M. de La Harpe raconte avec éloge, ce trait de Voltaire, refusant d’annoter Racine et disant : « Il suffit de mettre au bas de chaque page : admirable! […] Parce que, enfin, sous la provocante toilette de la forme, derrière le mot qui ose, le trait qui porte, la saillie qui éclate et flambe, il y a le fond : une action forte, comprise largement, étudiée puissamment, conduite selon l’art approfondi du théâtre, selon la science exacte de la vie...
Clitandre, sous les traits de M. […] Bélise, sous les traits de Mme Thénard, n’est pas la joyeuse caricature imaginée par Molière, mais une figure qui, à force de prodiguer les éclats de rire, finit par attrister les spectateurs attentifs.
Molière prétendit seulement à être l’imitateur du comique italien, et toutefois il embellit sa copie de quelques traits originaux qui la rendirent fort supérieure à son modèle, ainsi qu’aux autres ouvrages où était reproduit le même sujet.
On voit dans toutes ses comédies des traits hardis & singuliers que Moliere ne désavoueroit pas ; mais elles manquent de conduite, ainsi que leur Auteur.
On voit bien que ce trait ne regarde ni les excellents articles de cet ouvrage, ni les véritables Philosophes qui s’y sont immortalisés.
Il en plaça dans la suite quelques traits dans son Médecin malgré lui.
Le mariage de Julie de Rambouillet avec le duc de Montausier est un fait de si peu d’importance historique, qu’il ne mériterait pas qu’on en recherchât les circonstances, s’il ne concourait d’abord à marquer l’époque où la société de l’hôtel Rambouillet commença à se dissoudre, et ensuite à faire tomber les applications que nos biographes modernes lui ont faites, des traits lancés par Molière en 1650 contre Les Précieuses ridicules.
Elle en sortit indignée des traits que celle-ci lança de haut en bas sur la pauvre Jo (nom sous lequel madame de Sévigné désigne madame de Ludres).
Je ne sais mais il me semble retrouver dans l’esquisse inachevée du comédien Destin, quelques traits épars du caractère élevé de Molière. […] À peine sur le théâtre en osait-il redire quelques traits ! […] La correction et le poli du vers de Boileau (le procédé à l’huile) l’avait d’abord séduit, et il avait essayé de ce style pour Don Garcie, mais il reconnut bien vite que cette forme, quel qu’élégante qu’elle fût, lui allait mal et convenait peu au théâtre ou il fallait peindre d’un seul coup, à grands traits non tâtés. […] Plaute n’est plus qu’un plat bouffon, Et jamais il ne fit si bon Se trouver à la comédie ; Car ne pense pas qu’on y rie De maint trait jadis admiré, Et bon in illo tempore. […] Nous le voyons jeter un coup d’œil rapide sur la société qui l’entoure, et l’esquisser à grands traits.
— Autre détail domestique dont l’intérêt privé a trait à Molière de plus près.
Un courroux si constant, pour l’ombre d’une offense, M’a trop bien éclairci de votre indifférence ; Et je dois vous montrer que les traits du mépris Sont sensibles, sur-tout aux généreux esprits. […] Remarquons en passant que ce n’est pas dans ce dernier trait que Moliere brille, & qu’il auroit fort bien pu ne pas finir la scene par cette plate bouffonnerie qui se trouve dans plusieurs pieces italiennes8.
Ce trait de ressemblance est plus fort que le premier ; mais si la copie ressemble à l’original, on est obligé de convenir que c’est en beau. […] Tel sait orner ses romans, ses contes, ses histoires, de traits, de situations, de caracteres comiques, qui les affoibliroit lui-même en les transportant sur le théâtre.
J’aurois, si je le voulois, dans cette scene seulement, cent traits pareils à citer. […] Je ne sais pas pourquoi Moliere n’a pas tiré parti de ces deux traits, qui sont d’un excellent comique, puisque le plaisant sort du fond de la scene & de la situation des personnages.
Il saurait qu’il n’y a pas un de ses personnages qui ne soit le portrait fidèle de quelqu’un de ses contemporains, pas un trait qu’il ne doive à quelque inconnu, pas une inspiration qui lui soit propre, — de sorte que sa part d’invention est aujourd’hui réduite à bien peu de chose, et que tout le monde, au XVIIe siècle, finit par être un peu plus l’auteur des œuvres de Molière que Molière lui-même. […] Que de plus le roi ait accordé à ce poète, qui était en même temps son domestique, la protection qu’il lui devait contre l’insolence du duc de La Feuillade : tous ces petits traits ont été soit embellis par les biographes ; mais ce sont des services qu’il serait injuste de méconnaître, comme il est ridicule de s’en extasier2.