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76. (1746) Notices des pièces de Molière (1658-1660) [Histoire du théâtre français, tome VIII] pp. -397

« Après le succès de ces deux pièces, son théâtre commença à se trouver continuellement rempli de gens de qualité, non pas tant pour le divertissement qu’ils y prenaient (car l’on n’y jouait que de vieilles pièces), que parce que le monde ayant pris habitude d’y aller, ceux qui aimaient la compagnie, et qui aimaient à se faire voir, y trouvaient amplement de quoi se contenter : ainsi l’on y venait par coutume, et sans dessein d’écouter la comédie, et sans savoir ce qu’on y jouait. » « [*]Pendant cela notre auteur fit réflexion sur ce qui se passait dans le monde, et surtout parmi les gens de qualité, pour en reconnaître les défauts : mais comme il n’était encore ni assez hardi pour entreprendre une satire, ni assez capable pour en venir à bout, il eut recours aux Italiens ses bons amis, et accommoda les Précieuses au théâtre français, qui avaient été jouées sur le leur, et qui leur avaient été données par un abbé des plus galants*. […] Et comme il savait que le succès des pièces ne dépendait pas tant de leur bonté que de la brigue de leurs auteurs, il a trouvé le moyen de m’introduire dans les compagnies, et il y a déjà plus de deux cents personnes qui sont infatuées de mes pièces.

77. (1705) La vie de M. de Molière pp. 1-314

. ―  J’en aurais, dit-il, plus de plaisir si je pouvais vous tenir compagnie ; mais ma santé ne me le permettant pas, je laisse à Mr de Chapelle le soin de vous régaler du mieux qu’il pourra. […] La vie est un pauvre partage ; quittons-la, de peur que l’on ne sépare d’aussi bons amis que nous le sommes ; allons nous noyer de compagnie ; la rivière est à notre portée. […] Molière revenu de son abattement, dit à Baron, qui était de la compagnie ; mais d’un âge à négliger une pareille conversation : Voyez, petit garçon, ce que fait le silence, quand il est observé avec conduite. […] Un jour qu’il dînait en nombreuse compagnie avec Mr le marquis de M***1, dont le Page, pour tout domestique, servait à boire, il souffrait de n’en point avoir aussi souvent que l’on avait accoutumé de lui en donner ailleurs ; la patience lui échappa à la fin. ―  Eh ! […] Mais quand une Troupe s’est outrée avec vous, elle s’écarte ; les uns vont à l’armée, les autres à la campagne, où ils se reposent ; et pendant ce temps-là une autre compagnie les relève ; de manière que vous êtes nuit et jour à l’atelier.

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