Il maudit cette échelle fatale qui devait causer la perte de son élève ; il dit que le ciel lui inspire une bonne pensée, qu’il va trouver l’impudique beauté qui attire son élève, lui reprocher l’énormité de son crime et la ramener par ses sages exhortations dans la bonne voie.
Oui, c’est Armande, c’est évidemment Armande qui lui inspire, dans L’École des femmes, cette peinture de l’amour absolument ridicule en lui-même, mais qui, à force d’être vrai, sincère, devient à certains moments pathétique. C’est encore Armande qui lui inspire dans le rôle d’Alceste cette peinture de l’amour noble, élevé, et, quant à son objet, fourvoyé, qui ne peut éviter par moments une teinte de ridicule, qui est comme l’empreinte de l’indigne objet auquel il s’attache. […] La preuve que Molière n’accepte pas les opinions de Chrysale, c’est qu’il les a mises sous une forme ridicule dans ce passage du rôle d’Arnolphe, pour qui certes il ne prétend nous inspirer aucune admiration. […] C’est un résultat abusif de l’autorité morale acquise de longue main sur lui, de la confiance qu’on lui inspire ; craignez et prenez garde qu’il n’ait une opinion qu’il n’aurait pas, qu’il ne fasse un choix qu’il ne ferait pas, s’il était moins mené et mieux éclairé. […] ——— Rêver la lumière et être aveugle ; se sentir un génie vivifiant et se voir, comme Salomon de Caus, jeté dans un hôpital de fous ; embrasser le monde par la pensée du fond d’un cachot d’où l’on ne sortira point ; éprouver encore l’amour et ne plus l’inspirer ; qui dira de ces supplices lequel est le plus affreux ?