Valere méprise celui qui a pour titre les Devoirs des Rois ; Théophraste l’estime parcequ’il en est secrètement l’auteur. […] Connois-tu son discours sur les devoirs des Rois ? […] Fils d’un Armurier du Roi : l’Amant Prothée est son seul ouvrage.
Et qu’on ne dise pas que Molière s’est laissé aller à cette indulgence dans les débuts de sa carrière, aveuglé par l’exemple de ses prédécesseurs et de ses contemporains, entraîné par la nécessité de nourrir sa troupe et de faire rire à tout prix : c’est en 1669, quand il a donné le Misanthrope, le Tartuffe, l’Avare, après Amphitryon, que l’imitation antique peut excuser un peu ; c’est enfin quand il est maître et roi de la scène, qu’il joue devant le roi la désopilante farce de M. de Pourceaugnac, chef-d’œuvre comique où, par malheur, les deux personnages intéressants, spirituels, actifs, les deux chevilles ouvrières de la pièce, sont la Nérine et le Sbrigani, qui se font réciproquement sur la scène cette apologie digne des cours d’assises : NÉRINE Voilà un illustre. […] C’est en 1671, dans toute la force de son génie, quand il ne manque plus à ses chefs-d’œuvre que les Femmes savantes et le Malade imaginaire, que Molière donne les Fourberies de Scapin, et qu’il exalte un héros de la même volée que Mascarille et Sbrigani, roi de la pièce d’un bout à l’autre, qui dresse les fils de famille à courir les filles258 et à insulter leurs pères259, qui vole plus effrontément que tous ses prédécesseurs260, avec un entrain si victorieusement comique qu’il est impossible à l’âme la plus ferme de résister au fou rire causé par le mulet et la galère 261, et de n’être pas, malgré tous les principes, enchantée de voir réussir ces admirables fourberies.