« Après le succès de ces deux pièces, son théâtre commença à se trouver continuellement rempli de gens de qualité, non pas tant pour le divertissement qu’ils y prenaient (car l’on n’y jouait que de vieilles pièces), que parce que le monde ayant pris habitude d’y aller, ceux qui aimaient la compagnie, et qui aimaient à se faire voir, y trouvaient amplement de quoi se contenter : ainsi l’on y venait par coutume, et sans dessein d’écouter la comédie, et sans savoir ce qu’on y jouait. » « [*]Pendant cela notre auteur fit réflexion sur ce qui se passait dans le monde, et surtout parmi les gens de qualité, pour en reconnaître les défauts : mais comme il n’était encore ni assez hardi pour entreprendre une satire, ni assez capable pour en venir à bout, il eut recours aux Italiens ses bons amis, et accommoda les Précieuses au théâtre français, qui avaient été jouées sur le leur, et qui leur avaient été données par un abbé des plus galants*. […] Quelque temps après, voyant que le théâtre de l’Hôtel du Petit-Bourbon nous ôtait tous nos chalands, il fit dessein de jouer dans un lieu fermé, et me faire composer quelques comédies, de mettre de bonnes farces au bout, et d’y prendre de l’argent de même que les autres.
Par la même raison, il ne suffit pas pour rendre l’intrigue & le dialogue vraissemblable, d’en exclure ces à parte, que tout le monde entend excepté l’interlocuteur, & ces méprises fondées sur une ressemblance ou un déguisement prétendu, supposition que tous les yeux démentent, hors ceux du personnage qu’on a dessein de tromper ; il faut encore que tout ce qui se passe & se dit sur la scene soit une peinture si naïve de la société, qu’on oublie qu’on est au spectacle. […] Ce n’est point une combinaison possible, à la rigueur ; c’est une suite naturelle d’évenemens familiers qui doit former l’intrigue de la comédie, principe qui condamne l’intrigue de l’Hecyre : si toutefois Térence a eu dessein de faire une comédie d’une action toute pathétique, & d’où il écarte jusqu’à la fin avec une précaution marquée le seul personnage qui pouvoit être plaisant. […] Quelques particuliers entreprirent de faire joüer de cette maniere en 1542, à Paris, le mystere de l’ancien Testament, & François I. avoit approuvé leur dessein ; mais le parlement s’y opposa par acte du 9 Décembre 1541, & ce morceau des registres du parlement est très-curieux, au jugement de M. du Monteil.