(Cet auteur ayant vent en poupe) Occupa tant lui que sa troupe, Avec de célestes récits1, À toucher les plus endurcis : Animés des douceurs divines, De deux rares voix féminines ; (Qui font comme j’ai dit un jour) Les rossignols de la Cour, Que personne ne contrecarre, À savoir, Hilaire, et La Barre. […] Le défaut des Espagnols est de ne se contenter jamais de la juste mesure d’une action ou d’une situation ; Molière, qui connaissait ce faible, trouva qu’il y avait, dans la scène dont nous parlons, deux surprises de théâtre, et, jugeant qu’il ne fallait n’en laisser dominer qu’une, il affaiblit la première, pour rendre la seconde et plus vive et plus frappante ; il augmenta dans celle-ci l’intérêt du spectateur, en le faisant jouir du plaisir de voir le prince l’emporter par la ruse sur la princesse ; on sait qu’elle n’a d’autre dessein que de découvrir les véritables sentiments du prince, pour ne lui faire ensuite éprouver que des dédains, et le traiter comme ses autres amants ; d’un autre côté, on voit que le prince n’a d’autre intention que de la toucher et de lui inspirer de l’amour ; dans cette situation, la princesse fait une fausse confidence de l’état de son cœur, et feint d’être sensible à l’amour d’un de ses amants. […] Mardi dernier* Sa Majesté, Admira fort la rareté, D’une machine surprenante, Faite en épinette sonnante, Qui par un secret non commun, Et sans la voir toucher d’aucun, Joue avecque justesse extrême, Plusieurs nouveaux airs d’elle-même. […] L’effroyable Festin de Pierre, Si fameux par toute la terre, Et qui réussissait si bien, Sur le théâtre italien, Va commencer l’autre semaine, À paraître sur notre scène, Pour contenter et ravir ceux, Qui ne seront point paresseux, De voir ce sujet admirable, Et lequel est, dit-on, capable, Par ses beaux discours de toucher, Les cœurs de bronze et de rocher ; Car le rare esprit de Molière, L’a traité de telle manière, Que les gens qui sont curieux Du solide et beau sérieux, S’il est vrai ce qu’on en conte, Sans doute y trouveront leur compte. […] Je me réduisis donc à ne toucher qu’un petit nombre d’importuns ; et je pris ceux qui s’offrirent d’abord à mon esprit, et que je crus les plus propres à réjouir les augustes personnes devant qui j’avais à paraître, et pour lier promptement toutes ces choses ensemble, je me servis du premier nœud que je pus trouver.