Et d’ailleurs quel vice le Dorante de Corneille possède-t-il, dont on puisse dire qu’il est une conséquence ou un contrecoup de son vice principal ? […] Mais avec Molière, nous rions du ridicule inhérent au vice ou à la passion ; —à l’amour d’Arnolphe pour Agnès, car si Arnolphe aimait une femme d’âge mûr, tout le comique disparaîtrait-, — à la colère d’Alceste s’exerçant contre des choses insignifiantes : à ces choses insignifiantes substituons des objets qui en vaillent la peine, Alceste cesse à tel point d’être ridicule que l’on a pu demander si, dans certaines scènes, il ne relevait pas du drame plutôt que de la comédie ; — à l’aveuglement pour Trissotin, de Philaminte, Armande et Bélise, — etc. […] Examinons de plus près sa satire : et nous verrons qu’il ne l’a jamais dirigée que contre ceux dont le vice ou le ridicule est de masquer, de fausser, d’altérer, de comprimer, ou de vouloir contraindre la nature. […] En effet, ce sont vices qui opèrent dans le sens de l’instinct, conformément à la nature ; ce sont vices qui s’avouent et au besoin dont on se pare. […] Ainsi du moins a-t-il fait dans le Misanthrope,où la « sincère Eliante » départage Alceste et Philinte, et dans les Femmes savantes, où ce n’est pas le bonhomme Chrysale, ni le beau-frère Ariste, ni peut-être Clitandre, mais Henriette surtout qui incarne sa véritable pensée… Mais Elmire n’est qu’une aimable femme, à qui l’on peut bien dire que toute idée religieuse paraît être étrangère, qui ne trouve, pour répondre à la grossière déclaration de Tartufe, aucun des mots qu’il faudrait : D’autres prendraient cela d’autre façon, peut-être : Mais sa discrétion se veut faire paraître ; et comme, d’ailleurs, sa vertu n’en est pas moins inattaquable, qu’est-ce à dire, sinon que, par nature, « gens libères… ont un aiguillon qui les pousse à faits vertueux et les retire de vice ?