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129. (1877) Molière et Bourdaloue pp. 2-269

Il avait d’autres moyens de plaire au roi : il servait et glorifiait ses vices. […] On a toujours vu d’honnêtes gens se préoccuper de cette chimère : Existe-t-il un moyen de purifier le théâtre et de le rendre utile aux mœurs ? […] Nul moyen donc, à moins de le supposer imbécile, de lui prêter les intérêts de ces messieurs, souvent allégués dans la préface de Molière. […] Quel moyen de peindre plaisamment tout cela et d’en tirer des effets comiques ? […] Et ainsi finit, au moyen d’une double et soudaine contradiction de caractères, logiquement néanmoins, cette merveilleuse comédie où, nous dit-on, la haute raison et la grande âme de Molière se font particulièrement voir.

130. (1881) La philosophie de Molière (Revue des deux mondes) pp. 323-362

Dans ce sermon dont on ne sait pas exactement la date, mais qui ne doit pas être très éloignée de la représentation publique de Tartuffe, c’est-à-dire dans les environs de 1669, Bourdaloue a pris pour sujet l’hypocrisie ; mais avec une habileté qui témoigne qu’il appartient bien à son ordre, au lieu de prendre à partie, comme on s’y attendait, l’hypocrisie elle-même, il trouva moyen de parler contre ceux qui l’attaquent : « Au lieu d’employer mon zèle, dit-il, à combattre l’hypocrisie, j’entreprends de combattre ceux qui raisonnent sur le sujet de l’hypocrisie, ou en tirent de malignes conséquences, ou en reçoivent de fausses impressions, ou s’en forment de fausses idées au préjudice de la vraie piété. » Développant ces trois idées, Bourdaloue distingue trois sortes de personnes dans le christianisme : « les mondains et les libertins », qui en sont les ennemis déclarés ; « les chrétiens lâches », qui ont peur de professer leur foi ; et « les ignorants et les simples », qui se laissent séduire. […] Molière a dû rejeter ce moyen grossier de rendre don Juan odieux. […] Dans Molière, au contraire, le théâtre est le but et non le moyen. […] Non seulement la sincérité toute crue est impossible, mais même une certaine grandeur d’âme, un certain excès de fierté, tout ce qui tend à dépasser la moyenne, tout cela, quoique respecté en apparence, offre toujours quelque nuance de ridicule et est facilement traité de donquichottisme.

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