Seuls, quelques raffinés288 disent : Molière, ce moraliste, n’est pas assez gai pour être comique ; la raison et la satire des mœurs prédominent trop sur l’imagination dans son théâtre ; on n’est poète et poète comique, que lorsque la Muse est en délire et lient un thyrse à la main. — À la bonne heure ! […] Mais rendez-moi ce qui m’appartient. » Pendant que l’ombre d’Aristophane murmure ces choses à l’oreille des théoriciens d’outre-Rhin, ceux de la patrie de Molière disent en chœur : Aristophane, ce rieur, n’est pas assez moraliste pour être comique ; l’imagination, dans son théâtre, prévaut trop sur la satire des mœurs et sûr la raison. […] L’un dit : la comédie se borne à représenter les mœurs des hommes dans une condition privée294, excluant par sa définition tout le théâtre d’Aristophane ; un autre : le comique exprime l’empire de l’instinct physique sur l’existence morale295, oubliant Philaminte, Armande, Bélise, Vadius, le docteur Pancrace, et Alceste. […] Non ; ce qui nous intéresse surtout, c’est d’apprendre qu’Aristophane ne développe pas d’intrigues, ne peint pas de caractères ; que son comique est une gaieté sans frein et une fantaisie sans bornes, animant, poétisant le tableau des mœurs publiques ; qu’il est tantôt lyrique et tantôt bas, à la fois cynique et charmant, tel enfin que Voltaire a pu l’appeler un bouffon indigne de présenter ses farces à la foire , et que Platon a pu dire : les Grâces choisissant un tombeau trouvèrent l’âme d’Aristophane .
alors, les habitudes, les mœurs, les préjugés, l’atmosphère ambiante jette en quelque sorte un voile entre la théorie et la pratique. […] De la pensée il passe à la parole, et de la parole à l’acte, sans que rien l’arrête jamais, ni conventions sociales, ni mœurs, ni préjugés, ni habitudes. […] C’est que Tartuffe est, en même temps qu’une comédie de mœurs et une étude de caractère, un drame de situation. […] Mais c’étaient les mœurs du temps. […] En d’autres termes, c’est d’observer la vérité matérielle, qui est la ressemblance physique ; et la vérité morale, qui est la dissemblance de mœurs.