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180. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Ils ont dépensé leurs plus belles années, leur plus beau style et leur meilleur esprit, à soutenir, à parer, à décorer, à fortifier la chose de ce monsieur ; ils ont fécondé sa terre, ils ont taillé sa vigne, ils ont mené paître ses troupeaux, ils ont supporté, pendant que le maître dormait, ou batifolait avec ses esclaves, la chaleur de la journée et la fraîcheur du matin ; ils n’ont pas osé être malades sans la permission de ce monsieur ; ils ont regardé dans les yeux de Trajan, pour savoir si Trajan était content ; ils ont été attentifs à sa moindre parole, ils ont interrogé son sourcil de Jupiter Olympien, ils ont flatté même sa cuisinière, la complice de sa toute-puissance ; ils ont ri de son rire, et pleuré de son chagrin ; ils ont sué, ils ont halé, ils ont râlé… et les voilà à la porte de cette maison qu’ils ont bâtie, à la porte de ces jardins qu’ils ont plantés ; et du jour au lendemain, pendant que ce sol qu’ils ont fécondé de leur esprit, de leur talent, de leur labeur, rapporte au maître un intérêt qui serait un capital pour les ouvriers de la vigne, nul ne s’informe du destin de ces ouvriers habiles, actifs, intelligents, dévoués, braves jusqu’à l’audace, hardis jusqu’à l’abnégation ! […] « Zélie est riche, elle rit aux éclats ; Syrus l’esclave a pris le nom d’un roi, et s’appelle Cyrus » Nous aussi nous avons nos avocats déclamateurs, nos magistrats galants ; nous avons Hermippe, qui a porté si loin la science de l’ameublement et du comfort ! […] De temps à autre, le chef-d’œuvre reprenait sa puissance, alors la comédie s’indignait et grondait comme eût fait le remords, singulière comédie en effet, dans laquelle le plus horrible et le plus épouvantable des crimes est flagellé par le rire.

181. (1885) La femme de Molière : Armande Béjart (Revue des deux mondes) pp. 873-908

Les encourageantes répliques de Léonor sonnaient encore à son oreille, lorsque au dénoûment pour rire de la comédie, il faisait succéder ce prologue d’une pièce vraie, autrement sérieuse, et qui devait tourner au drame. […] et vois-tu rien de plus impertinent que des femmes qui rient à tout propos ? […] Cette représentation ne manqua pas d’approbateurs : trente de ces c…s applaudirent fort, et le dernier fit ce qu’il put pour rire, mais il n’en avoit pas beaucoup d’envie. » Le dernier, c’est évidemment Molière ; mais ne voit-on pas qu’il n’est incorporé dans la bande que pour donner lieu à retourner contre lui le trait qu’il avait lancé ? […] Mais ma femme, toujours égale et libre dans la sienne, qui seroit exempte de tout soupçon pour tout autre homme moins inquiet que je ne le suis, me laisse impitoyablement dans mes peines ; et, occupée seulement du désir de plaire en général comme toutes les femmes, sans avoir de dessein particulier, elle rit de ma faiblesse. » Il y a bien là un air d’arrangement, une insistance maladroite sur la parfaite innocence d’Armande, qui compromettent la cause même que Grimarest veut servir.

182. (1730) Poquelin (Dictionnaire historique, 4e éd.) [graphies originales] pp. 787-790

J’en conviens, me dit-il, mais elles ne laissent pas de divertir certains jeunes gens, qui ne viennent à notre Theatre que pour rire, qui rient de tout, & souvent sans sçavoir pourquoy.

183. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VII. De l’Exposition. » pp. 139-164

Du Croisy rit des impertinences qu’il a essuyées de la part des Précieuses ; la Grange en est outré : les voilà suffisamment autorisés à se les répéter sans que leur scene ait rien de forcé. […] Regardez-moi un peu sans rire.

184. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXIII. Examen de quelques Caracteres. » pp. 350-377

Adieu ridicule, adieu plaisant ; par conséquent, adieu les ris, adieu la comédie. […] me dis-je : je vais faire prendre à mon héros les diverses façons de penser de toutes les personnes qui l’entourent : il aura alternativement jusqu’à leur humeur : il sera gai avec l’un, triste avec l’autre ; il pleurera avec celui-ci, il rira avec celui-là, & j’aurai un fonds aussi plaisant qu’inépuisable.

185. (1769) Éloge de Molière pp. 1-35

Mais sa philosophie, ni l’ascendant de son esprit sur ses passions, ne purent empêcher l’homme qui a le plus fait rire la France, de succomber à la mélancolie : destinée qui lui fut commune avec plusieurs Poètes comiques ; soit que la mélancolie accompagne naturellement le génie de la réflexion, soit que l’observateur trop attentif du cœur humain, en soit puni par le malheur de le connaître. […] Rendons-nous plus de justice, augurons mieux de nos travers, et ne désespérons pas de pouvoir rire un jour à nos dépens.

186. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XI. De la Religion. Principe et Sanction de la Morale de Molière. » pp. 217-240

Lui, l’homme du rire et du plaisir, il a su, dans quelques scènes étonnantes d’une pièce pleine de farces comme le Festin de Pierre, peindre la croyance en Dieu, l’amour de Dieu, la dignité, la nécessité de cette croyance et de cet amour. […]   Fénelon, Démonstration de l’Existence de Dieu, partie I, §§ IV, XXX-L. — On ne peut s’empêcher de rire du prétendu épicurisme de Molière fondé sur l’épicurisme de son maître Gassendi, quand on voit que ces preuves de l’existence de Dieu tirées de l’existence des êtres contingents, de l’ordre de l’univers, et de la nature de l’homme, sont traduites du Syntagma philosophicum : « Quid memorem tam mirabilem fabricam contexturamque corporis, tam eminenteis facultates quas observamus in anima ? 

187.

S’il rit, c’est un hasard et ne rit qu’à demi… C’est avec un baiser qu’il trahit son ami ! […] ÉRASTE                         Sais-tu que je ne veux pas rire ? […] Mais, pour ne laisser aucun doute sur cet article, il faut apprendre au peuple, aux demi-savants et aux adorateurs de la comédie, que Molière n’a fait monter la médecine en spectacle de raillerie sur le théâtre, que par intérêt et pour se venger contre une famille de médecins, sans se mettre en peine des règles du théâtre et particulièrement de celles de la vraisemblance, car, de toutes les pièces dont ce comédien a outré les caractères, ce qui lui est souvent arrivé, et qu’on ne voit guère dans l’ancienne comédie, celles où il a joué les médecins sont incomparablement plus outrées que toutes les autres ; mais, comme il faut être maître pour s’en apercevoir, ceux qui cherchent à rire ne pensent qu’à rire, sans se mettre en peine s’ils rient à propos. […] Après tout, il n’y eut pas trop à rire pour Molière, car, loin de se moquer de la médecine, s’il eût suivi ses préceptes, s’il eût moins échauffé son imagination et sa petite poitrine, et s’il eût observé cet avis d’un meilleur médecin, quoique bien moins bon poète que lui,                  Et l’on en peut guérir, pourvu que l’on s’abstienne                Un peu de comédie et de comédienne,                Et que, choyant un peu ses poumons échauffés,   s’il eût, dis-je, suivi cet avis, et qu’il eut bien ménagé l’auteur et l’acteur, ceux dont il prétendait se railler n’auraient pas eu leur revanche et leur tour, outre que c’est une grande témérité à un mortel de se moquer de la maladie et de la mort, et particulièrement à un chrétien qui n’y doit penser qu’en tremblant.

188. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIII. De la liaison des Scenes. » pp. 250-260

Le Philosophe est consterné, les deux sœurs fuient épouvantées, & les spectateurs rient.

189. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIX. De la Gradation. » pp. 342-351

On y rit par-tout, me dira-t-on.

190. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIV. » pp. 279-289

Il imagine de faire rire la Princesse, afin que l’effort qu’elle fera en riant lui fasse rendre son arête.

191. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIX » pp. 319-329

On cause, on rit fort bien avec elle. » Madame Scarron, pour donner le change aux curieux que sa retraite aurait pu mettre en campagne, prit avec elle la petite d’Heudicourt, et parut se charger de son éducation.

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