Mon homme a toutes les peines du monde à croire qu’une femme de bien puisse faire de pareils tours ; mais, pour l’en convaincre mieux, cette honnête dame devient amoureuse du petit page, et veut le prendre à force ; mais comme il faut que justice se fasse, et que, dans une pièce de théâtre, le vice soit puni ou la vertu récompensée, il se trouve à la fin du compte que le capitaine se met à la place du page, couche avec son infidèle, fait cocu son traître ami, lui donne un bon coup d’épée au travers du corps, reprend sa cassette, et épouse son page. […] D’abord pour le commencement, De ce beau divertissement, Sortit d’un rocher en coquille, Une naïade, ou belle fillea… Qui récita quarante vers, Au plus grand roi de l’univers, Prônant les vertus dudit sire : Et certainement j’ose dire, Qu’ils ne seraient pas plus parfaits, Quand Apollon les aurait faits. Tous ceux qui bien les écoutèrent, Jusques au Ciel les exaltèrent : Leur sage auteur, c’est Pellisson, Des Muses le vrai nourrisson, Que non seulement on estime, Par sa noble et savante rime, Mais pour plusieurs vertus qu’en lui, Chacun reconnaît aujourd’hui, Et surtout étant le modèle, D’un ami solide et fidèle. […] Dans la comédie italienne, Pantalon est amoureux d’une jeune fille, dont il attaque vivement la vertu. […] C’est un exercice que peu de gens ignorent, et dont l’usage est venu d’Allemagne. » « [*]Le dimanche 11 mai, le roi mena toute la Cour l’après-dînée à sa ménagerie… Le soir, Sa Majesté fit représenter sur l’un de ces théâtres doubles de son salon, que son esprit universel a lui-même inventés, la comédie des Fâcheux faite par le sieur Molière, mêlée d’entrées, de ballets, et fort ingénieuse. » « [*]Lundi 12 mai… le soir, Sa Majesté fit jouer les premiers actes d’une comédie nommée Tartuffe, que le sieur Molière avait faite contre les hypocrites ; mais quoiqu’elle eût été trouvée fort divertissante, le roi connut tant de conformité entre ceux qu’une véritable dévotion met dans le chemin du Ciel, [et] ceux qu’une vaine ostentation des bonnes œuvres n’empêche pas d’en commettre de mauvaises, que son extrême délicatesse pour les choses de la religion eut de la peine à souffrir cette ressemblance du vice avec la vertu ; et quoiqu’on ne doutât pas des bonnes intentions de l’auteur, il défendit cette comédie pour le public, jusqu’à ce qu’elle fût entièrement achevée, et examinée par des gens capables d’en juger, pour n’en pas laisser abuser à d’autres moins capables d’en faire un juste discernement. » « [*]Le mardi 13 mai… on joua le même soir la comédie du Mariage forcé, encore de la façon du même sieur Molière, mêlée d’entrées de ballet et de récits ; puis le roi prit le chemin de Fontainebleau le mercredi quatorzième ; toute la Cour se trouva si satisfaite de ce qu’elle avait vu que chacun crut qu’on ne pouvoir se passer de le mettre par écrit, pour en donner la connaissance à ceux qui n’avaient pu admirer tout à la fois le projet avec le succès, la libéralité avec la politesse, le grand nombre avec l’ordre, et la satisfaction de tous ; où les soins infatigables de M.