Heureuse également, en des liens si doux, De perdre ou de passer la vie !
Il avait alors près de quinze ans ; mais les leçons d’excellents maîtres, son aptitude naturelle, et surtout sa laborieuse application, aplanirent tous les obstacles, et bientôt le temps perdu fut réparé, Poquelin eut pour camarades de classe des enfants qui furent depuis des hommes célèbres. […] Ces ouvrages sont perdus, mais on retrouve quelques traces des deux derniers dans Le Médecin malgré lui, et dans George Dandin. […] Vous trouverez dans le poète latin l’idée du fameux sans dot ; Euclion perd aussi sa cassette, et se livre au plus affreux désespoir ; on séduit sa fille ; il prend l’amant pour le voleur, et cette méprise amène des quiproquo comme dans le poète français ; mais où est le maître Jacques de Molière, où est la situation si morale de ce père qui fait l’usure avec son propre fils ? […] Cependant, quelque ferme qu’il fût dans sa résolution, au bout de trente années de retraite et au moment où le public, qui le regrettait tous les jours, n’espérait plus le revoir, il reparut le 10 avril 1720, par le rôle de Cinna, en présence du duc d’Orléans, régent ; et l’on vit avec surprise que cet homme étonnant n’avait rien perdu des talents qui l’avaient fait si justement admirer de la génération précédente6. […] Sa taille était avantageuse et bien prise ; sa figure avait ce caractère de beauté mâle qui convient à l’homme : elle prenait un air imposant et fier, tendre et passionné, selon les différents personnages qu’il avait à représenter ; sa voix était sonore, juste et flexible ; sa prononciation facile, nette et d’une grande précision ; ses tons énergiques et variés ; ses inflexions ajoutaient souvent au sens des vers qu’il récitait : on leur trouvait dans sa bouche des beautés qu’ils perdaient quelquefois à la lecture ; son silence, ses regards, les diverses passions qui se succédaient sur son visage, ses attitudes, ses gestes ménagés avec art, complétaient l’effet infaillible de son débit puisé dans les entrailles de la nature.
Les Auteurs Comiques, et les Comédiens ne sont point amis de l’Auteur ; il ne perd point l’occasion de les attaquer. […] L’Auteur fait faire ici un personnage à Molière d’homme désintéressé et juste ; mais il me semble qu’il pouvait dissuader le jeune étourdi de prendre sa profession, sans lui en faire voir le ridicule et l’indignité : C’est, dit-il, la dernière ressource de ceux qui ne sauraient mieux faire, ou des libertins qui veulent se soustraire au travail : c’est enfoncer le poignard dans le cœur de vos parents, de monter sur le Théâtre : je me suis toujours reproché d’avoir donné ce déplaisir à ma famille : c’est la plus triste situation que d’être l’esclave des fantaisies des Grands Seigneurs ; le reste du monde nous regarde comme des gens perdus, et nous méprise.
Je m’en vais passer tout à l’heure dans cette petite rue écartée qui mène au grand couvent ; mais, pour moi, je vous déclare que ce n’est pas moi qui me veux battre : le ciel m’en défend la pensée, et, si vous m’attaquez, nous verrons ce qui en arrivera. » - Je conçois qu’on ait été obligé de faire, en 1677, des retranchements aussi fâcheux ; mais ce qui me paraît le tort grave et personnel du traducteur, c’est d’avoir rempli ces vides si regrettables par des inventions communes et propres seulement à faire perdre de vue le dessein et la haute pensée de l’auteur. […] Remarquons, en passant, que, par suite de l’ancienne habitude de jouer la pièce en vers, les acteurs ont eu à surmonter, en cette circonstance, une difficulté qui se présente bien rarement ; ils n’ont pas eu seulement, comme toujours, des rôles à composer et à apprendre : ils ont eu, ce qui est peut-être plus difficile, des habitudes à perdre et des rôles à oublier.
La gloire du maître de la comédie n’a, du reste, rien perdu à ces investigations, et l’admiration qu’il inspire n’a fait que s’accroître, à mesure qu’on a pénétré la plupart de ses secrets.
Je ne sais si je m’abuse, mais il me semble que sa constante préoccupation a été de les ramener à la nature, de leur montrer tout ce qu’elles ont à gagner à être vraies, sensées, indulgentes et bonnes, éclairées sans pédantisme, gracieuses sans afféterie, et tout ce qu’elles ont à perdre, au contraire, à usurper un rôle qui ne saurait leur appartenir et qui est si contraire, d’ailleurs, à la douce et bienfaisante influence qu’elles peuvent et doivent exercer, influence d’autant plus irrésistible qu’elle est plus modeste et plus ménagée. […] Comme elle rit de bon cœur au nez de son maître, à qui elle est attachée pourtant, mais dont le grotesque accoutrement et la manie gentilhommière lui font perdre le respect.
Eschine, touché des malheurs de son frere, se charge pour lui d’enlever l’esclave, & la conduit dans sa maison, ce qui donne lieu à tout le monde de croire que c’est pour son compte, sur-tout à Déméa, qui rencontre Micio, l’accable de reproches, lui dit que son indulgence perd Eschine, & l’exhorte à se modeler sur lui, qui, en traitant Ctésiphon avec sévérité, en a fait un jeune homme sage & prudent. […] une femme sans bien, une chanteuse chez lui, une maison de dépense & de bruit, un jeune homme perdu de luxe, un vieillard qui radote !
Tout est perdu, votre fils est mort. […] Laissez là cette galere, & songez que le temps presse, & que vous courez risque de perdre votre fils. […] A quoi bon perdre ici davantage notre temps ? […] Géta, tu m’as perdu par tes fourberies.
s’écrie l’enfant, ne gagez pas, vous perdriez ! […] Si ce genre triomphe, tout est perdu ; nous allons devenir l’opprobre des humains ! […] Mais il a perdu le sens, il se ravale à lui reprocher l’argent qu’il a dépensé pour elle : Horace vous rendra tout, fait-elle. […] Aucune âme ne perd à être éclairée. […] Il se fierait, pour que cela ne passât pas les bornes, à ce bon sens de race que je rappelais à l’occasion d’Henriette, à ce sens exquis de la mesure et du goût, qui est inné chez nos Françaises, et, aussi, à cette galanterie respectueuse, la galanterie du galant homme, qui ne se perd chez nous qu’à cause justement de la séparation des sexes, cette séparation contraignant l’homme à se gâcher l’esprit et le cœur dans la société des filles de plaisir. — J’ai pu, pour ma part, m’assurer plus d’une fois que cette forte éducation, cette liberté des jeunes filles anglo-saxonnes, savent en faire des créatures admirablement loyales, point du tout pédantes, nullement dénuées de charme féminin ; et je me suis pris à penser que nos jeunes filles françaises y puiseraient très probablement des qualités inattendues, propres à ranimer ces choses qui vont disparaissant : la conversation dans le salon, le conseil au foyer.
Il semble que le sens de son théâtre se perde avec eux. […] Molière s’y jette à corps perdu. […] Au moyen de ces deux sortes de documents exhumés des archives des principales villes du Midi, nous pouvons suivre la troupe, ou du moins ne pas la perdre de vue trop longtemps. […] C’est un homme qui n’a rien à perdre, et les comédiens ne me l’ont déchaîné que pour m’engager à une sotte guerre. »On a souvent blâmé Molière d’avoir nommé Boursault. […] Il ne perdit point une occasion de faire faire à sa pièce un pas vers la publicité ; il déploya une opiniâtreté inouïe ; on assiste à une stratégie vraiment curieuse, qui dure pendant près de cinq années avec des succès passagers et des revers, mais sans que l’auteur faiblisse un instant, sans qu’il perde jamais de vue le but qu’il poursuit.