Jusques-là il y avait eu de l’esprit et de la plaisanterie dans nos Comédies, mais il y ajouta une grande naïveté avec des Images si vives des mœurs de son siècle, et des Caractères si bien marqués, que les Représentations semblaient moins être des Comédies que la vérité même, chacun s’y reconnaissait et plus encore son voisin, dont on est plus aise de voir les défauts que les siens propres.
La fin du regne de Charles V. ayant vû naître le chant royal, genre de poésie de même construction que la ballade, & qui se faisoit en l’honneur de Dieu ou de la Vierge, il se forma des sociétés qui, sous Charles VI. en composerent des pieces distribuées en actes, en scenes, & en autant de différens personnages qu’il étoit nécessaire pour la représentation. […] Charles VI. leur accorda par ces lettres patentes, la liberté de continuer publiquement les représentations de leurs comédies pieuses, en y appellant quelques-uns de ses officiers ; il leur permit même d’aller & de venir par la ville habillés suivant le suject & la qualité des mysteres qu’ils devoient représenter. […] François I. qui prenoit grand plaisir à la représentation de ces sortes de comédies saintes, confirma les priviléges des confreres de la passion par lettres patentes du mois de Janvier 1518. […] La représentation de ces pieces sérieuses dura près d’un siecle & demi ; mais insensiblement les joüeurs y mêlerent quelques farces tirées de sujets burlesques, qui amusoient beaucoup le peuple, & qu’on nomma les jeux des pois pilés, apparemment par allusion à quelque scene d’une des pieces. […] Ménage qui a dit tant de mots, & qui en a dit si peu de bons, avoit pourtant raison de s’écrier à la premiere représentation des précieuses ridicules : courage Moliere, voilà le bon comique.