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15. (1794) Mes idées sur nos auteurs comiques. Molière [posthume] pp. 135-160

La première scène du premier acte, où les deux caractères, principaux s’exposent : la cinquième du premier acte, où Valère veut faire parler Sganarelle et se lier avec lui malgré lui. […] La scène cinquième du troisième acte, dans laquelle la prude Arsinoé vient donner des avis à la coquette Célimène, qui les lui rend avec tout l’esprit imaginable ; la septième, dans laquelle Arsinoé allume la jalousie d’Alceste, après l’avoir loué malgré lui ; là scène troisième du quatrième acte, de fureur et de rage de la part d’Alceste, de finesse et de coquetterie de la part de Célimène, qui s’apaise tant qu’Alceste est en colère, qui se fâche dès qu’Alceste s’apaise ; la première scène du cinquième acte., où Alceste, après avoir perdu son procès, veut renoncer à la nature entière et s’enfuir dans les bois ; le dénouement enfin : voilà les beautés principales d’un ouvrage dans lequel il n’y a pas un vers qui n’ait rapport au caractère principal. […] La première scène du premier acte, où la vieille mère Pernelle, en grondant toute sa famille, expose si plaisamment et la pièce et le caractère de chacun ; la cinquième, où Orgon s’informe de la santé de Tartufe, et oublie sa femme et ses enfants, malgré les railleries de Dorine ; la sixième sur les faux dévots entre Orgon et Cléante, scène admirablement écrite ; la quatrième du deuxième acte, où les amants se brouillent par un malentendu, et se raccommodent par les soins de Dorine ; la deuxième du troisième acte, où Tartufe s’annonce ; la troisième, où il fait sa déclaration à Elmire ; la sixième, où Orgon lui demande pardon à genoux pour son fils qui l’a accusé ; la cinquième du quatrième acte, où Orgon est sous la table, scène si singulière, si belle et si hardie : voilà les principales beautés d’un ouvrage que l’Europe admire avec raison.

16. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXV. Du contraste des Caracteres. » pp. 386-397

Le Spectateur n’auroit-il pas été dans le cas de demander, du moins à la premiere scene où rien ne distingue encore le personnage principal, lequel des deux on jouoit, du Philanthrope ou du Misanthrope ? […] Mais le Spectateur ne sent-il pas ce défaut, sur-tout lorsque le caractere vicieux est principal, comme dans l’exemple que je viens de citer. […] La franchise, l’honnêteté, la crédulité y sont continuellement en contraste avec la scélératesse & l’imposture ; mais ce même contraste qu’on oppose au héros, est partagé entre plusieurs personnages ; aussi aucun d’eux n’écrase-t-il le principal.

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