Surtout, je me garderai de contrister le cœur des mères par l’imprudence de mes paroles. […] Comme ce sont à peu près les seules mères que Molière ait peintes, il faut renoncer à fixer notre choix et nous occuper de trouver notre fiancée. […] Armande a les défauts de sa mère, et ne possède aucune de ses qualités ; elle est même plus vicieuse. […] Mais rappelez-vous la franchise habituelle de son caractère, l’espèce de solitude que les dédains de sa sœur et de sa mère ont faite autour d’elle, l’expérience précoce qu’elle y a acquise, l’extrême péril que court son bonheur, et enfin le langage du temps, moins réservé dans les termes, sans que peut-être le fond fût plus corrompu. […] Les jeunes filles, dans Molière, n’attendent pas toujours l’ordre d’un père à se choisir un époux ; elles se révoltent même quelquefois ; mais, dans leur révolte même, le père ou la mère gardent pour elles un caractère sacré ; elles lâchent d’éluder ou de fléchir leur volonté, mais elles ne l’enfreignent pas.
Il semble qu’Henriette pourrait souffrir les hommages de Trissotin, quand ce ne serait que pour en rire, et pour complaire aux idées de sa mère : non, elle le prendra à part pour lui dire : Je vous estime, autant qu’on sauroit estimer ; Mais je trouve un obstacle à pouvoir vous aimer : Un cœur, vous le savez, à deux ne sauroit être, Et je sens que du mien Clitandre s’est fait maître480. […] Quel dégoût inspire le Tartuffe avide et luxurieux Qui convoite la mère en épousant la fille493 ! […] Chaque matin, l’ange de vie et de mort apporte à la mère commune une nouvelle parure ; mais toutes ces parures se ressemblent. » A. de Musset, André del Sarto, act.