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5. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre II. La commedia dell’arte » pp. 10-30

Aux quinzième et seizième siècles, la comédie improvisée devint un art très savant qui lutte avec la comédie régulière, qui crée plus que celle-ci des caractères durables, qui laisse dans l’imagination des peuples une trace plus profonde, et qui se vulgarise et se popularise dans toute l’Europe. […] Les bouffons et les masques créèrent les types qui allaient se perpétuer et devenir bientôt cosmopolites. […] Parfois aussi, lorsque les pièces devinrent très compliquées, très chargées de personnages et d’incidents, les canevas entraient dans tous les détails de l’action ; la trame était tissue avec soin ; à l’acteur d’y broder les arabesques d’une libre fantaisie, suivant la disposition du moment et celle que montrait le public. […] Elle ne devient un art que lorsqu’elle prend conscience d’elle-même, qu’elle se systématise, obtient des effets voulus, et se propose un but. […] Cet habit devint noir, en signe de deuil, après la prise de Constantinople par les Turcs ; puis, le noir prévalut par habitude et fut le plus généralement en usage pour ce pourpoint ainsi que pour la robe.

6. (1856) Molière à la Comédie-Française (Revue des deux mondes) pp. 899-914

Il y a pourtant parmi les spectateurs des esprits complaisants pour qui l’admiration est devenue un besoin impérieux, et qui louent sans hésiter la nouvelle Célimène. […] S’il a conscience du ridicule auquel il s’expose, s’il le témoigne publiquement, s’il se moque de lui-même, toute la comédie devient impossible. […] Depuis quand le théâtre est-il devenu chose sérieuse ? […] Mais si tout le monde s’avisait de suivre un tel conseil, que deviendraient les convenances ? que deviendraient les opinions accréditées ?

7. (1852) Légendes françaises : Molière pp. 6-180

D’ailleurs, ces pauvres gens que j’ai amenés si loin, que deviendraient-ils ? […] Il lui sembla qu’il devenait jaloux. […] La polémique, durant cet intervalle, ne devint que plus vive. […] La toux, les convulsions, le crachement de sang, devenaient de plus en plus fréquents et effrayants. […] Plus il se voyait abandonné de sa femme, plus aussi il devenait sensible à la moindre amitié.

8. (1900) Molière pp. -283

Qu’est-il devenu ? […] Ces personnes-là eurent un bien autre sujet de mécontentement en 1662, quand fut jouée L’École des femmes, dans une scène de laquelle Arnolphe, pour devenir complet, lui qui est déjà mari systématique, devient docteur et pédant de morale et de religion. […] Un poète peut s’en mêler ; il peut devenir poète politique et rester cependant grand poète. […] Voilà qui menace de devenir philosophique. […] Dès aujourd’hui, je fais le serment de devenir un grand homme, dussé-je commencer par être avocat, sycophante ou démagogue.

9. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VII. La Chaussée, imitateur de Regnard, d’un Auteur Espagnol, d’un Auteur Italien, d’un Romancier François, &c. » pp. 262-276

Il l’avoit épousée par inclination ; on prétendoit même qu’il l’avoit enlevée ; &, depuis son mariage, il avoit toujours eu pour elle toutes les attentions possibles, lorsque, malheureusement pour Madame de Lon... il devint passionnément amoureux de la veuve d’un Officier subalterne sur les galeres. […] | Cette veuve, qui, sans faire attention aux bienséances, & aux suites d’une pareille aventure, n’avoit que l’ambition de devenir Marquise, reçut avidement ses propositions. […] que veut-il que devienne notre fils ? […] Le Marquis d’Ormancé perd ses parents, se fait appeller le Marquis d’Orvigni, croit Mélanide morte, & devient amoureux de Rosalie, fille de Dorisée. […] Je serai dénué de tout ce qu’en naissant Le plus vil des mortels apporte avec la vie : Malheureux d’être né, je vais porter envie A tous ceux qui devoient me voir au-dessus d’eux : J’en deviens le dernier & le plus malheureux !

10. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Dorante a lu Kant ; d’homme du monde aimable et galant qu’il était autrefois, il est devenu un peu scolastique. […] Pourquoi, devenue femme, a-t-elle éprouvé pour Shakespeare tant d’horreur avant de l’aimer ? […] Serait-ce qu’elle compare aujourd’hui leurs œuvres à cet idéal devenu clair à ses yeux, et la netteté de cette intuition est-elle cause que ses sentiments actuels sont justes ? […] qu’êtes-vous devenus ! […] Que chacun de nous devienne beau et divin, s’il veut contempler la beauté et la divinité.

11. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre IV. — Molière. Chœur des Français » pp. 178-183

Chœur des Français Jamais leur passion n’y voit rien de blâmable, Et dans l’objet aimé tout leur devient aimable. […] Ses personnages, élevés du particulier au général, résument en eux des catégories entières ; ils participent de la nature immuable et essentielle de l’homme, un hypocrite a quelque chose de l’hypocrisie absolue, un jaloux, quelque chose de la jalousie absolue ; leur nom propre devient un substantif commun ; ils sont de tous les pays, et demeurent à jamais contemporains des générations qui se succèdent246. […] Tirant le comique du fond des caractères, et mettant sur la scène la morale en action, un poète français est devenu le plus aimable précepteur de l’humanité qu’on eût vu depuis Socrate274.

12. (1882) Molière (Études littéraires, extrait) pp. 384-490

Mais abrégeons : cette foule devient si pressante, que Timon est obligé de faire place nette à coups de hoyau. […] Devenu M.  […] Pour que son héros devînt populaire, il fallait que sa taille le signalât dès l’abord à tous les regards. […] Ce qui était bon devient alors excellent ; ce qui était obscur brille désormais en pleine lumière. […] Il s’était établi à Troyes, où il devint chanoine.

13. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

Elle a de l’intérêt par elle-même ; il n’est pas indifférent à la morale, de voir comment cette femme, née dans une prison, d’un père protestant, qui se ruina au jeu et mourut à la Martinique, où elle fut laissée en gage à un créancier par sa mère obligée de venir chercher du pain en France ; renvoyée à sa mère, à quatorze ans, par ce créancier qui trouvait trop onéreux de la nourrir ; devient à quarante-cinq ans l’amie, la confidente d’un roi galant, parvient à le détacher de ses maîtresses, ne voulant prendre la place d’aucune, et à quarante-huit ans devient la femme de ce roi, plus jeune qu’elle de trois ans. […] Le duc de Saint-Simon, dans sa juste animadversion pour l’injure que fit aux pairs, aux princes, à la nation entière, à son droit public, à ses mœurs, l’élévation du duc du Maine, fruit d’un double adultère, mais devenu digne d’une haute destinée par les soins de madame de Maintenon ; le duc de Saint-Simon, dis-je, comparant la naissance du duc du Maine avec les honneurs démesurés dont cet enfant fut comblé, se laissa aller au plus cruel et au plus injuste mépris pour madame de Maintenon, à qui le jeune prince devait le mérite précoce et distingué qui avait favorisé son élévation. […] Sa femme en attira une meilleure encore, se fit aimer et admirer par des personnes du premier rang, qui l’attirèrent dans leur maison, notamment le maréchal d’Albret ; il était devenu amoureux d’elle n’étant encore que comte de Miossens ; il la fit connaître à la maréchale, dont elle gagna la confiance et la tendre estime. […] Ce fut alors que le désir de la conserver et de retendre devint en elle une passion qui a formé le trait saillant de son caractère. […] Petite-fille d’Agrippa d’Aubigné, gentilhomme français, compagnon et familier de Henri IV, mais dénuée de toute fortune, son nom lui ouvrit les meilleures maisons : devenue veuve, sans parents, ce n’était pas assez de son nom pour s’y soutenir au rang que son nom lui marquait ; il fallait y être aimable.

14. (1853) Des influences royales en littérature (Revue des deux mondes) pp. 1229-1246

Ce qui est chez eux de la douceur et de la grâce est déjà devenu chez d’autres de la faiblesse et de l’afféterie. […] Sans remonter plus haut que Henri IV, nous trouvons que ce roi, de peu généreuse mémoire, pensionnait déjà des gens de lettres : exemple suivi par sa veuve devenue régente5. […] Louis XIV devenu roi, Colbert eut l’idée de donner des pensions à tous les auteurs qui semblaient tenir un rang distingué dans l’estime des contemporains. […] De ces deux listes, on en fit une seule, devenue l’état des pensions de 1663, si souvent cité comme une véritable curiosité. […] La facilité de gagner augmente chez nos contemporains la passion de s’enrichir : l’art d’écrire est trop souvent devenu une industrie où beaucoup de talent se perd, se gaspille chaque jour.

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