L’inefficacité complète des moyens violents, et la puissance des bons procédés pour arriver au cœur de l’homme ainsi que pour l’amener à se comporter comme on le désire, principe sur lequel Molière insiste toujours, se trouvent encore plus spécialement mentionnées dans le Malade imaginaire. […] C’est ainsi que l’imagination engendre les idées délirantes chez les passionnés, soit malades du cerveau, soit en santé. […] Comme chez les fous malades, l’évidence matérielle est impuissante chez Belise à rectifier ses erreurs passionnées, à la ramener à la vérité, à la raison, parce que rien n’a autant de puissance sur l’esprit que ce que lui inspire sa manière de sentir. […] Toute la différence qui existe entre le fou en santé et le fou malade est que les passions qui aveuglent le premier appartiennent à son caractère naturel et sont dues à l’activité normale de son cerveau, tandis que les passions qui dominent et aveuglent le second n’appartiennent pas à son caractère, elles sont suggérées par une activité cérébrale pathologique. […] Il en est absolument de même chez le fou malade.
Nos théâtres donnent ordinairement L’Avare, Le Malade imaginaire et Tartuffe. […] Le Malade imaginaire prend la vogue de plus en plus depuis que les membres du théâtre de la cour de Meiningen montent cette comédie pendant les tournées qu’ils font par toute l’Allemagne. […] La troupe ducale joue Le Malade imaginaire, dans l’adaptation de la Comédie-Française, et grâce à elle, cette adaptation a pris possession de presque toute l’Allemagne. […] Tartuffe tient le premier rang au point de vue de l’ancienneté : cette pièce fut donnée pour la première fois le 20 mai 1838 ; L’Avare, le 26 juin 1861 ; Le Malade imaginaire, le 3 mai 1870, Les Femmes savantes, le 10 février 1871 ; Le Médecin malgré lui, le 5 mai 1871 ; Le Bourgeois gentilhomme, le 3 mai 1873. […] Quant aux pauvres malades qu’il prend tant de plaisir à railler, comme les visionnaires mêmes sont en cela fort à plaindre, il me semble qu’il les devait laisser là, s’il n’en voulait avoir compassion.
Il n’est pas hors de l’Eglise qu’un homme de livrée court après lui, le joint, lui demande en riant s’il n’a point la pantoufle de Monseigneur : Ménalque lui montre la sienne, & lui dit : voilà toutes les pantoufles que j’ai sur moi : il se fouille néanmoins, & tire celle de l’Evêque de ** qu’il vient de quitter, qu’il a trouvé malade auprès de son feu, & dont, avant que de prendre congé de lui, il a ramassé la pantoufle, comme un de ses gants qui étoit à terre. […] On sait encore que Géronte tombe en léthargie au moment où il a mandé le Notaire ; que Crispin se jette dans un fauteuil avec tout l’attirail d’un malade à l’agonie, & dicte un testament par lequel il laisse à son maître Eraste tous les biens de Géronte, à l’exception d’une rente de quinze cents francs qu’il se legue, & d’un présent qu’il fait à Lisette. […] Figurons-nous la chambre d’un malade : le testateur est au fond d’une alcove obscure, enveloppé dans ses draps ; les rideaux de son lit bien fermés, ou seulement entr’ouverts pour la forme, achevent de le cacher aux regards trop scrupuleux du Notaire & des témoins sur-tout.
Vous le ferez tomber malade.
Il le tend en même temps, vise, & me perce le cœur ; ensuite il se met à sauter en riant de toute sa force, & en me disant : Mon hôte, réjouis-toi avec moi, mon arc est en bon état, mais ton cœur est bien malade.
» Mais cette imputation réitérée de changement ne tarda pas à être dissipée, par une visite d’affection que madame de Maintenon alla faire à madame de Coulanges, qui était malade, au plus tard, le 12 novembre 1677, dans le premier éclat de sa faveur, elle écrivait à mademoiselle de Lenclos, pour l’engager à continuer ses conseils à son frère, qui en avait grand besoin.
Dans cette scène, et dans d’autres qu’une critique juste ne doit pas passer sous silence, telles que la cérémonie du Malade imaginaire, les autres intermèdes de cette farce et les ballets du Bourgeois gentilhomme, Molière s’est élevé jusqu’au comique exagéré et arbitraire de la bouffonnerie. […] Quand le docteur Pancrace prie Sganarelle de passer de l’autre côté, « car cette oreille-ci est destinée pour les langues scientifiques et étrangères, et l’autre est pour la vulgaire et la maternell e76 » ; quand Clitandre, pour savoir si Lucinde est malade, tâte le pouls à son père77 ce sont là, n’en déplaise à Molière, de vraies plaisanteries comiques, et nullement des traits de caractère. […] Le Malade imaginaire, acte III, scène iii. […] Toutefois, bien d’autres en avaient fait autant avant lui, et je ne vois pas ce qui, dans ce genre, devrait l’ériger en créateur unique et entièrement original… Nous allons examiner brièvement si Molière a vraiment réussi à perfectionner les pièces qu’il a imitées, en tout ou en partie, de Plaute et de Térence… Plusieurs des sujets de Molière ont tout l’air d’être empruntés d’ailleurs, et je suis convaincu qu’il serait possible d’en découvrir la source si l’on parcourait les antiquités littéraires de la farce ; c’est ce qu’atteste formellement le savant Tiraboschi : Molière, dit-il, a tellement tiré parti des comiques italiens, que si on lui reprenait tout ce qu’il en a emprunté, les volumes de ses Œuvres ne seraient pas en si grand nombre… Notre Hans Sachs avait mis en œuvre avec assez de gaieté l’idée de la scène du Malade Imaginaire, où l’on met l’amour de la femme à l’épreuve en supposant la mort du mari… Dans les farces mêmes que Molière a véritablement inventées, il ne laisse pas de s’approprier des formes comiques imaginées chez les étrangers, etc.
Le septième n’en contient que deux, savoir Le Malade imaginaire : et L’Ombre de Molière.
A la fin de cet acte III (scène 9) de l’Étourdi, Trufaldin, impatienté par le défilé des masques, arrose grossièrement Léandre ; en quoi il peut fort bien imiter la duègne du Dom Japhet d’Arménie de Scarron (acte IV, scène 6), mais en quoi il peut aussi exécuter une menace de Phénice dans le Parasite de Tristan : PHÉNICE Abandonnez cet huis, et n’y revenez plus, Ou sur l’étui chagrin de ce cerveau malade J’irai bientôt verser un pot de marmelade.
La dernière pièce qu’il composa fut le Malade imaginaire. […] Il lui prit une convulsion en prononçant juro, dans le divertissement de la réception du Malade Imaginaire. […] Le Malade imaginaire, En trois actes, avec des intermèdes, fut représenté sur le théâtre du Palais-Royal le 10 février 1673.