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116. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIX & dernier. Des causes de la décadence du Théâtre, & des moyens de le faire refleurir. » pp. 480-499

Si vous voulez rire, nous prétendons que vous pleuriez ; desirez-vous pleurer, nous vous forcerons à rire. […] Mais nous avons tout lieu d’espérer que la derniere de ces révolutions s’opérera bientôt : à la Cour, Jupiter, Hébé, les Graces veulent rire à la comédie, & pleurer à la tragédie : à la Ville les drames ont désormais besoin de s’étayer de la musique & de toutes les contorsions d’une pantomime ridicule.

117. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE V. L’Éducation des Femmes. » pp. 83-102

Quel beau miroir, où les femmes furent forcées de contempler leurs propres ridicules et d’en rire jusqu’aux larmes ! […]   J’en ris pour plus de dix pistoles. […]   u mauvais goût public la belle y fait la guerre,   Plaint Pradon, opprimé des sifflets du parterre,   Rit des vains amateurs du grec et du latin,   Dans la balance met Aristote et Cotin ;   Puis, d’une main encor plus fine et plus habile.

118. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXV. » pp. 500-533

Pantalon est enchanté de l’opéra ; il rit aux éclats & baisse en effet la tête sur son clavessin pour accompagner sa fille. […] Il est très plaisant de voir rire monsieur Thomas Diafoirus, lorsque Cléante parle de son rival & qu’Angélique répond, Ah ! […] & vois-tu rien de plus impertinent que des femmes qui rient à tout propos ? […] Les uns ne savent que copier ses détails les plus minutieux ; les autres ne la voient qu’en grand, ou montée sur des échasses : ceux-ci ne savent peindre que ses caprices & les monstres qu’elle enfante ; ceux-là ne la saisissent dans aucune de ses parties, ou ne peignent que les plus opposées au genre qu’ils ont pris ; tels sont les peintres, qui donnent un beau teint à Mars & des traits mâles à Vénus ; les comédiens qui jouent le rôle d’Achille avec les minauderies d’un fat, ou les emportements d’un petit-maître ; & le rôle d’un amant aimable avec les contorsions d’un démoniaque ; les poëtes tragiques qui font rire, & les comiques qui font pleurer.

119. (1892) Vie de J.-B. P. Molière : Histoire de son théâtre et de sa troupe pp. 2-405

Non pas ; on riait aux bons endroits ; on les soulignait par ces petits murmures de satisfaction qui courent de l’orchestre aux loges, et qui ne peuvent avoir été concertés d’avance… Le Tartuffe ! […] Et vois-tu rien de plus impertinent que les femmes qui rient à tout propos ? […] C’est par cette secrète et intime souffrance qu’il entrait sans doute dans le personnage d’Arnolphe et qu’il exprimait, comme s’il les tirait de son propre cœur, ces angoisses divertissantes et ces larmes qui font rire. […] Un sermon touche l’âme et jamais ne fait rire ; De qui croit le contraire on doit se défier ; Et qui veut qu’on en rie en a ri le premier. […] Je voudrais savoir de quelle façon on pourrait l’ajuster pour le rendre plaisant ; et si, quand on le bernerait sur un théâtre, il serait assez heureux pour faire rire le monde.

120. (1812) Essai sur la comédie, suivi d’analyses du Misanthrope et du Tartuffe pp. 4-32

Il montra d’abord indifféremment tous les objets que lui offrait la société presque naissante ; il dut même, dans son origine, exposer aux yeux des spectateurs les infirmités de quelques personnages connus, et, par une imitation bouffonne, exciter le rire. […] Alors, plus régulière dans sa marche, la comédie s’attacha uniquement à scruter profondément notre cœur, à en sonder les replis, et à provoquer le rire par la peinture exacte et véridique des vices, des ridicules qui influent sur toute notre existence, nous font envisager les objets sous un point de vue absolument faux, égarent notre jugement, et nous empêchent souvent de jouir du bonheur que le sort nous avait accordé. […] Celui que ses fautes ne peuvent faire rougir, redoutera toujours d’être l’objet du rire universel.

121. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [34, p. 62-63 ] »

Molière se mit à rire de cette saillie, et l’employa ensuite fort à propos.

122. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [72, p. 106-108] »

Cette Laforest était sa servante ; elle était dans la coulisse opposée, d’où elle ne pouvait passer à travers le théâtre pour arrêter l’âne ; et elle riait de tout son cœur de voir son maître renversé sur le derrière de cet animal, tant il mettait de force à tirer son licou pour le retenir.

123. (1801) Moliérana « Vie de Molière »

126 Tout, dans cette pièce, semble annoncer qu’elle est moins faite pour amuser les gens délicats que pour faire rire la multitude ; mais une sorte d’intérêt né du sujet, et une plaisanterie gaie compensent ce qui s’y présente de défectueux. […] Comédie imitée de Plaute et supérieure à son modèle : respecte moins les bienséances que le Tartuffe, et faire rire davantage.

124. (1746) Notices des pièces de Molière (1661-1665) [Histoire du théâtre français, tome IX] pp. -369

Pour premier et charmant régale, Avant cette chère royale, Où raisonna maint violon, Dans une salle ou beau salon, Pour divertir seigneurs et dames, On joua l’École des femmes, Qui fit rire Leurs Majestés, Jusqu’à s’en tenir les côtés ; Pièce aucunement instructive, Et tout à fait récréative, Pièce, dont Molière est auteur ; Et même principal acteur : Pièce qu’en plusieurs lieux on fronde, Mais où pourtant va tant de monde, Que jamais sujet important, Pour le voir n’en attira tant. Quant à moi, ce que j’en puis dire, C’est que pour extrêmement rire, Faut voir avec attention, Cette représentation, Qui peut dans son genre comique, Charmer le plus mélancolique, Surtout par les simplicités, Ou plaisantes naïvetés, D’Agnès, d’Alain ; et de Georgette, Maîtresse, valet et soubrette ; Voilà, dès le commencement, Quel fut mon propre sentiment, Sans être pourtant adversaire, De ceux qui sont d’avis contraire, Soit gens d’esprit, soit innocents, Car chacun abonde en son sens. […] ***       Que tu ris agréablement ! […] Mais qui peut supporter la hardiesse d’un farceur qui fait plaisanterie de la religion, qui tient école du libertinage, et qui rend la majesté de Dieu le jouet d’un maître et d’un valet de théâtre, d’un athée qui s’en rit, et d’un valet plus impie que son maître, qui en fait rire les autres. » L’auteur continue tout son discours sur le même ton, et finit par implorer l’autorité du roi et celle de la justice contre la comédie de Molière. […] Ce n’est pas mon dessein d’examiner maintenant si tout cela pouvait être mieux, et si tous ceux qui s’y sont divertis ont ri selon les règles. » a.

125. (1800) Des comiques d’un ordre inférieur dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VII) pp. 294-331

On rira toujours de la scène où le marchand drapier confond sans cesse son drap et ses moutons; et celle où Patelin, à force de patelinage (car son nom est devenu celui d’un caractère) vient à bout, d’attraper une pièce de drap, sans la payer, à un vieux marchand avare et retors, est menée avec toute l’adresse possible. […] Ce n’est ni la raison supérieure, ni l’excellente morale, ni l’esprit d’observation, ni l’éloquence de style qu’on admire dans le Misanthrope, dans le Tartufe, les Femmes savantes : ses situations sont moins fortes, mais elles sont comiques; et ce qui le caractérise surtout, c’est une gaieté soutenue qui lui est particulière, un fonds inépuisable de saillies, de traits plaisants : il ne fait pas souvent penser, mais il fait toujours rire. […] Après le Joueur, il faut placer le Légataire : il y a même des gens d’esprit et de goût qui préfèrent cette dernière pièce à toutes celles de Regnard : c’est peut-être le chef-d’œuvre de la gaieté comique, j’entends de celle qui se borne à faire rire. […] Jamais rien n’a fait plus rire au théâtre que ce testament.

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