Dix ans après Sertorius, nous retrouvons les mêmes mots navrés et poignants : Le souvenir en tue. […] Qu’il tombe au milieu d’une conversation, c’est un loup dans une bergerie, personne n’ose plus souffler mot. […] Mais je vais donner le récit d’un historien du mot à mot pour bien montrer que ceci n’est pas une invention. […] Aussi Molière trouvait-il un vif plaisir dans la compagnie de ce « diable à quatre », selon le mot de Regnard. […] Parmi les légendes, dans l’histoire de la vie de Molière, il y a encore le mot de Racine ou de Boileau.
Le mot du duc de Montausier, je voudrais ressembler au Misanthrope de Molière, a pu donner lieu au reproche que l’on a fait à l’auteur d’avoir voulu présenter sous une face désavantageuse un caractère dont tout homme vertueux pourrait se faire honneur ; mais ce mot est plutôt l’expression vive du cas que l’on doit faire de la vertu, quand même elle serait poussée trop loin, qu’une critique solide de la pièce. […] Ce qui arriva, à l’égard de son Misanthrope, est une preuve trop authentique de ce que je viens d’annoncer, pour n’en pas rapporter ici l’histoire en peu de mots. […] Il est en effet des tours uniques, dictés par la nature, que le moindre changement dans les mots altère et affaiblit. […] Finissons par un mot d’un grand prince sur la comédie du Tartuffe. […] C’est-à-dire, en un mot, ces fameuses merveilles, Dont je charme aujourd’hui, les yeux et les oreilles.
Et donc, l’amour est d’abord un mouvement naturel ; mais, par le mot de nature, gardons-nous de comprendre les excitations instinctives du corps ou de l’imagination, faites pour être dominées et non obéies : il veut dire ici cette nature humaine en laquelle Cicéron ajustement affirmé qu’il faut chercher la source de la conduite et du devoir, parce que c’est une nature essentiellement raisonnable 424. […] Il sera pur463 : jamais un amant, qui aime de l’amour peint par Molière, ne songera à faire sa maîtresse de son amante, ou plutôt ce mot de maîtresse deviendra chaste dans sa bouche et dans sa pensée ; il sera toujours ému de respect devant celle en qui il vénère sa propre dignité et son honneur même. […] Quant aux amours obliques ou contre nature qui remplissent nos romans et nos drames contemporains, il n’en parle jamais : ces aberrations maladives ou, tranchons le mot, vicieuses, sont absolument inconnues à sa saine raison. […] Ah I que ne pouvez-vous vous élever, madame, Au sommet de l’esprit, dans le donjon de l’âme, Et là, dans une sainte insensibilité, Voir sous ces mots obscurs luire la vérité !
Alors les deux Philosophes contrasteroient en effet ; mais le second personnage de la piece, la folle, la capricieuse Céliante qui, dans tout son rôle, ne combat pas d’un mot la manie du héros, n’est tout au plus qu’en opposition avec lui. […] Julie lui fait une grande révérence, & se retire sans dire un mot. […] laissez-moi faire : Je m’en vais, en deux mots, accommoder l’affaire.
Le lendemain au matin le drapier le fit appeller, lui disant qu’ayant songé la nuit au voyage qu’il vouloit entreprendre, il ne trouvoit pas à propos de paroître à Chartres qu’il ne fût habillé de deuil ; qu’il lui falloit du temps pour cela, & partant, qu’il l’engageoit de retourner à Chartres retrouver sa belle-sœur avec un mot de lettre qu’il lui donneroit, dans laquelle il mit la raison qui l’obligeoit de retarder encore deux ou trois jours, au bout desquels il ne manqueroit pas de se rendre, la consolant le mieux qu’il lui fut possible de l’affliction qui lui étoit arrivée. […] Avec cette lettre il arrive à Chartres ; il la présente à Philippe d’Estampes, qui fut bien marri d’apprendre une si mauvaise nouvelle ; &, sachant que cet homme étoit venu exprès de Paris, envoyé par sa belle-sœur, il lui fit faire bonne chere, lui disant qu’il s’en retournât le lendemain au matin avertir sa belle-sœur qu’il s’alloit faire habiller de deuil, & que dans deux jours il l’iroit trouver, & lui donna un mot de lettre. […] Comme ils discouroient ensemble dans cette chambre, Charles s’étant réveillé, ouit cette voix, qu’il jugea approcher de celle de son frere, quoiqu’il ne pût pas discerner les mots, dont il s’étonna fort, & commença à avoir peur que ce ne fût l’ame de son frere qui revenoit.
Vous serez content, je vous en assure : mais, je vous prie, que j’aie l’honneur de vous dire un mot en particulier. […] On pourroit encore reprocher à l’Auteur d’avoir fait une troisieme & mauvaise copie du Tartufe dans son Faux Sincere, puisque le héros n’affecte beaucoup de franchise que pour enlever un dépôt, & que l’Auteur, en peignant le caractere de son héros, nous dit : Hypocrite en franchise est à-peu-près le mot. […] Si sur ce qui me touche Il fût encor sorti deux mots de votre bouche, Je les aurois donnés tantôt à des laquais, Qui tous auroient été sans bruit, à peu de frais, Vous régaler chez vous de la belle maniere.
Mais ne nous laissons pas corrompre par de grands mots : rions de la peine qu’ils prennent pour cacher leur impuissance, & pour se faire un mérite de cette même foiblesse qui leur a fait prendre la route la plus facile, au hasard de fournir une carriere infructueuse. […] De son étude enfin je veux qu’elle se cache, Et qu’elle ait du savoir, sans vouloir qu’on le sache, Sans citer les Auteurs, sans dire de grands mots, Et clouer de l’esprit à ses moindres propos. […] Ce style figuré, dont on fait vanité, Sort du bon caractere & de la vérité : Ce n’est que jeu de mots, qu’affectation pure, Et ce n’est point ainsi que parle la nature. […] Il fait débiter sur le théâtre deux de ses pieces favorites, & compte tous leurs défauts par autant d’exclamations de quelques bégueules qui se pâment d’admiration à chaque mot. […] Enfin Moliere enfante le Tartufe, cette piece incomparable, qui est une leçon continuelle de morale, dans laquelle chaque mot est l’éloge de la vertu & la satyre du vice.
Le correcteur s’était attaché à faire disparaître le mot roi et tout ce qui a trait à la cour et à la noblesse. […] Cet écrivain obscur est un de ceux qui, dans les titres de leurs ouvrages, abusèrent davantage du mot illustre. […] C’est le dernier mot de la lettre, le bouquet. […] Ce mot n’emportait avec soi aucune idée défavorable ; bien au contraire, ce fut longtemps un titre d’honneur. […] Il ne répondit qu’un mot rapide à ses accusateurs dans La Critique et rien dans L’Impromptu.
Réfutation du prétendu mot de Molière contre le premier président. […] Mot de Molière sur cet acteur. […] Mot d’un avare sur cette pièce. […] Mot du docteur Malouin. […] quel est le cœur assez glacé pour y trouver un trait à reprendre, un mot à blâmer ?
Cet aveu n’est autre chose que le sentiment réfléchi d’un sçavant détrompé ; mais le mot du vieillard, qui du milieu du parterre s’écria par instinct, Courage, Moliere, voilà la bonne comédie, est la pure expression de la nature, qui montre l’empire de la vérité sur l’esprit humain. […] Choqué du maintien grave, des dehors étudiés, & du vain étalage de mots scientifiques que les médecins de son tems affectoient, pour en imposer au public, il a crû pouvoir tirer de leur ridicule un fonds de comique plus amusant, à la vérité, qu’instructif. […] Le mot du duc de Montausier, je voudrois ressembler au misantrope de Moliere, a pû donner lieu au reproche que l’on a fait à l’auteur, d’avoir voulu présenter sous une face désavantageuse, un caractére dont tout homme vertueux pourroit se faire honneur ; mais ce mot est plûtôt l’expression vive du cas que l’on doit faire de la vertu, quand même elle seroit poussée trop loin, qu’une critique solide de la piéce. […] Il est, en effet, des tours uniques, dictés par la nature, que le moindre changement dans les mots altére & affoiblit. […] Les efforts qu’il fit pour achever son rôle, augmentérent son oppression ; & l’on s’apperçut qu’en prononçant le mot juro, dans le divertissement du troisiéme acte, il lui prit une convulsion, qu’il tâcha en vain de déguiser aux spectateurs par un ris forcé.
Ricciardo répond qu’il attend Tebaldo, et que, dès que celui-ci sera venu, Fabio aura le mot de l’énigme. […] » À ces mots Turlupin se sentait vaincu et, abaissant son sabre : « — Ah ! […] « Il contrefaisait d’abord les marquis avec le masque de Mascarille, dit un des interlocuteurs de La Vengeance des Marquis 42 ; il n’osait les jouer autrement, mais à la fin il nous a fait voir qu’il avait le visage assez plaisant pour représenter sans masque un personnage ridicule. » Il faut entendre ces mots en ce sens que Molière, la première fois qu’il contrefit les marquis, dans Les Précieuses ridicules, eut recours au travestissement de Mascarille, le valet de L’Étourdi et du Dépit amoureux, rôles qu’il aurait joués avec le masque, suivant l’étymologie du nom (maschera, mascarilla). […] » La pièce de Cicognini finit brusquement sur ces mots.
Alors Maître Raimon s’en alla au logis, & ne voulut dire mot à sa femme, mais épier le temps qu’ils fussent ensemble. […] vous ne dites mot ! […] vous ne dites mot ! […] « En un mot, il languit, le pauvre misérable ; « Et s’il faut, poursuivit la vieille charitable, « Que votre cruauté lui refuse un secours, « C’est un homme à porter en terre dans deux jours. » Mon Dieu, j’en aurois, dis-je, une douleur bien grande. […] Permettons à chacun d’en rire ; Défendons à tous d’en médire ; Et déclarons que son Auteur Dans son style a de la douceur, De la netteté, de la grace ; Qu’avec tant de nature il trace Les sujets & les passions, Et débite des mots si bons, Qu’un esprit bien fait, quoi qu’on die, Doit admirer sa comédie, Et le prendre, tout bien compté, Pour Térence ressuscité.
Tout y contribue, plan ridiculement construit, vers sans cadence et sans règles, langage devenu, presque inintelligible, ignorances et grossièretés sans nombre ; en un mot, tout ce qui peut rendre une lecture rebutante se trouve rassemblé dans ces pièces. »Vous avez là, Messieurs, une définition exacte de notre vieux théâtre et de toutes les soi-disant pièces dramatiques qui l’ont précédé. […] Le Sauveur la regarde et lui dit ce seul mot : «Marie ! […] Quelle toile ou quel marbre pourrait rendre ce mot unique : Marie ! […] Vous en connaissez le sujet, que, pour clore notre séance, je vous rappellerai en peu de mots. […] Le génie de notre nation se trouve comme accablé, pendant près d’un siècle, par l’étourdissement que lui cause l’irruption subite des auteurs de l’antiquité; la phrase française prend d’autres allures et cherche à se calquer sur la phrase latine ; le vocabulaire même se modifie, nombre de mots se perdent, d’autres naissent plus ou moins heureusement de l’imitation.