Or, au milieu de tant de perfection intellectuelle et de génie en toutes choses, régnait, au sujet de la femme, je ne sais quel faux goût, qui fut cause que ni le sublime Corneille ni même le tendre Racine ne firent tout à fait ce qu’on pouvait attendre d’eux : c’est seulement dans l’excès de la passion dramatique que Pauline, Hermione et Phèdre trouvèrent ces accents poignants et simples qui sont des cris de génie. […] « L’air précieux n’a pas seulement infecté Paris, il s’est aussi répandu dans les provinces. » Les Précieuses ridicules, sc.
Le scrupule grammatical, qui gêne le développement des autres branches de la poésie française, convient parfaitement à la comédie ; là du moins la versification n’a pas besoin de s’écarter du langage habituel ; ce qu’on lui demande n’est pas de donner au dialogue plus d’élan et de dignité, de l’élever au-dessus de la vie réelle, c’est seulement de le rendre plus vif et plus élégant. […] Ce dont il s’agit seulement c’est de savoir si son mérite, quelque saillant qu’il soit, donne le droit aux critiques français de l’ériger en génie sans égal, et si cinq ou six pièces de Molière auxquelles leur genre de construction a valu le titre de régulières, les autorise à rabaisser, comme ils le font, tout ce que les autres nations ont produit de piquant et d’original en fait de comédies de caractère. […] On ne saurait lui refuser de la finesse d’esprit, mais seulement elle s’exerce sur des objets trop minutieux. […] Tel devait être en effet leur sort ; car les principes sur lesquels ces écrivains se sont fondés, tendaient à détruire toute espèce de forme poétique, non pas seulement celle qui n’est que conventionnelle ; ils rappellent l’ours de la fable, qui tue son ami en voulant le débarrasser d’une mouche importune.