Vous, Brin-d’avoine, & vous, la Merluche, je vous établis dans la charge de rincer les verres, & de donner à boire, mais seulement lorsqu’on aura soif, & non pas, selon la coutume de certains impertinents laquais, qui viennent provoquer les gens, & les faire aviser de boire lorsqu’on n’y songe pas.
J’avoue qu’il y a des lieux qu’il vaut mieux fréquenter que le théâtre ; et si l’on veut blâmer toutes les choses qui ne regardent pas directement Dieu et notre salut, il est certain que la comédie en doit être, et je ne trouve pas mauvais qu’elle soit condamnée avec le reste ; mais supposé, comme il est vrai, que les exercices de la piété souffrent des intervalles, et que les hommes aient besoin de divertissement, je soutiens que l’on ne leur en peut trouver un qui soit plus innocent que la comédie. » Avant de se prononcer ainsi, Molière a eu soin d’établir qu’il y a comédie et comédie, et de faire observer que « ce serait une injustice épouvantable que de vouloir condamner Olympe, qui est femme de bien, parce qu’il y a une Olympe qui a été une débauchée ».
Il fallait toutes les ressources du génie le plus fécond, pour rendre comique et même attachant, ce tableau d’un intérieur bourgeois, où la lutte n’est établie qu’entre le bon sens un peu grossier d’un chef de famille, et la folie pédantesque de sa femme, de sa sœur et de sa fille aînée ; où tout le danger qui menace les personnages est le projet d’un mariage ridicule, opposé à celui d’un hymen bien assorti. […] Thomas, si je l’ose dire, en voulut mal à Molière : il se persuada, du moins, qu’il avait contribué à établir, chez notre nation moqueuse, ce préjugé contre le savoir des femmes, dont sa vertueuse amie lui paraissait être victime ; et, pour la venger, pour la louer en même temps, il affronta courageusement le ridicule d’enseigner à Molière comment il aurait dû s’y prendre pour faire sa comédie.
Comment sont-elles faites, je vous prie, d’où viennent-elles, et par quels efforts surnaturels pourrez-vous établir leur généalogie, avec le grand siècle, avec l’élégante société, avec la comédie que représentait mademoiselle Mars ? […] Voilà comment, de chute en chute, depuis la retraite de mademoiselle Mars, et quand elle ne fut plus la reine de ce théâtre abandonné, pour donner le ton du beau langage et l’air du beau maintien, cette femme élégante, et quand une révolution nouvelle eut envahi ce monde à grand peine rétabli sur sa base fragile, il arriva que nous vîmes un beau jour, dans une cave étroite, naguère consacrée aux plus vils funambules, s’établir en gloussant… ô monstruosité du haillon vide et de la parole creuse, une incroyable réunion intitulée — eh !
Si l’on admet, comme j’ai essayé de l’établir, que le rapprochement ne manque pas de justesse pour Armande, il est difficile de le rejeter complètement pour Molière. […] Et voici comment se seraient établies ses relations avec la femme de Molière : « Comme il étoit libéral et que la demoiselle aimoit la dépense, la chose fut bientôt conclue.
Le divin fondateur du christianisme n’avait prétendu abolir ni l’État ni la famille, et ses apôtres ont nettement prêché le mariage et la soumission à l’ordre établi. […] « Pour se procurer l’ordinaire soutien de la vie, personne, parmi les hommes n’avait d’autre peine à prendre que celle d’étendre la main, et de cueillir sa nourriture aux branches des robustes chênes, qui les conviaient libéralement au festin de leurs fruits doux et mûrs ; les claires fontaines et les fleuves rapides leur offraient en magnifique abondance des eaux limpides et délicieuses ; dans les fentes des rochers et dans le creux des arbres, les diligentes abeilles établissaient leurs républiques, offrant, sans nul intérêt, à la main du premier venu, la riche moisson de leur doux labeu r225.
Du moment où ces deux hommes, placés à de telles distances dans l’ordre social, l’un roi hors de tutelle, l’autre bouffon émérite 6 et moraliste encore bien timide, se furent regardés et compris, il s’établit entre eux une sorte d’association tacite, qui permettait à celui-ci de tout oser, qui lui promettait assurance et garantie, sous la seule condition de respecter et d’amuser toujours celui-là. […] Il établit, par des conjectures ingénieuses, que la femme de Molière devait être fille de Madeleine Béjart et d’un sieur de Modène, qu’on vit plus tard rentrer dans la famille comme parrain du second enfant de l’auteur du Tartuffe. […] Caffaro, établi à Paris, dans une maison de son ordre, depuis une vingtaine d’années ; fort honnête religieux et professeur estimé de philosophie et de théologie. […] De ces quatre qualités des sens, les trois premières sont l’ouvrage du Créateur : mais c’est au milieu de cet ouvrage de Dieu que l’attache forcée au plaisir sensible, c’est-à-dire la concupiscence introduite par le péché, établit son siège. […] Ils établissent une censure pour mettre le gouvernement, quelquefois un peu la religion, à couvert des brocards de la scène, et ils laissent aux mœurs le soin de se tirer d’affaire comme elles pourront.
— Il faut remarquer que l’arrêt du parlement du 17 novembre 1548, donné quand la troupe des Confrères de la Passion s’établit à l’Hôtel de Bourgogne, ne leur confirma leur privilège qu’à condition qu’ils ne joueraient que des sujets honnêtes, licites et profanes.
Cependant que ce généreux prince occupe tous ses soins à maintenir la religion, Molière travaille à la détruire ; le roi abat les tempêtes de l’hérésie, et Molière élève des autels à l’impiété ; et autant que la vertu du prince s’efforce d’établir dans le cœur de ses sujets le culte du vrai Dieu par l’exemple de ses actions, autant l’humeur libertine de Molière tâche d’en ruiner la créance dans leurs esprits par la licence de ses ouvrages. […] Il ne se joué pas à la ligne directe, et il ne s’insinue jamais dans une famille où se trouvent à la fois une fille à établir et un fils à pourvoir ; il y a là des droits trop forts et trop inviolables ; on ne les traverse point sans faire d’éclat, et il t’appréhende, sans qu’une pareille entreprise ne vienne aux oreilles du prince à qui il dérobe sa marche, par la crainte qu’il a d’être découvert et de paraître ce qu’il est. » Sans doute les faux dévots ont plus beau jeu chez un célibataire que chez un père de famille ; on calomnie, on dépouille plus facilement des collatéraux que des enfants ; mais le vrai tour de force de Tartuffe est de faire déshériter le fils même de la maison ; et si l’auteur nous prouve que le fanatisme peut aveugler un père jusqu’à lui faire oublier son propre sang pour un misérable fardé d’une fausse dévotion, ne fait-il pas voir à plus forte raison l’empire que de pieux imposteurs peuvent exercer sur des hommes qui ne tiennent pas au lieu puissant de la famille ?
Nous avons voulu, en nous plaçant à notre point de vue, discuter la question du Tartuffe comme une question de casuistique morale, et nous croyons, à ce point de vue même, avoir établi le droit strict de Molière ; mais quant à lui, il n’avait pas besoin de tant raisonner. […] Or la critique de La Bruyère va jusque-là : « S’il se trouve, dit-il, un homme opulent à qui il a su imposer et dont il est le parasite, il ne cajole ; pas sa femme… il ne s’insinue jamais dans une famille où il y a à la fois une fille à pourvoir et un fils à établir… il en veut à la ligne collatérale. » Je maintiens que, si ces critiques étaient justes au fond, il n’y aurait pas d’optique théâtrale qui pût justifier Molière d’aussi fortes exagérations.
Est-il toujours bien sincère, ainsi, lorsqu’il repousse énergiquement le reproche de faire des personnalités, lorsqu’il proteste de son respect pour la médecine, la religion, les puissances établies ? […] Que les médecins d’alors dussent nécessairement attirer l’attention d’un poète comique, c’est ce qu’a pleinement établi Maurice Raynaud, auteur compétent entre tous d’un excellent livre, les Médecins au temps de Molière.
Ces deux circonstances établissent une possession que j’ai cru devoir respecter.
Pour rendre sa joie plus parfaite, il lui annonce l’arrivée de Lucindo, ce fils bien aimé, qu’il laissa au maillot à Naples, quand il vint s’établir à Rome.
C’était la première fois qu’une ville, en Allemagne, voyait un théâtre populaire et régulier s’établir en ses murs. […] Ou plutôt le ridicule n’existe pas chez eux ; j’entends le ridicule français, celui qui consiste à ne pas se conformer à l’usage établi. […] Elle est pleinement, absolument établie, quand Tartuffe entre au troisième acte. […] Mais personne n’y prenait garde, la convention avait été ainsi établie et signée. […] Voilà bien des raisonnements pour établir un point qui probablement vous avait paru, du premier abord, indiscutable.
Beaucoup de gens étant désireux de la noblesse pour ses avantages honorifiques ou pécuniaires, il s’établit des fabricateurs de faux titres, qui anoblissaient à vil prix ; et plusieurs, fraudant la fraude elle-même, se donnèrent, sans bourse délier, des qualifications, des armoiries, et même des parchemins, plutôt que de les acheter à ceux qui les vendaient en contrebande.
Ainsi s’établit, entre le poète et le jeune roi, on dirait aujourd’hui « une entente cordiale », et sitôt que le poète comprit qu’il était nécessaire à la joie et peut-être au gouvernement du prince, il se sentit délivré de toute gêne.
On peut remarquer que les Français, nation en général plus pensante que les Italiens et les Grecs, sont les seuls qui aient établi la bonne comédie sur une base de philosophie morale.
Les ennemis passionnés de telle ou telle forme de gouvernement établi n’ont-ils pas maintes fois exprimé le désir que des malheurs vinssent fondre sur la patrie, espérant voir le gouvernement de leur choix revenir à la suite de ces malheurs ? […] La Buyère, dans sa description de l’hypocrite, n’a pas compris que la passion pouvait faire commettre des fautes même aux plus rusés : « Si Onuphre, dit-il, se trouve bien chez un homme opulent dont il est le parasite et dont il peut tirer grand secours, il ne cajole point sa femme, il ne lui fait du moins ni avance, ni déclaration ; il s’enfuira, il lui laissera son manteau, s’il n’est aussi sûr d’elle que de lui-même… Il ne s’insinue jamais dans une famille où se trouvent à la fois une fille à pourvoir et un fils à établir. […] Si la culture des bons sentiments appartient surtout aux parents et aux chefs d’institution, en excitant dans le cœur des enfants les nobles instincts moraux qui inspirent le bien, le juste, le respect qu’ils doivent à leurs supérieurs, à leurs semblables et aux lois établies, c’est à l’État surtout qu’incombe le devoir de supprimer les causes de perversion, de mettre fin autant que possible à la manifestation éhontée des mauvais instincts, dont la nature essentiellement contagieuse ne peut laisser de doute à personne.
Occupée d’élargir ses rues, de planter ses quais, d’établir ses trottoirs, de multiplier ses marchés et ses fontaines, absorbée dans le désir bienfaisant de répandre partout la salubrité et la gaîté, toute parée de son bien-être et de sa magnificence, elle sembla un moment oublier sa gloire.