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106. (1824) Notice sur le Tartuffe pp. 91-146

Quelques écrivains, et entre autres Grimarest, auteur d’une Vie de Molière que Voltaire traite avec raison de fabuleuse, ont prétendu que Molière avait été presque entièrement découragé par les persécutions auxquelles l’avait exposé le Tartuffe ; qu’il en avait conçu un profond chagrin, et qu’on lui avait entendu dire au sujet de cette pièce : « Je me suis repenti plusieurs fois de l’avoir faite. »Rien ne paraît moins vraisemblable, rien n’annonce que Molière ait songé un seul instant à abandonner le terrain à ses ennemis ; on l’a vu au contraire ne perdant jamais de vue son œuvre de prédilection, faisant jouer tous les ressorts de son esprit, et traitant pour ainsi dire de la représentation du Tartuffe avec tout l’art et toute la dextérité du négociateur le plus habile. […] Il n’y a certes dans une telle indication rien qui annonce le moindre rapport avec la comédie du Tartuffe. […] Parmi les orateurs sacrés qui condamnèrent le Tartuffe il en est deux des plus illustres qui aient immortalisé la chaire chrétienne ; Bourdaloue et Bossuet ont attaqué ce chef-d’œuvre, l’un avec une sorte de modération, mais par des arguments plus spécieux que solides, l’autre avec un fougueux emportement qui annonce plutôt la colère de l’orgueil que les alarmes de la piété.

107. (1882) Molière (Études littéraires, extrait) pp. 384-490

Signalons seulement deux comédies, en cinq actes et en vers, qui, malgré leur inexpérience, annonçaient déjà son génie. […] Il annonçait qu’on n’avait rien à refuser à l’ouvrier des fêtes royales. […] Ainsi que le titre l’annonce, elle ne roule que sur la découverte d’une marmite pleine d’or qu’a trouvée le pauvre Euclion, mais pour son malheur, puisqu’elle sera comme la furie vengeresse qui le punit de sa dureté cruelle envers les siens et envers lui-même. […] Telle est du moins la conversion annoncée par un prologue de Plaute, et fidèlement accomplie par son continuateur, Urceus Codrus, ce latiniste Bolonais qui, au quinzième siècle, osa compléter une œuvre mutilée par le temps144. […] Aussi, pour venir à bout d’une telle impudence, faudra-t-il qu’Ariste imagine le stratagème des deux lettres qui, au moment où va se signer le contrat, annoncent tout à coup à Chrysale la perte de sa fortune.

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