D’honnêtes et riches bourgeois, désespérant de devenir nobles de leur chef, voulaient du moins s’allier à des familles nobles : les uns donnaient leur fille à quelque gentilhomme obéré, qu’une grosse dot affranchissait de la poursuite de ses créanciers ; les autres, en plus petit nombre, épousaient eux-mêmes quelque fille de qualité, dont les parents recevaient, pour prix de cette mésalliance, de quoi rétablir leurs affaires délabrées. […] C’est dans les provinces seulement qu’on voyait subsister quelques restes de la rudesse, de l’arrogance et de la tyrannie féodale ; c’est là que vivaient, dans des manoirs délabrés, ces gentilshommes d’ancienne famille, dont les aïeux s’étaient obscurément ruinés et fait tuer pour le service de l’état. […] C’était un gentilhomme limousin qui, un jour de spectacle, dans une querelle qu’il eut sur le théâtre avec les comédiens, étala tous les ridicules d’un sot et d’un hobereau.
Olier, les Renty, les Liancourt, les d’Albon, les Saint-Mesmes, les Brancas, les Fénelon, « cela ne sentait guère, — comme on disait alors, — son gentilhomme. »En présence de ces nouveaux scrupules, le prince de Condé hochait la tête. […] » Quelle contradiction, quelle incohérence, de faire vilainement sombrer dans l’hypocrisie le gentilhomme, criminel sans doute, mais crâne, dont le cynisme de grande allure paraît jurer avec la bassesse de l’hypocrisie? […] Patrocle, gentilhomme de grande vertu qui a laissé une bonne odeur de vie par ses bons exemples. » La date (1612) empêche que ce Patrocle ait été autre chose (juste père ou le frère aîné du trop crédule mari de la réelle Angélique; mais dans la Compagnie du Saint-Sacrement, les dynasties ne sont pas rares : plus d’une fois nous voyons les fils ou les cadets s’y enrôler après leurs pareils ou leurs aînés.
Molière pensait bien ainsi ; car il ne s’est point fait un scrupule de répéter la scène du Dépit amoureux, d’abord dans Le Tartuffe, ensuite dans Le Bourgeois gentilhomme : il l’a répétée, mais en la variant, puisqu’il ne pouvait l’embellir ; il s’est imité lui-même, mais en homme supérieur qui sort glorieusement de la plus redoutable des concurrences, de celle qui lui donne son propre génie pour adversaire.
Le Curieux impertinent, de Destouches ; l’Avare amoureux, de Daiguebere ; le Bourgeois Gentilhomme, & les Précieuses ridicules, de Moliere ; les Folies amoureuses, de Regnard.
Il fut Gentilhomme ordinaire, puis Chambellan de Gaston, Duc d’Orléans.
Le voici à-peu-près : Un riche laboureur épousa la fille d’un gentilhomme.
François Tristan l’Hermite, gentilhomme de Gaston, duc d’Orléans.
C’est dans la seconde scène du deuxième acte qu’Orgon prétend que Tartuffe est gentilhomme, et que Dorine répond : Oui, c’est lui qui le dit. […] Ces trois personnages affectent la piété la plus fervente ; ils assistent régulièrement à tous les offices, vont visiter les prisons, les hôpitaux ; enfin, à force de grimaces, ils sont bientôt dans une véritable odeur de sainteté ; les plus grandes familles s’estiment heureuses de les posséder un moment, et le peuple se précipite partout sur leurs pas : mais un gentilhomme, qui a été jadis l’amant d’une des deux pèlerines, et qui connaît Montufar pour un vrai chevalier d’industrie, arrive un beau jour à Séville, et il reconnaît à la porte d’une église ce misérable dont une multitude imbécile et fanatique baisait dévotement les habits. […] Montufar se permettant d’insulter le gentilhomme, celui-ci le frappe dans un mouvement de colère ; et aussitôt le peuple se soulève en criant au sacrilège. […] Vous vous êtes trompés, mes frères ; faites-moi le but de vos injures et de vos pierres, et tirez sur moi vos épées. » Cette conduite adroite de Montufar produit sur la multitude le même effet que la feinte humilité de Tartuffe sur Orgon ; l’engouement d’un peuple hébété redouble pour l’imposteur, et le trop véridique gentilhomme est obligé de se soustraire par la fuite à la vindicte publique.
Le Bourgeois gentilhomme joué à Chambord. […] Et pour cette représentation, donnée un jour en dehors des jours du théâtre, aucune recette n’est portée hors ligne, d’où il faut conclure que les bureaux ne furent pas ouverts, que le premier gentilhomme de la chambre du Roi disposa de la salle et que la troupe eu fut récompensée plus tard. […] Les divertissements tombèrent même dans un tel discrédit, que Lulli ayant été chargé, à la première représentation du Bourgeois gentilhomme à Chambord, du rôle du Mufti dans la cérémonie dont il avait fait la musique, les secrétaires du Roi refusèrent pour ce motif de le recevoir dans leur compagnie. […] Molière lui confia ceux de madame Pernelle du Tartuffe, de madame de Sotenville de George Dandin, de madame Jourdain du Bourgeois gentilhomme, de Philaminte des Femmes savantes, et de la comtesse dans La Comtesse d’Escarbagnas. […] Ces divertissements vraiment royaux, connus sous le nom des Plaisirs de l’Île enchantée, dont les mémoires du temps tracent les tableaux les plus brillants, et auxquels Voltaire a cru devoir consacrer plusieurs pages, durent une partie de leur charme aux efforts réunis du célèbre Vigarani, gentilhomme et architecte modenais, de Lulli, du président de Périgny, de Benserade et du duc de Saint-Aignan.
Larroumet nous donne une jolie page, les rapprochements constants, l’inévitable promiscuité, les couchées dans les auberges, quelquefois dans les granges, lui jeune et ardent, elle nullement farouche, mère à vingt ans d’une petite fille dont le père est M. de Modène, un gentilhomme qu’elle ne perd pas de vue sans doute, bien qu’il soit marié, mais dont elle est séparée pendant plusieurs années, car il vit réfugié en Espagne. […] Elle avait été organisée par Guichard, gentilhomme ordinaire de Son Altesse Royale, dont les ouvrages, dit de Visé, ont fait du bruit et qui a beaucoup d’invention. […] Ce gentilhomme était propriétaire ou principal locataire du jeu de paume de la Bouteille, rue Mazarine, en face de la rue Guénégaud : les trois associés firent construire là un théâtre. […] C’était Lulli qui avait fait la musique de ses pièces à divertissements, depuis la Princesse d’Élide jusqu’au Bourgeois gentilhomme, la dernière à laquelle le Florentin ait collaboré. […] Elle note en même temps avec soin les motifs allégués par le curé de Saint-Eustache à l’appui de son refus : le défunt est décédé sans avoir reçu le sacrement de confession, dans un temps où il venait de représenter la comédie ; mais elle ajoute aussitôt « qu’il est mort dans les sentiments d’un bon chrétien, ainsi qu’il en a témoigné en présence de deux dames religieuses demeurant en la même maison, d’un gentilhomme nommé M.
Mais si Pourceaugnac, Le Bourgeois gentilhomme et Le Malade imaginaire, avec leurs purs ébats et leur délirante ébriété, nous rappellent le rire inextinguible des dieux homériques, le lyrisme exhilarant d’Aristophane ou de Rabelais, et les étincelantes fantaisies de Shakespeare, il demeure avant tout peintre de la nature humaine dans le sens le plus large et le plus libre. […] Jourdain, sa liaison se compose de vanité : il ne vise qu’à se donner ainsi l’air d’un gentilhomme. […] Gentilhomme pauvre, mais qui ne fera jamais un trafic de son blason, il aime la fille d’un riche roturier ; mais je suis certain qu’il n’a pas même pensé à sa dot : il n’a souci que de la personne, et n’est séduit que par son mérite. […] Les maréchaux formaient un tribunal d’honneur auquel était réservée la connaissance des affaires entre gentilshommes ou officiers. […] Louis XIV eut ses marquis, remplacés, sous Louis XV, par les roués (Richelieu, Tilly, Lauzun) ; sous Louis XVI, par les freluquets ou les beaux, jeunes gens de la bourgeoisie qui copiaient les façons des gentilshommes.