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95. (1861) Molière (Corneille, Racine et Molière) pp. 309-514

Les maladresses d’un paysan ou d’un petit bourgeois sont chose commune et de peu d’intérêt; mais les maladresses d’un courtisan, sans être nécessairement beaucoup plus rares, sont bien autrement amusantes. […] Molière n’était qu’un petit bourgeois facile à réduire au silence. […] Sganarelle, le plus jeune, est un bourgeois grossier et borné, qui tient Isabelle strictement renfermée. […] Georges Dandin est un bourgeois enrichi et vaniteux qui s’allie à la noblesse : peu lui importe que sa femme ait des vertus; ce sont des titres qu’il lui faut. […] Aujourd’hui nous attachons à ces deux mots un sens plus moral et plus bourgeois.

96. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVII. Conclusion » pp. 339-351

Scaramouche étant resté absent l’espace de trois années, de 1667 à 1670, sa rentrée attira un tel concours de monde que, les jours où Molière jouait, la salle était déserte ; et ce n’est que Le Bourgeois gentilhomme qui ramena le public.

97. (1856) Molière à la Comédie-Française (Revue des deux mondes) pp. 899-914

Le personnage à qui l’auteur a confié la défense du bon sens, Chrysale, au lieu de prendre au sérieux les paroles placées dans sa bouche, semble effrayé de sa hardiesse, et pour atténuer, pour conjurer le danger de son rôle, il exagère par l’accent le prosaïsme bourgeois de ses sentiments. […] En parlant de l’Avare et de Don Juan, du Bourgeois gentilhomme et du Malade imaginaire, je serais forcé de répéter à peu près les observations que j’ai présentées en parlant de l’École des femmes et du Misanthrope, de Tartuffe et des Femmes savantes.

98. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Il se met à la tête d’une troupe de comédiens bourgeois appelée l’Illustre Théâtre. […] Le Bourgeois gentilhomme joué à Chambord. […] Le jeune Poquelin se mit à la tête d’une de ces réunions de comédiens bourgeois dont Paris comptait alors un assez grand nombre. […] Sans doute on retrouve dans Sganarelle, ou le Cocu imaginaire quelques traits assez fidèles des mœurs des petits bourgeois de ce temps, qui, aimant bien leurs femmes, les battaient mieux encore. […] Aux cris des Zoïles effrayés de la vogue de Molière se joignirent les plaintes d’un pauvre bourgeois dont le dépit n’avait pas la même cause.

99. (1819) Notices des œuvres de Molière (I) : L’Étourdi ; Le Dépit amoureux pp. 171-334

Molière pensait bien ainsi ; car il ne s’est point fait un scrupule de répéter la scène du Dépit amoureux, d’abord dans Le Tartuffe, ensuite dans Le Bourgeois gentilhomme : il l’a répétée, mais en la variant, puisqu’il ne pouvait l’embellir ; il s’est imité lui-même, mais en homme supérieur qui sort glorieusement de la plus redoutable des concurrences, de celle qui lui donne son propre génie pour adversaire.

100. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IV. Du Choix du Titre. » pp. 94-102

Le Curieux impertinent, de Destouches ; l’Avare amoureux, de Daiguebere ; le Bourgeois Gentilhomme, & les Précieuses ridicules, de Moliere ; les Folies amoureuses, de Regnard.

101.

Ainsi Orgon est riche ; il est gentilhomme ; il est de la cour : pourquoi donc lui faire porter un |habit bourgeois, et non un habit de cour, comme à son frère ou à son fils ? […] Quoique Paris fût désert, il s’y « est trouvé assez de personnes, dit François Donneau, dans l’Avis au lecteur de La Cocue imaginaire, pour remplir plus de quarante fois les loges et le théâtre du Petit-Bourbon, et assez de bourgeois pour remplir autant de fois le parterre ». […] L’événement contemporain qui fournit à Molière l’allusion la plus piquante, est peut-être encore cette visite d’un ambassadeur turc à la Cour de France, dont il aurait tiré prétexte pour imaginer la Cérémonie du Bourgeois gentilhomme. […] Les Français ont même pris l’habitude, en souvenir de Molière et du Bourgeois gentilhomme, de le désigner sous le nom de langue Sabir. […] L’amusante naïveté de sa forme s’augmente encore, pour nous, du réjouissant souvenir qui la rattache à notre Molière ; et je ne sais rien de plus drôle que d’entendre de graves Arabes nous réciter, sans le savoir, des passages du Bourgeois gentilhomme.

102. (1882) L’Arnolphe de Molière pp. 1-98

Nous qui ne sommes que clercs ou bourgeois, pour quinze sols nous irons au parterre ; les loges sont de trois livres ; les belles galeries dorées de cent dix sols ; les seigneurs du bel air donnent un demi-louis pour être sur le théâtre. […] Cependant le brouhaha qui suit d’ordinaire le lever du rideau, compliqué de quintes de toux, de crachements, de mouchements et de remuements de chaises, ce brouhaha s’apaise, et derrière les marquis, là-bas, paraissent deux bourgeois, ce semble, de mise assez cossue, qui s’avancent sur le devant de la scène ; et l’approche du premier excite dans la salle ce léger mouvement d’aise et cet épanouissement de physionomie qui signifient clairement : « Ah ! […] La bonne et savoureuse langue, grasse et fondante, toute bourgeoise et toute populaire, et comme dit le patron Rabelais, dont nulle part Molière ne s’est tant rapproché, légère au pourchas et hardie à la rencontre ! […] Dans la transparence de sa naïveté vous voyez toutes les qualités aimables de nos filles : elle est compatissante, témoin son affliction de la mort du petit chat ; elle est civile, rappelez-vous ses belles révérences ; elle est enfin docile, ordonnée, travailleuse ; avec cela, une petite pointe de coquetterie : c’est sa grosse passion : elle aime à être brave et leste ; ce sera bien la plus délicieuse petite bourgeoise !

103. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XI. Des Pieces intriguées par un Valet. » pp. 125-134

La petite bourgeoise intéresse sa servante ; la femme de condition, la plus chérie de ses femmes ; le Duc, son valet-de-chambre ; le Prince, celui qui porte le titre de son ami : alors ces intriguants en chef font agir les baigneurs, les marchandes de modes, les maîtres à chanter, à danser, &c.

104. (1816) Molière et les deux Thalies, dialogue en vers pp. 3-13

Par votre ton bourgeois croyez-vous encor plaire ?

105. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXV. » pp. 500-533

lisons la scene IX, acte III du Bourgeois Gentilhomme : l’Auteur a non seulement imité les caprices que sa femme lui faisoit essuyer, les brouilleries, les tendres dépits, les raccommodements qui s’ensuivoient ; il y copie la taille, la façon de parler, la conversation, les manieres, les traits d’une épouse qu’il adora toujours, & qui, par des infidélités redoublées, sembla s’étudier à prouver que le génie n’est pas le mérite le plus estimé des femmes, ou du moins le plus propre à les fixer. […] Qui nous assurera que Moliere n’ait pas entendu dire à quelque George Dandin, mes enfants seront gentilshommes, mais je serai cocu ; à quelque Précieuse ridicule, apportez-nous le Conseiller des Graces ; à plus d’un Tartufe, je tâte cet habit, l’étoffe en est moelleuse ; à quelque Malade imaginaire, mon Médecin m’a ordonné de faire dans ma chambre quatre allées & quatre venues, mais j’ai oublié de lui demander si c’est en long ou en large ; à quelque Bourgeois, je vis de bonne soupe, & non pas de bons mots 53 ; à quelque Dame de château, apportez des bougies dans mes flambeaux d’argent 54, &c.

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