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5. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XLI. Des Episodes. Maniere de les lier aux Caracteres principaux, & de placer les Caracteres accessoires. Embonpoint d’une Piece. » pp. 475-492

Je suis, pour vous servir, Gentilhomme Auvergnac, Docteur dans tous les jeux, & maître de trictrac. […] Le jeu fait vivre à l’aise Nombre d’honnêtes gens, fiacres, porteurs de chaise ; Mille usuriers fournis de ces obscurs brillants Qui vont de doigts en doigts tous les jours circulants ; Des Gascons à souper dans les brelans fideles, Des Chevaliers sans ordre, & tant de Demoiselles Qui, sans le lansquenet & son produit caché, De leur foible vertu feroient fort bon marché, Et dont, tous les hivers, la cuisine se fonde Sur l’impôt établi d’une infaillible ronde. […] Il n’en est pas de même de la piece que Regnard a imitée, le Chevalier Joueur, comédie en cinq actes, & en prose, de Dufresny : il y a une Comtesse & un Marquis si bien liés au caractere principal, qu’on ne peut les retrancher sans perdre en même temps tout ce qui caractérise le plus un homme possédé du démon du jeu. […] On sera bien aise de voir avec quelle adresse il l’entraîne au jeu dans un de ces bons moments où la raison sembloit l’éclairer. […] On vous a dit peut-être que je me suis retiré du jeu.

6. (1765) Molière dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (compilation) pp. 2668-16723

Quelque critique pour condamner ce genre, a osé dire qu’il étoit nouveau ; on l’en a cru sur sa parole, tant la legéreté & l’indifférence d’un certain public, sur les opinions littéraires, donne beau jeu à l’effronterie & à l’ignorance. […] Et emmy la ville, y avoit plusieurs autres jeux de divers mysteres, qui seroient très-longs à racompter. […] Leurs vices sur-tout ont je ne sai quoi d’imposant qui se refuse à la plaisanterie : mais les situations les mettent en jeu. […] De-là vient qu’il y a dans ces pieces de mauvaises pointes, des bouffonneries, des turlupinades, de petits jeux de mots. […] Ils se regardent aussi comme ne faisant avec eux qu’une même personne ; & dans cette vue l’amour-propre joue admirablement bieu son jeu.

7. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VII. Le théâtre français contemporain des Gelosi » pp. 119-127

Les acteurs étaient toujours obligés d’en revenir à la vieille Farce, à la Farce « garnie de mots de gueule », aux jeux des pois pilés, qui continuaient d’avoir la faveur populaire. […] Nous pouvons, du reste, assister à un jeu des pois pilés (c’était le nom populaire qu’on donnait aux Farces de l’Hôtel de Bourgogne), aussi facilement que nous avons assisté aux représentations des Gelosi. […] Ce fut la fin de la farce de ces beaux jeux, mais non de ceux que voulurent jouer, après, les conseillers des aides, commissaires et sergents, lesquels, se prétendant injuriés, se joignirent ensemble et envoyèrent en prison MM. les joueurs ; mais ils furent mis dehors le jour même, par exprès commandement du roi, qui appela les autres sots, disant Sa Majesté que, s’il fallait parler d’intérêt, il en avait reçu plus qu’eux tous, mais qu’il leur avait pardonné et pardonnerait de bon cœur, d’autant qu’ils l’avaient fait rire jusqu’aux larmes.

8. (1843) Épître à Molière, qui a obtenu, au jugement de l’Académie française, une médaille d’or, dans le concours de la poésie de 1843 pp. 4-15

La Fronde, dans ses jeux parodiant la Ligue, Jusques au dénouement de sa bizarre intrigue Déroula devant toi son long imbroglio, Spectacle pour Thalie apprêté par Clio, Et de ton Étourdi dans ce drame frivole Tu vis plus d’un acteur anticiper le rôle. […] Dresse ton monument près du funèbre lieu Où deux modestes sœurs, deux servantes de Dieu, Seules, la nuit, témoins de ton heure dernière, À ta voix expirante unirent leur prière, Quand des jeux de la scène au drame du trépas Tu passais tout d’un coup, et devais faire, hélas ! […] Dans tes jeux les plus fous quelle raison t’anime !

9. (1734) Mémoires sur la vie et les ouvrages de Molière (Œuvres de Molière, éd. Joly) [graphies originales] pp. -

Cependant on y reconnoît dans le jeu des personnages, une source de vray comique ; peres, amans, maîtresses, valets, tous ignorent mutuellement les vûës particuliéres qui les font agir, ils se jettent tour à tour dans un labyrinthe d’erreurs qu’ils ne peuvent démêler. […] Séduite par le jeu des acteurs, frappée d’une nouvelle espéce de tragi-comique, elle fit grace à un mélange monstrueux de religion & d’impiété, de morale & de bouffonneries. […] 27 Moliere lui-même ne conseille de lire cette comédie qu’aux personnes qui ont des yeux pour découvrir dans la lecture tout le jeu de théatre. […] Plaute n’auroit pas rejetté le jeu même du sac, ni la scéne de la galére, rectifiée d’après Cyrano, & se seroit reconnu dans la vivacité qui anime l’intrigue. […] Le soin avec lequel il avoit travaillé à corriger & à perfectionner son jeu, s’étendoit jusques sur ses camarades.

10. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre III. La commedia dell’arte en France » pp. 31-58

L’impromptu donne lieu à la variété du jeu, en sorte qu’en revoyant plusieurs fois le même canevas, on peut revoir chaque fois une pièce différente. […] Quand on sait les préoccupations et les passions qui agitaient alors ces députés, on conçoit difficilement qu’ils trouvassent beaucoup d’attraits aux jeux des Pantalon et des Zanni. […] Aussi, les confrères de la Passion, qui continuaient à jouer leurs Farces, leurs Soties et leurs Moralités à l’Hôtel de Bourgogne, et qui jouissaient d’un privilège en vertu duquel il était fait défense à tous autres de représenter des jeux dramatiques dans la ville, faubourgs et banlieue de Paris, s’émurent de la redoutable concurrence que leur faisaient les nouveaux venus. […] Il est souvent le meneur du jeu, c’est lui qui conduit toutes choses, déconcerte les plans des vieillards, sauve et unit les amants malheureux.

11. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XII. Réflexions Générales. » pp. 241-265

De plus, la postérité conviendra qu’il devait lui être extrêmement difficile, sinon impossible, de distinguer l’auteur comique, sublime dans ses œuvres comme dans son jeu, de l’acteur, avili par l’immoralité ou la médiocrité des pièces que, dans l’intérêt de sa troupe, il se faisait un triste devoir de jouer lui-même, avec une indifférence, hélas ! […]   Il est d’abord évident que, dans la répugnance de l’Église catholique pour les représentations théâtrales, il y a un souvenir des abominables jeux du Cirque, où le spectacle, mêlé d’une prostitution monstrueuse et sacrée, passait incessamment, pendant des journées et des semaines entières, d’un combat de gladiateurs à une atellane obscène, à une naumachie, à une comédie, à un repas de bêtes nourries de martyrs, ou à une brûlerie de chrétiens enduits de poix. […] Ce qui peut être innocent aux champs prend souvent dans les grandes cités, par la surexcitation de l’intelligence et des sens, un caractère funeste, aussi bien que le jeu, aussi bien que le verre de vin bu. librement entre amis. […] Voir à la fin des Œuvres de Molière (Paris, Poirion, 1749, 8 vol. in 12) plus de vingt épitaphes ou épigrammes qui ne roulent que sur ce jeu de mots, qu’on trouve pour la première fois dans le Mercure galant, 1673, tome 1. […] « Les jeux, les bals, les festins, les pompes, les comédies, en leur substance, ne sont nullement choses mauvaises, ains indifférentes, pouvant être bien et mal exercées. » Saint François de Sales, Introduction à la vie dévote, chap.

12. (1874) Leçon d’ouverture du cours de littérature française. Introduction au théâtre de Molière pp. 3-35

La liste s’ouvre par le Christ souffrant, rapsodie grecque longtemps attribuée à Saint Grégoire de Nazianze, et par le Jeu des sept sages, composé par Ausone vers la même époque, c’est-à-dire au IVe siècle. […] Remarquons cependant que les compositions alors en vogue, le Jeu du Pèlerin, le Jeu de Robin et Marion, le Jeu de Saint-Nicolas, le Jeu de Pierre de la Brosse, le Miracle de Théophile, enfin le Jeu de la Feuillée (car les six poèmes que je viens d’indiquer composent tout l’inventaire dramatique du XIIIe siècle) ; remarquons, dis-je, que ces compositions, tout en offrant une sorte de physionomie scénique, ne sont encore que des pastorales, des dialogues, et n’ont pas été, à vrai dire, représentées. […] Le grand d’Aussy, jésuite qui publia d’après les manuscrits, en 1780, un fragment du Jeu de Saint-Nicolas, dénomme aussi cette pièce « une production très longue, encore plus ennuyeuse et d’un genre absurde.

13. (1746) Notices des pièces de Molière (1658-1660) [Histoire du théâtre français, tome VIII] pp. -397

L’un défenseur zélé des bigots mis en jeu, Pour prix de ses bons mots le condamnait au feu. […] Corneille l’aîné, fut la pièce choisie pour cet éclatant début : ces nouveaux acteurs ne déplurent point, et on fut surtout fort satisfait de l’agrément et du jeu des femmes ; les fameux comédiens qui faisaient alors si bien valoir l’Hôtel de Bourgogne étaient présents à cette représentation. […] Trop de complication dans le nœud, et trop peu de vraisemblance dans le dénouement : cependant on y reconnaît dans le jeu des personnages une source du vrai comique ; pères, amants, maîtresses, valets, tous ignorent mutuellement les vues particulières qui les font agir : ils se jettent tour à tour dans un labyrinthe d’erreurs, qu’ils ne peuvent démêler. […] Ensuite il voulut faire une pièce en cinq actes, et les Italiens ne lui plaisant pas seulement dans leur jeu, mais encore dans leurs comédies, il en fit une qu’il tira de plusieurs des leurs, à laquelle il donna pour titre : L’Étourdi, ou les Contretemps. […] Les uns disaient que véritablement la pièce était belle, mais que le jeu faisait une partie de sa beauté, les autres ajoutaient que la rencontre du temps où l’on parlait fort des Précieuses aidait à la faire réussir, et qu’indubitablement ses pièces n’auraient pas toujours le même succès, quand le temps ne les favoriserait pas.

14. (1845) Œuvres de Molière, avec les notes de tous les commentateurs pp. -129

Là, ces indications sont d’autant plus précieuses qu’elles sont l’image du jeu même de Molière. […] La différence de jeu avait fait naître de la jalousie entre les deux troupes. […] Elle joignit au talent de la déclamation et du jeu de théâtre celui de la danse. […] De là elle revint au faubourg Saint-Germain, et c’est alors seulement qu’elle s’établit au jeu de paume de la Croix-Blanche. […] Ceci est un trait lancé contre Beaubourg, qui avait remplacé Baron, et dont le jeu était outré.

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