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79. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XI. De la Religion. Principe et Sanction de la Morale de Molière. » pp. 217-240

Le philosophe regarde les tartuffes comme des monstres qui insultent à la fois la dignité humaine et la grandeur de Dieu ; à leur vue, le chrétien ne peut s’empêcher de penser à la parole divine : « Prenez garde de faire vos bonnes œuvres devant les hommes pour être vus d’eux ; autrement vous n’aurez point de récompense chez votre Père qui est dans les deux. […] Aujourd’hui même, des juges sincères peuvent être d’avis que cette absence complète, non-seulement de toute pratique, mais de toute pensée religieuse, a préludé, non pas à l’irréligion haineuse et prétendue savante des philosophes du dix-huitième siècle, mais à l’indifférence de bon ton qui règne de nos jours dans une grande partie de ce qui s’appelle par convenance la société chrétienne.

80. (1824) Notice sur le Tartuffe pp. 91-146

Le philosophe et l’auteur comique, l’honnête homme et le poète, voilà ce qu’on trouve dans l’auteur du Tartuffe : cet immortel ouvrage n’est pas seulement un monument pour les lettres, c’est un service rendu à l’humanité. […] C’est surtout comme peintre de mœurs et comme philosophe qu’il faut juger Molière ; les intérêts de la morale doivent passer avant les scrupules de la grammaire. […] La Bruyère est le seul philosophe du siècle de Louis XIV qui n’ait point su apprécier le Tartuffe ; quant aux auteurs sacrés, tous ne furent pas aussi tolérants que l’envoyé du Saint-Siège et les prélats auxquels le monarque déféra l’examen de ce chef-d’œuvre : plusieurs ont pu être de bonne foi dans leurs attaques, mais l’esprit de corps rend les hommes d’église injustes et passionnés comme tous les autres ; et peut-être l’opinion généralement accréditée que l’évêque d’Autun, Roquette, avait été le modèle de l’hypocrite de Molière, n’a pas peu contribué à les irriter contre son chef d’œuvre. […] Molière est le poète des philosophes, et ses ouvrages font les délices de tous les hommes raisonnables et de tous les hommes polis.

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