient encore à son oreille, lorsque au dénoûment pour rire de la comédie, il faisait succéder ce prologue d’une pièce vraie, autrement sérieuse, et qui devait tourner au drame. […] Fais-moi de sa personne une peinture qui me la rende méprisable ; et marque-moi bien, pour m’en dégoûter, tous les défauts que tu peux voir en elle. » Rebuté comme son maître et animé contre sa Nicole du même ressentiment, Covielle s’empresse d’obéir et prend très au sérieux son rôle d’aristarque galant : « Elle, monsieur, voilà une belle mijaurée, une pimpesouée bien bâtie, pour vous donner de l’amour ! […] elle en a, Covielle, du plus fin, du plus délicat. — Sa conversation… — Sa conversation est charmante. — Elle est toujours sérieuse. — Veux-tu de ces enjouemens épanouis, de ces joies toujours ‘ouvertes ? […] Élise est une jeune femme sensée, spirituelle et maniant l’ironie avec un sérieux qui en double la force. […] Elle a fait éclater ensuite une disposition toute divine, et ses pieds amoureux sur l’émail du tendre gazon traçoient d’aimables caractères qui m’enlevoiont hors de moi-même et m’attachoient par des nœuds invincibles aux doux et justes mouvemens dont tout son corps suivoit les mouvemens de l’harmonie. » En paraissant devant la cour avec l’Elmire du Tartuffe, Armande aborde un caractère autrement sérieux que les rôles d’aimable fantaisie et de convention romanesque où nous venons de la voir.

32. (1845) Œuvres de Molière, avec les notes de tous les commentateurs pp. -129

Je divertis le prince par les spectacles que je lui donne ; je le rebuterai par un travail sérieux et mal conduit. […] Il avait de bons acteurs pour le comique ; mais il lui en manquait pour le sérieux, qui répondissent à la manière dont il voulait qu’il fût récité sur le théâtre. […] On n’aimait point tout ce sérieux qui est répandu dans cette pièce. […] puisque nous sommes sur le sérieux, répliqua Chapelle, je vais le prendre tout de bon. […] Il passe avec justice pour très bon acteur, soit pour le sérieux, soit pour le comique, et il n’y a point de rôle qu’il n’exécute très bien.

33. (1885) Études sur la vie et les œuvres de Molière pp. -461

Molière, et cela dans le sens le plus sérieux et parfois le plus navrant du mot, Molière est comique, même par-devant notaire. […] Soulié intitule, avec une modestie et une simplicité sérieuses : Recherches sur Molière et sur sa famille. […] Elles étaient réelles et sérieuses. […] Tout y est comédie sérieuse et gaie ; caractère d’une vérité terrible et comique, en même temps. […] La nouvelle attaque exigeait une vengeance plus sérieuse.

34. (1850) Histoire de la littérature française. Tome IV, livre III, chapitre IX pp. 76-132

Voilà déjà le langage de la comédie : encore un pas, et nous aurons les caractères et les mœurs ; et ce langage, déjà si ferme, nourri de pensées plus sérieuses, prendra plus de corps et s’épurera. […] Imaginez un travers plus sérieux, un vice, et que la peine soit en proportion de la faute, voilà un caractère, voilà la vie. […] Enfin, on voulait une image complète de la vie dans une comédie sans incidents, sans coups de théâtre, sans complications invraisemblables, où tout fût une cause naturelle ou un effet inévitable, et qui provoquât non ce gros rire, si bon qu’il soit, qu’excitent les bouffonneries de Scapin, mais le sourire de la raison émue et réjouie par le spectacle d’événements sérieux présentés sous une forme plaisante. […] C’est dans cette langue que s’exprime tout homme qui est ému par quelque intérêt sérieux ; c’est ainsi que la parlent, quand ils ne sont que des hommes, même les écrivains qui la violent dans leurs livres. […] « Un sérieux attrait attachait Desdémone à tous ces récits ; et quand les soins de la maison l’appelaient au dehors, elle faisait toute la hâte qu’elle pouvait, et revenait, l’oreille avide, dévorer mes discours. » 6.

35. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Mais non ; il a l’air terriblement sérieux en débitant ces plaisanteries. […] L’adultère dans notre société moderne est devenu une affaire très sérieuse, ou du moins le monde comme il faut prétend n’en voir jamais que le côté sérieux. […] Non, j’entends une passion sérieuse, un amour vrai et profond. […] Non, un peu plus de sérieux, soit : car la situation est grave. […] Comme on y sentait, sous la discrétion du langage, un chagrin sérieux  et profond !

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