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146. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVIII. » pp. 357-396

Harpagon prétend ne vouloir pas lui faire violence : alors Cléante avoue sa passion pour Mariane : Harpagon lui ordonne d’y renoncer. […] Cléante, fils d’Harpagon, n’a pu la voir sans ressentir pour elle la plus vive passion. […] Pantalon s’approche alors de son trésor pour le disperser avec mépris, s’en débarrasser : mais il le voit ; sa passion renaît ; il le regarde avec tendresse, se précipite sur lui, le met dans son sein, & tout en gémissant de l’instant fatal qui doit les séparer, il dit qu’il aura du moins le bonheur de le posséder sans partage tant qu’il vivra.

147. (1740) Lettres au Mercure sur Molière, sa vie, ses œuvres et les comédiens de son temps [1735-1740] pp. -89

Il avoit un amour de passion pour son métier, et un zèle ardent pour le divertissement du Public, dont il étoit très aimé ; il en donna des marques jusqu’à la fin de sa vie. […] « La galanterie n’est pas la seule science qu’on apprend à l’école de Moliere, on apprend aussi les maximes les plus ordinaires du libertinage contre les véritables sentimens de la religion, quoi qu’en veuillent dire les ennemis de la bigoterie ; et l’on peut assurer que son Tartuffe est une des moins dangereuses pour nous mener à l’irreligion, dont les semences sont répandues d’une manière si fine et si cachée dans la plupart de ses autres pièces, qu’on ose assurer qu’il est infiniment plus difficile de s’en défendre, que de celle où il joue pesle et mesle bigots et dévots le masque levé. » Il faut avouer néanmoins que celles qui jouent certaines professions et certaines passions peuvent être fort utiles. […] Après avoir blâmé Corneille et Racine d’avoir fait parler avec trop d’esprit, les personnes qu’ils font paroître pénétrées de grandes passions, « Moliere, dit-il, est un auteur pernicieux » qui ne tend qu’à donner du crédit et de l’autorité au crime, en décriant ceux qui s’y oposent, ou en aprenant la maniéré dont les jeunes personnes doivent se servir pour tromper des parens chargez de leur conduite ». […] On remarquoit un défaut en lui, qui étoit d’avoir un visage riant dans les passions les plus furieuses et les situations les plus tristes.

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