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63. (1910) Rousseau contre Molière

II suffit de s’apercevoir du moment où elle arrive. […] C’est ainsi qu’a été conçu et qu’a été composé le caractère d’Alceste, et c’est ainsi que ce même homme à Oronte lui-même dira, se connaissant très bien et s’étant bien aperçu que sa franchise lui a souvent porté malheur : « Veuillez m’en dispenser. […] Rousseau ne s’aperçoit pas que sa note contredit son texte et que, même, la seconde partie de sa note contredit les premières lignes de sa note. […] C’est ce que je passerai ma vie à vous démontrer. » Voilà le langage que Rousseau eût tenu à Diderot et celui aussi qu’il eût tenu rétrospectivement à Molière, s’il avait aperçu dans Molière seulement des traces de philosophie de la nature. […] Ce qu’il a aperçu dans Molière, c’est du sens commun et du sens social ; or, c’est justement le sens commun et le sens social que, l’un portant l’autre, il n’aime guère.

64. (1824) Notices des œuvres de Molière (VIII) : Le Bourgeois gentilhomme ; Psyché ; Les Fourberies de Scapin pp. 186-466

Jourdain ; et, loin que, dans cet homme, le public vît le chapelier Gandouin, il n’y eut peut-être pas un seul spectateur qui n’y aperçût quelqu’un de son voisinage ou de sa connaissance. […] La plupart, et Fulgence le premier, y ont vu une image de l’union de l’âme et du corps, ou plutôt de l’empire des passions sur l’âme ; d’autres y ont aperçu la peinture de l’homme profane régénéré par son admission aux mystères ; des théosophes, sans s’inquiéter si une fiction du paganisme pouvait se prêter raisonnablement à une interprétation toute chrétienne, y ont reconnu le péché originel effacé par la rédemption ; enfin, un savant danois de nos jours y a découvert un mythe moral, faisant partie de ces mystères (sacra) auxquels les femmes seules étaient initiées, et destiné à être représenté devant elles, sous la forme d’un drame symbolique (symbolica et dramatica representatio), afin de leur rappeler les dangers qui assiègent la beauté, les devoirs que la femme mariée doit accomplir au milieu des difficultés et des épreuves de tout genre, et les récompenses qui sont réservées à celle dont la chasteté et la foi conjugale ne se seront point démenties.

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