Il n’y a pas une de ses pièces où ce défaut ne soit mis en scène : « C’est l’amour propre qui a engendré les précieuses affectant un jargon inintelligible, et les savantes engouées de sciences qu’elles ne comprennent pas ; les pédants si orgueilleux de leur érudition indigeste, et les beaux esprits si vains de leurs fadaises rimées ; le manant qui épouse la fille d’un gentilhomme, et le bourgeois qui aspire à passer pour gentilhomme lui-même ; les prudes qui affichent une sévérité outrée, et les coquettes qui étalent les conquêtes faites par leurs charmes ; les marquis qui se vantent des dons de la nature, des bontés du roi et des faveurs des dames ; et ce misanthrope lui-même dont il faut estimer la vertu, mais dont l’orgueil bourru fronde la vanité de tous les autres154. » Si l’amour propre est le défaut le plus universel, il n’est pas le seul qui règne dans la bonne société : Molière a frappé avec non moins d’autorité sur l’habitude qu’ont les gens riches ou inoccupés, de médire sans cesse du prochain, et de trouver à blâmer partout155.
Je me trompe peut-être, mais j’espère, à cette heure, qu’un vent rafraîchissant va souffler, et que, pour peu que les esprits s’apaisent, cette terre française est encore assez riche, généreuse et pleine de suc nourricier pour faire pousser et lever une génération, une moisson d’hommes, une légion nouvelle de penseurs. […] Il est honnête, sain de corps et d’esprit, riche et facile à l’attendrissement. […] Soulié, les parents de Molière jusque dans les vêtements dont ils se vêtaient, on a compté les bijoux et les collerettes de Marie Cressé, on a pénétré dans ce riche intérieur de marchand tapissier, on a, pour ainsi dire, touché le décor qui encadrait la vie quotidienne de ces honnêtes bourgeois parisiens, enrichis par leur constant labeur et leur vieille probité. […] En 1668, le vieux tapissier Poquelin, qui jadis tenait, à l’enseigne des Singes, une riche boutique de tapisserie, « à verdures et à personnages », Poquelin le père était ruiné. […] Riches, faites faire des statues à sa gloire.
Alors, pleinement éveillé et riche des fruits de ce travail qui avait été pour lui un plaisir, il écrivait, non pas négligemment et à l’aventure, mais avec un soin curieux, une attention soutenue, un goût délicat et plein de scrupules, ces fables immortelles qu’on ne se lasse pas de relire, aliment et parure de la pensée.
Ceux qui ont laissé sur la terre déplus riches monuments n’en sont pas plus à couvert de la justice de Dieu ; ni les beaux vers ni les beaux chants ne servent de rien devant lui ; et il n’épargnera pas ceux qui, en quelque manière que ce soit, auront entretenu la convoitise. » Molière poussant au désordre, publiquement, devant sa mère, sa femme, et toute la cour, le roi de France, le représentant de Dieu sur la terre, et attirant ainsi les colères célestes sur le royaume !
Chrysale est un honnête bourgeois, riche d’un patrimoine acquis peut-être par le commerce, qui, restant indifférent, étranger même au progrès de la civilisation, a conservé toute la simplicité des opinions anciennes et des mœurs paternelles : du reste, raisonnable, mais borné, ayant des volontés, mais privé de la force nécessaire pour les faire prévaloir, il est le type de ces bons maris, qui ont laissé prendre à leurs femmes un empire dont ils enragent ; qui, cachant leur faiblesse sous le nom d’amour du repos, endurent un malheur de toute la vie pour éviter une querelle d’un quart d’heure ; mais qui se vengent de la tyrannie qu’ils subissent, en querellant ceux qui sont de leur avis, en les contraignant quand ils ne s’opposent à rien, et en leur ordonnant impérieusement ce qu’ils ont envie de faire. Clitandre est un jeune gentilhomme, qui n’est pas d’une assez haute naissance pour se mésallier en épousant la fille d’un roturier, et qui a trop peu de bien pour ne pas désirer de faire un riche mariage, mais qui ne fait pas de son nom un trafic, et de sa recherche une spéculation ; qui aime Henriette bien moins pour sa richesse, que pour ses vertus, ses charmes et ses grâces, et qui se montre désintéressé, en offrant de partager sa fortune avec une famille qu’il croit entièrement dépouillée de la sienne : d’ailleurs, plein d’honneur et de loyauté, sensible au mérite parce qu’il en a lui-même, trop naturel pour ne pas être ennemi de l’affectation, et trop franc pour cacher un sentiment qui peut lui nuire, il est le modèle de ces jeunes gens raisonnables sans froid calcul, sensibles sans exaltation romanesque ; et généreux sans faste, comme sans effort, dont je voudrais pouvoir dire que la société abonde, mais que certainement toutes les mères devraient vouloir pour gendres, ainsi que leurs filles pour maris.
Le Pièmontais a de la fermeté : c’est une étoffe qui peut supporter cette riche broderie, nommée le gouvernement des deux Chambres. » Parmi ses livres, il y a un volume des classiques latins percé d’un trou jusqu’à la moitié, avec cette note autographe, qui porte tout à fait le cachet de son originalité. […] Ne pas oublier que probablement cette scène serait bien meilleure, si Molière, homme riche comme Regnard, l’eût écrite dans ses terres, sans se soucier du lieu, ou du temps où elle serait jouée. […] 2º La vanité de George Dandin désappointée par les mépris de sa nouvelle société, mépris qui seraient intolérables même à une vanité ordinaire, et Georges Dandin n’en a pas encore fait le sacrifice, il joue encore le digne et l’heureux auprès du bedeau et du notaire de son village, s’il reste riche Paysan ; auprès d’un provincial et d’un marchand de la Rue Saint-Denis, si on le fait monter au rang de Financier. […] Dandin très riche, n’a dans ce moment que 150 louis de disponibles, on le force à donner toute cette somme, c’est-à-dire non pas 149 louis, mais les 150.
faut-il que les pauvres donnent toujours aux riches ?
Si tous ceux qui me doivent étoient aussi exacts que moi à payer leurs dettes, je serois beaucoup plus riche que je ne suis ; mais je ne sais point retenir le bien d’autrui.
Au temps de Molière, on spéculait peut-être moins; la mine théâtrale, encore intacte, était si riche!
Le lecteur poursuit : telle est la gloire que le héros s’est acquise qu’il a reçu la visite des plus riches personnages et des plus belles dames de la ville ; une d’elles s’est éprise d’un violent amour pour lui et veut l’épouser.