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156. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE PREMIER. Regnard imitateur comparé avec la Bruyere, Plaute, & la nature. » pp. 5-50

Il joue au trictrac ; il demande à boire, on lui en apporte : c’est à lui à jouer, il tient le cornet d’une main & un verre de l’autre ; & comme il a une grande soif, il avale les dés & presque le cornet, jette le verre d’eau dans le trictrac, & il inonde celui contre qui il joue. […] Se trouve-t-il en campagne, il dit à quelqu’un qu’il le trouve heureux d’avoir pu se dérober à la cour pendant l’automne, & d’avoir passé dans ses terres tout le temps de Fontainebleau : il tient à d’autres d’autres discours ; puis revenant à celui-ci : Vous avez eu, lui dit-il, des beaux jours à Fontainebleau ; vous y avez, sans doute, beaucoup chassé ? […] Un ramassis de distractions plaisantes peut amuser dans un ouvrage où il suffit de coudre les différents traits l’un à la suite de l’autre sans fixer la durée du temps qui les vit naître ; mais dans une comédie où ils doivent tous arriver dans l’espace de vingt-quatre heures, où ils doivent tenir l’un à l’autre, s’enchaîner naturellement & produire des effets toujours plus comiques & plus naturels, le cas est bien différent. […] La conséquence n’est pas juste, Monsieur : l’argent est bien, mais nous ne le tenons pas. […] La corneille se tient sur ses pieds, comme pour épier & prendre bien son temps ; elle mord tour à tour les deux oiseaux de proie.

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