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18. (1881) La philosophie de Molière (Revue des deux mondes) pp. 323-362

C’est là une sorte de raisonnement analogue à celui que Descartes, dans son doute méthodique, dirigeait contre la véracité des sens : Puisqu’ils nous trompent quelquefois, disait-il, ils peuvent bien nous tromper toujours. […] vous êtes encore connu en Israël. » On objecte la difficulté de distinguer en cette matière le vrai du faux : « Et pourquoi, mon cher auditeur, de deux partis prenez-vous toujours le moins favorable, et, sur un soupçon vague, pourquoi voulez-vous que ces dehors trompent toujours parce qu’ils trompent quelquefois ?  […] Le libertin pourra dire encore : Si la dévotion trompe quelquefois, elle peut donc tromper toujours, aussi bien Bourdaloue qu’un autre. […] Tromper toutes les femmes n’était que le fait du libertin ; mais choisir une religieuse pour la tromper est un raffinement d’esprit fort qui rentre dans le caractère général de don Juan. […] N’est-ce pas encore celui dont nous avons ri d’abord, que nous avons plaint ensuite, celui qui a été trompé, abandonné, mais dont l’âme est supérieure à tout ce qui l’entoure et qui ne souffre que de cette supériorité même ?

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