. — Injuste accusation du duc de Saint-Simon à ce sujet.
Il ne s’ensuit pas de ce que j’ai dit, qu’il vaille mieux avoir fait le Malade imaginaire que les Femmes savantes ; mais je soutiens que si l’Auteur s’étoit donné autant de soins pour la premiere de ces pieces que pour la derniere, elle lui auroit fait plus d’honneur, & qu’à mérite égal le choix du sujet lui auroit valu la préférence.
Le Roi donna lui-même le sujet : il voulut que deux Princes rivaux se disputassent, par des fêtes galantes, le cœur d’une Princesse.
Il a fait voir par l’Ouvrage qu’il a donné après celui-ci, qu’il est capable de faire mieux ; et qu’il est le maître de se donner de la réputation quand il choisira de bons sujets. […] L’Auteur s’est imaginé qu’il n’était bon qu’à dire des plaisanteries, puisqu’il le fait encore parler sur le même ton dans les pages suivantes, dans des aventures, qui sont même épisodiques à son sujet.
Les paroles, les gestes les plus expressifs, la musique la plus analogue au sujet, s’emparoient de l’ame du spectateur. […] Comme une partie de l’acte suivant se passe dans l’appartement d’Angélique, & que les machinistes, en changeant la décoration, laissent sous les yeux du spectateur la table sur laquelle on a mis la lettre, il faut bien qu’on vienne la prendre dans l’entr’acte, puisqu’elle doit faire le sujet de l’acte suivant.
Quant à Guy Patin, dont on était en droit d’attendre sur ce sujet quelques boutades, en sa double qualité de médecin5 et de libre penseur, il n’en dit pas le moindre mot, et n’enregistre même pas les épigrammes de Sganarelle contre le vin émétique, et pourtant, six mois plus tard, il saluait de sa verve railleuse l’apparition de l’Amour médecin, qu’il nomme, par une singulière distraction, l’Amour malade. […] Ce sujet conserva si longtemps la vogue, que Rosimont (qu’il ne faut pas confondre avec Dorimon) le traita encore en 1669.
Je n’espère pas me tirer de cet embarras que redouble encore la banalité de mon sujet. […] Vous les reconnaîtrez à leur embonpoint qui marque une vocation manquée ; car, suivant un poète célèbre3 : La vertu seule est grasse, et les mauvais sujets Ont beau manger et boire, ils n’engraissent jamais ; Les autres courent le monde, cherchant ce qu’ils appellent de l’expérience, croient en amasser beaucoup, reviennent chez eux, se marient, et sont tout surpris de rencontrer dans leur femme une variété mauvaise ou bonne que rien ne leur avait fait prévoir. […] C’est ce que pense don Juan, qui poursuivant son idéal et ne le rencontrant nulle part, va de l’une à l’autre, et non content d’abandonner les sujets de ses expériences, leur reproche encore de n’être pas celle qu’il cherche. […] Elle l’égayera par ses saillies qui n’auront pas pour sujet la chronique scandaleuse du monde, mais qui partiront de son enjouement naturel et de sa satisfaction.
Mais Racine et Boileau avaient déjà attiré les regards de Louis XIV et l’attention des connaisseurs ; le premier par son ode aux Nymphes de la Seine, au sujet du mariage du roi ; l’autre, par sa première satire, où il invite la munificence royale à se répandre sur les poètes.
Le moraliste ayant des points de contact avec le psychologue, je me permettrai d’exprimer quelques idées à ce sujet. […] Ce n’est pas que, dans les représentations du vice et de l’extravagance, la sagesse et la raison ne trouvent aussi à se caser ; mais ce doit être seulement comme contrastes et non comme sujets du tableau. […] Revenons maintenant à notre sujet. […] N’y eut-il que ces vers admirables à glaner dans sa traduction libre de la comédie de Plaute, qu’il n’en faudrait pas davantage pour se féliciter que, malgré la nature scabreuse du sujet, Molière s’en soit emparé. […] Les grands travers d’esprit inconscients qui fourmillent dans le monde, de même que les petits travers auxquels nous sommes tous sans exception plus ou moins sujets, produisent des délires de même nature qui parfois sont aussi accentués que ceux de Belise.
Un Auteur qui veut traiter un caractere permanent, peut même essayer ses forces & la bonté de son sujet dans une esquisse, avant que d’entreprendre le portrait en grand.