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77. (1824) Notice sur le Tartuffe pp. 91-146

Il est donc heureux pour la scène française qu’il ait vécu dans les premières années de Louis XIV ; c’est un bonheur non moins grand pour le monarque, car le siècle qui porte son nom eût perdu le plus beau fleuron de sa couronne littéraire. […] Le nom d’un chef-d’œuvre mérite bien autant de recherches que le nom d’un homme, et nous vivons dans un temps où il n’est peut-être pas hors de propos de s’occuper de la généalogie du Tartuffe. […] Il serait possible que cette intention fut entrée pour quelque chose dans l’addition de cette scène ; mais il est plus vraisemblable que, soit pour s’assurer de plus en plus la protection du prince dont Molière connaissait le faible pour la louange, soit pour préparer le dénouement où sa royale autorité devait intervenir, il fut bien aise d’amener par la pétulance de Damis ces vers qu’il a placés dans la bouche du sage Cléante : Modérez, s’il vous plaît, ces transports éclatants ; Nous vivons sous un règne et sommes dans un temps Où par la violence on fait mal ses affaires. Le changement le plus remarquable de tous est à coup sûr celui que Molière a fait au dénouement, dans ce fameux passage : Nous vivons sous un prince ennemi de la fraude. […] Chacun en bénissait le Seigneur, et ne pouvait trop s’étonner de ce que des gens qui vivaient austèrement avaient meilleur visage que ceux qui vivaient dans le luxe et l’abondance. » Telles sont, après bien des recherches, les seules sources où Molière ait puisé pour la composition de son chef-d’œuvre.

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