Premier axiome : le poète comique doit disparaître derrière ses personnages. […] » Donc, Alfred de Musset est un grand poète lyrique ; il n’est pas un bon auteur comique. […] Vous dites, par exemple, que le poète comique doit disparaître derrière ses personnages, et qu’il doit peindre la réalité. […] Est-il impossible de concevoir un genre de comédie où le poète, loin de peindre la réalité comme elle est, transporterait l’action dans un monde fantastique, donnerait à des idées abstraites une existence réelle, aux êtres réels une vie, en quelque sorte, idéale, un corps, une voix à des nuages, une constitution politique aux habitants de l’air ? […] C’est une construction a priori de sa raison intrépide, méprisant les faits, sacrifiant, à la façon allemande, aux superbes nécessités d’un système, de misérables accidents sans logique et sans signification, et quelques petits poètes, tels que Sophocle, Virgile, Racine, Goethe, vraiment trop superflus dans l’histoire littéraire.
Un homme tel que Molière devait lui appartenir : le prince jugea le poète, et le poète jugea le roi. […] Molière, destiné aux affaires du gouvernement, eût été aussi grand politique qu’il a été grand poète. […] Les hypocrites ne se trompèrent point sur l’intention qu’avait eue le poète en faisant représenter Le Festin de Pierre. […] Le poète de la raison et du goût, Despréaux, était l’admirateur du génie de Molière ; il le proclamait dans ses vers, il le répétait à la cour. […] Molière est le poète des philosophes, et ses ouvrages font les délices de tous les hommes raisonnables et de tous les hommes polis.