C’est en quoi consiste l’avantage qu’on lui donne sur tous les comiques modernes, sur ceux de l’ancienne Rome, et sur ceux même de la Grèce : de sorte que s’il se fût contenté de suivre les intentions de M. le cardinal de Richelieu, qui avait dessein de purifier la comédie, et de ne faire faire sur le théâtre que des leçons de vertus morales, comme on veut nous le persuader, nous n’aurions peut-être pas tant de précautions à prendre pour la lecture de ses ouvrages. Pour devancer les autres comme il a fait, il s’est cru obligé de prendre une autre route qu’eux. […] Au contraire il n’y a rien de plus propre pour inspirer la coquetterie que ces sortes de pièces, parce qu’on y tourne perpétuellement en ridicule les soins que les pères et les mères prennent de s’opposer aux engagements amoureux de leurs enfants.
Un gardien ouvrira la grille aux visiteurs étrangers, et leur dira : —Ici, messieurs, Molière appuyait le pied quand il composait; là il pleurait sur la légèreté de la Béjart ; là, à cette croisée, il prenait le frais après son dîner ou après le spectacle; là il mourut. […] Toutefois les précautions seront bien prises : on suspendra une croix pour avertir les passans que Molière est en démolition. […] C’est que si nous n’avons pas eu plus de bonnes comédies en France depuis Molière, la faute en est à Molière ou à ses prôneurs exclusifs, à ses admirateurs forcenés, qui, à genoux devant son image, donnent des coups de pied à tous ceux qui veulent prendre une petite place sur le socle, où on l’a scellé pour l’effroi bien plus que pour l’exemple des écrivains.