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153. (1802) Études sur Molière pp. -355

Le but moral. — Molière l’a porté au plus haut degré, en faisant de Tartuffe, non seulement un hypocrite, mais encore un suborneur qui, tout en parlant vertu, veut séduire la femme de son ami ; un monstre enfin qui dénonce son bienfaiteur. […] Que le personnage principal amène la catastrophe par un trait bien marqué de son caractère ; qu’elle change en bien tout le mal que l’on redoute ; que la vertu soit récompensée, et le vice puni. […] Ajoutons qu’en appliquant ces quatre vers à Orgon, Dorine semble vouloir excuser Elmire, sur la vertu de laquelle on ne doit faire naître aucun soupçon. — Ce lazzi est de tradition. — Monsieur le journaliste, la tradition a tort, quand elle perpétue les sottises. […] Elle a donc tout à fait renoncé au projet de démasquer Tartuffe ; car elle ne peut certainement pas espérer que l’homme adroit, soupçonneux, à qui tous les prestiges de la coquetterie la plus raffinée viennent de promettre une victoire complète, confondra les emportements de la colère avec les derniers soupirs de la vertu prête à céder. […] Le poète et le musicien allaient ensemble travailler à Auteuil, lorsqu’un pauvre à qui Molière avait, par mégarde, donné un double louis courut après lui pour le lui rendre ; notre philosophe, en le lui laissant, s’écria : « où la vertu va-t-elle se loger ! 

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