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139. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Je ne sais pas pourquoi on a laissé Diderot revendiquer pour lui le douteux honneur d’avoir inventé ce genre ; la plupart des pièces qui composent ce que la critique française appelle emphatiquement la haute comédie ne sont pas autre chose que des drames moraux, et nous leur trouverions au besoin des précédents et des modèles dans l’antiquité. […] Ils se conscient de l’ennui des drames de Destouches en constatant à leur honneur que ce sont des comédies de caractère, et ils rabaissent leur siècle, si fécond en merveilles dans l’ordre du vaudeville, leur siècle qui a produit Le Désespoir de Jocrisse 51, en s’écriant que la grande comédie est morte. […] Tout est renfermé là-dedans ; et sans dot tient lieu de beauté, de jeunesse, de naissance, d’honneur, de sagesse et de probité !  […] Dans Les Femmes savantes, à Bélise, Philaminte, Armande et Trissotin sont opposés et préférés Chrysale, Henriette, Ariste, Clitandre, et cette fille de cuisine qui ne sait pas le français95 ; tous se font honneur de ce qu’ils ignorent, et Molière leur donne raison. […] Les personnages sensés de la pièce, le maître de la maison et son frère, la fille et son amant, et jusqu’à une servante qui ne sait pas le français, tous cherchent à se faire honneur de ce qu’ils ne sont pas, de ce qu’ils n’ont pas et de ce qu’ils ne savent pas, comme de tout ce qu’ils cherchent à ne pas être, à ne pas avoir et à ne pas savoir.

140. (1747) Notices des pièces de Molière (1666-1669) [Histoire du théâtre français, tome X] pp. -419

La tragédie de Britannicus, qui fait tant d’honneur à Racine, ne passa d’abord que pour une faible production, et Boursault en fit une critique très partiale ; « mais enfin il est arrivé (dit M.  […] Le mot du duc de Montausier, je voudrais ressembler au Misanthrope de Molière, a pu donner lieu au reproche que l’on a fait à l’auteur d’avoir voulu présenter sous une face désavantageuse un caractère dont tout homme vertueux pourrait se faire honneur ; mais ce mot est plutôt l’expression vive du cas que l’on doit faire de la vertu, quand même elle serait poussée trop loin, qu’une critique solide de la pièce. […] Alors l’action est conduite à sa fin, par l’éclat que doit faire nécessairement la tromperie de Jupiter ; et ce dieu est obligé de se découvrir aux dépens même de l’honneur d’Alcmène : ainsi, rien n’arrive dans cette pièce de dessein formé, et le hasard en produit seul tous les incidents. […] Le public justifia bien la prédiction de l’auteur de L’Art poétique, et depuis longtemps les Français citent Le Misanthrope comme l’honneur de leur scène comique. […] Si ce fait est vrai, il fait également honneur au prince et au comédien. » a.

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