Ainsi l’ambition est soupçonneuse, inquiete, inconstante dans ses attachemens qu’elle noue ou rompt selon ses vûes ; l’amour est vif, impétueux, jaloux, quelquefois cruel ; la vengeance a pour compagnes la perfidie, la duplicité, la colere, & la cruauté : de même la défiance & la lésine accompagnent ordinairement l’avarice ; la passion du jeu entraîne après elle la prodigalité dans la bonne fortune ; l’humeur & la brusquerie dans les revers : la jalousie ne marche guere sans la colere, l’impatience, les outrages ; & la vanité est fondée sur le mensonge, le dédain, & la fatuité. […] Plaute est plus vif, plus gai, plus fort, plus varié ; Terence, plus fin, plus vrai, plus pur, plus élégant : l’un a l’avantage que donne l’imagination qui n’est captivée ni par les regles de l’art ni par celles des mœurs, sur le talent assujetti à toutes ces regles ; l’autre a le mérite d’avoir concilié l’agrément & la décence, la politesse & la plaisanterie, l’exactitude & la facilité : Plaute toûjours varié, n’a pas toûjours l’art de plaire ; Térence trop semblable à lui-même, a le don de paroître toûjours nouveau : on souhaiteroit à Plaute l’ame de Térence, à Térence l’esprit de Plaute. […] Un peuple qui a mis long-tems son honneur dans la fidélité des femmes, & dans une vengeance cruelle de l’affront d’être trahi en amour, a dù fournir des intrigues périlleuses pour les amans, & capables d’exercer la fourberie des valets : ce peuple d’ailleurs pantomime, a donné lieu à ce jeu muet, qui quelquefois par une expression vive & plaisante, & souvent par des grimaces qui rapprochent l’nomme du singe, soûtient seul une intrigue dépourvûe d’art, de sens, d’esprit, & de goût. […] Aussi fécond en ressorts, aussi vif dans l’expression, aussi moral qu’aucun des trois.