Je tâche à lui jouer pourtant d’un mauvais tour ; Je me frotte d’onguent cinq à six fois le jour. […] Quand le Misanthrope est indigné de tous les traits de médisance que Célimène et sa société viennent de lancer sur les absents, sur des gens qu’ils voient tous les jours en qualité d’amis; quand il leur dit avec une noble sévérité : Allons, ferme, poussez, mes bons amis de cour; Vous n’en épargnez point, et chacun à son tour. […] Quand deux médecins assis près de M. de Pourceaugnac, l’un à droite, l’autre à gauche, délibèrent gravement en sa présence, et dans tous les termes de l’art, sur les moyens de le guérir de sa prétendue folie, et que, sans lui adresser seulement la parole, ils le regardent comme un sujet livré à leurs expériences, cette scène n’est-elle pas d’autant plus plaisante, qu’elle a un fond de vérité, qu’un pareil tour n’est pas sans exemple, et qu’il y a encore des médecins capables de faire devenir presque fou d’humeur et d’impatience l’homme le plus raisonnable, s’il était mis entre leurs mains comme insensé? […] Ce n’est pas que, sous le point de vue le plus général et le plus frappant, la pièce ne soit utilement instructive, puisqu’elle enseigne à ne point s’allier à plus grand que soi, si l’on ne veut être dominé et humilié ; mais aussi l’on ne peut nier qu’une femme qui trompe son mari le jour et la nuit, et qui trouve le moyen d’avoir raison en donnant des rendez-vous à son amant, ne soit d’un mauvais exemple au théâtre; et il peut être plus dangereux de ne voir dans la mauvaise conduite de la femme que des tours plaisants, qu’il n’est utile de voir dans George Dandin la victime d’une vanité imprudente.